Le président de l'Union africaine de la médecine Sportive, le Professeur Constant Antoine Roux (Côte d'Ivoire) a bien voulu apporter des éclaircissements sur l'absence de toute activité de cette organisation lors des Jeux de la jeunesse africaine qui se sont déroulés récemment à Alger. Dans cette interview qu'il a accordé conjointement au Quotidien d'Oran et à El Massa, le professeur Roux a affirmé qu'il n'a pas admis la non-programmation par le COJA (comité d'organisation des Jeux de la jeunesse africaine) des activités de l'organisation qu'il dirige depuis sa création en 1982 à Alger, tout en mettant en relief le rôle joué par l'Algérie pour consolider les acquis de la médecine sportive en Afrique. Le Quotidien d'Oran: Comment expliquez-vous l'absence de toute activité de l'UAMS aux Jeux de la jeunesse africaine qui se sont déroulés à Alger? Constant Antoine Roux : Je ne comprends pas du tout et je suis même outré. Je crois que cette absence est due essentiellement à l'inexistence de toute coordination entre le comité d'organisation de ces Jeux et l'UAMS, qui avait pourtant pris part aux deux assemblées générales ordinaire et extraordinaire de l'Union des confédérations africaines sportives (UCSA), tenues au Caire au mois de mai 2018. Q.O.: Doit-on déduire que le COJA a omis volontairement de passer outre votre contribution à la réussite de cette manifestation sportive continentale ? C. A. R.: Je me demande si le nouveau comité directeur de l'UCSA et son nouveau secrétaire général ont bien spécifié au COJA de la présence effective de l'UAMS comme partie prenante à ces jeux, comme cela s'est fait aux Jeux africains de Harare, Abuja, Johannesburg, Alger, Maputo et Brazzaville. Q.O.: Des membres de l'UAMS étaient pourtant présents à ces jeux d'Alger comme le docteur Amara Touré du Tchad. C.A.R.: Oui, trois membres du bureau exécutif étaient présents à Alger, à savoir le deuxième vice-président, le docteur Amara Touré du Tchad, à qui j'avais donné carte blanche pour agir au nom de l'UAMS en mon absence, le professeur Rachid Hanifi de l'Algérie, qui est un ancien président du Comité olympique algérien à qui j'avais demandé de faire un constat global, et le docteur Mohamed Yassine, président de la fédération algérienne de boules qui m'avait assuré, lors de la réunion du Caire, qu'il ferait en sorte que le COJA m'invite pour une conférence sur le sport et l'enfant intitulé : « traumatisme du cartilage de croissance », ainsi que le professeur Dah Cyrille (Côte d'Ivoire) qui préside la commission scientifique de l'UAMS et précisément la commission médicale de l'ACNOA (l'association des comités nationaux olympiques africains). Q.O.: Ces personnes que vous venez de citer vous ont-elles fait parvenir des rapports sur l'absence de conférences médicales lors de ces jeux ? C.A.R.: Oui, le vice-président Amara Touré et le professeur Rachid Hanifi m'ont renseigné sur ce sujet. Q.O.: Absences donc de la réunion technique de la commission médicale, de la commission anti-dopage, en plus de la non-organisation d'une conférence scientifique. Cela relève-t-il de l'absence de coordination au sein de l'UAMS elle-même ? C. A. R.: L'UAMS n'est pas responsable de la non-programmation des activités aux Jeux africains de la jeunesse disputés à Alger, car j'ai personnellement contacté le secrétaire général de notre organisation pour qu'il avertisse les dirigeants de l'UCSA du nombre et des modalités d'invitations de cinq membres de l'UAMS devant coopérer avec la commission médicale du COJA, les modalités de leur mise en route et leur prise en charge ainsi que le titre de deux communications scientifiques que moi-même et le docteur Cherif Rezkellah étions prêts à assurer. Tout cela avait été aussi envoyé sous forme de copie au président et au secrétaire général de l'UCSA, au président par intérim de l'ACNOA Mustapha Berraf ainsi qu'à monsieur Mohamed Yassine Kafi. Q.O.: De ce fait, est-ce que le COJA a tout simplement refusé d'admettre les activités de l'UAMS à ces jeux? C. A. R. : Vous me posez là une question pertinente. Je souhaiterais vivement que ces problèmes de personnes n'entravent pas le bon fonctionnement et la quiétude de nos institutions continentales. Ce serait déplorable mais, pour ma part, je suis serein. Q.O.: Devant ces faits, l'UAMS va-t-elle adresser un rapport à l'UCSA au sein de laquelle votre organisation est membre ? C. A.R. : Naturellement, car c'est la moindre des choses. Nous avons déjà demandé à notre secrétaire général au Caire d'envoyer une lettre de protestation à l'UCSA. Q.O.: Beaucoup de temps s'est écoulé depuis la création de l'UAMS à Alger. Comment évaluez-vous le travail accompli jusque-là par votre organisation ? C. A. R. : L'UAMS a 36 ans d'existence (1982-2018). Le travail qu'on a accompli est connu. Chaque année, nous avons tenu une réunion du comité exécutif au niveau du quartier général au Caire, où nous possédons un siège et bénéficions d'une subvention annuelle du ministère des Sports d'Egypte. L'UAMS a toujours participé aux réunions de l'UCSA - AASC (dont elle est membre fondateur). J'ajoute que l'UAMS a toujours organisé deux jours de conférence de médecine de sport avant chaque tournoi des Jeux Africains. Je tiens à signaler aussi que l'UAMS a crée cinq commissions permanentes (scientifique, éducation, spécialités médicales, ACNOA, la femme et le sport). Par ailleurs, l'UAMS se félicite et s'enorgueillit d'éditer son bulletin annuel, et reçoit des cotisations annuelles des associations nationales de médecine de sports (double signature sur le compte en devises étrangères). L'UAMS recrute des membres individuels médecins (où chaque membre du comité exécutif adhère obligatoirement. Il faut signaler que l'UAMS est représentée au niveau mondial à la FIMS (Fédération internationale de médecine de sport) avec deux postes : un poste de vice-président et un autre poste de membre pour l'Afrique. Grâce à l'UAMS, le professeur Miche Rieu (France et doyen à Lourdes et moi-même avons conclu un accord de partenariat avec l'Université francophone Senghor d'Alexandrie. Q.O.: Quel a été le rôle joué par l'Algérie pour l'enracinement de l'UAMS en Afrique ? C. A.R.: Le premier siège de l'UAMS et le poste de secrétaire général trésorier étaient dévolus à l'Algérie, pays membre fondateur, et que tenait le regretté professeur algérien Larbi Mekhalfa. Le siège a été transféré au Caire lors de la période de troubles qu'avait connue l'algérie. Mais, lors des Jeux africains 1978 disputés à Alger, l'UAMS a pleinement participé avec deux journées de conférence sur la médecine du sport comprenant des médecins algériens, avec le professeur Rachid Hanifi qui, en tant que membre du comité exécutif de l'UAMS, a participé comme conférencier aux Jeux africains de Maputo et de Brazzaville. Hanifi a également donné des cours de médecine de sport. Lors de la dernière réunion du comité exécutif de l'UAMS au Caire, le professeur Dah Cyrille nous a proposé les noms de deux nouveaux médecins algériens ayant payé leurs droits d'adhésion comme membres individuels de l'UAMS, les docteurs Mazri Mohamed et Kouache Ferhat. Le nom du professeur Larbi Mekhalfa figure dans l'entête de correspondance de l'UAMS en tant que membre fondateur. Il est donc fort regrettable que l'Algérie, berceau de l'UAMS, ait raté le rendez-vous avec l'histoire lors des tous derniers Jeux de la jeunesse africaine à Alger 2018. Q.O.: Quel est l'avenir de la médecine sportive en Afrique ? C. A. R.: C'est en unifiant nos efforts et en participant aux différents congrès de la médecine du sport que nous pourrons assurer la formation des nouvelles générations. Q.O.: Vous êtes bien placé pour évaluer la médecine sportive en Algérie. Quel est votre commentaire ? C. A. R.: J'ai beaucoup de respect pour la médecine du sport en Algérie. En ce qui me concerne, je ne suis pas prêt d'oublier que l'Algérie reste le berceau de l'UAMS. Lors des Jeux africains d'Alger 1978, j'ai pu visiter le centre de médecine du sport très performant d'Alger. Nous avons beaucoup de médecins de sport algériens membres individuels de l'UAMS et je connais des collègues français de grande renommée qui viennent périodiquement dispenser l'enseignement de la médecine du sport lors des conférences ou séminaires dans différentes villes d'Algérie. Je citerai les professeurs Jacques Rodineau et Xavier. Et, n'eut été les perturbations de la décennie noire, l'Algérie aurait continué à détenir le siège de l'UAMS. Evitons donc de diviser et de vouloir exclure les hommes de sciences. Les anciens ont un devoir de transmission aux jeunes générations. Q.O.: Quelles sont les personnes du mouvement sportif algérien avec lesquelles vous entretenez toujours des relations de travail ou d'amitié ? C.A.R.: Personne n'oubliera la grande valeur du regretté professeur Larbi Mekhalfa qui, à l'époque déjà, avait conçu un plan architectural clinique de la médecine du sport. Au sein du comité directeur de l'UAMS, nous avons collaboré avec le docteur Soltani, membre de la confédération africaine de boxe qui a, hélas, émigré aux Emirats. Pour les contemporains, il y a l'excellent professeur Rachid Hanifi, et un grand monsieur, celui que j'appelle mon frère et ami Hamid Hocine Oussedik, avec qui je tenais des rencontres assidues au sein de l'Unesco de Paris où il était le «visionnaire», responsable dans la division du sport. Hamid Hocine Oussedik devait être nommé au poste de secrétaire général du Conseil des sports en Afrique (CSSA), au moment où tout était en chantier dans l'organisation des politiques sportives au tout début de nos indépendances africaines.