L'activité des médias audiovisuels et électroniques sera soumise prochainement à un «encadrement juridique», a annoncé hier sur les ondes de la Chaîne 3 le ministre de la Communication, Porte-parole du gouvernement, Amar Belhimer, tout en ajoutant que toutes les chaînes privées de télévision en activité «seront de droit algérien» et seront transmises sur le satellite algérien Alcomsat 1. «Les médias audiovisuels et électroniques seront prochainement encadrés juridiquement car ils sont déjà agréés. Le problème c'est que ces médias évoluaient dans un secteur de non-droit car le mode de gouvernance a fait très peu cas de la place du droit comme mode de régulation (...) le droit de la force et non la force du droit qui a prévalu (...) Nous allons faire rentrer dans la matrice juridique un certain nombre d'activités, comme celles relatives à l'audiovisuel qui obéissent à des droits étrangers en ce moment et qui sont portées par des organes de transmission étrangers. Parallèlement, nous allons encadrer également l'activité de la presse électronique qui réunit pour le moment quelque 150 sites électroniques. Nous leur avons donné l'autorisation d'exercer leurs activités en attendant de les encadrer juridiquement à partir de la semaine prochaine», affirme le ministre qui a tenu à préciser qu'« aucun site électronique n'est bloqué ». Abordant la liberté de la presse en Algérie, le ministre plaide pour une «responsabilisation» du métier de journaliste. « Je prône comme cadre commun d'exercice du métier de journaliste, une matrice qui repose sur l'équation liberté-responsabilité», a déclaré Belhimer tout en soulignant que celle équation «mettra en harmonie une liberté totale avec abolition du système d'agrément». Le ministre insiste toutefois : «un système de responsabilité qui encadre l'exercice de cette liberté» laquelle doit «respecter le droit à l'image d'autrui, l'honneur et la vie privé des personnes». Selon Belhimer, la matrice qu'il défend «repose aussi sur un certain nombre de valeurs partagées relatives à l'éthique et la déontologie, ainsi qu'à l'autorégulation et la régulation de la profession». À propos de la presse écrite, le ministre révèle qu'« il n'y a pas une seule entreprise de presse, publique ou privée, qui soit viable», ajoutant que «toutes les entreprises rencontrent aujourd'hui des difficultés, dont celle de s'adapter à des mutations technologiques». A une question sur une éventuelle aide de l'Etat pour les journaux en difficulté, le ministre était clair : «pour l'instant il n'y a aucun outil financier pour soutenir la presse papier en difficulté puisque le fonds de soutien à la presse n'est plus alimenté depuis 2015 (...) Les moyens de soutien disponibles en ce moment se limitent aux dettes auprès des imprimeries, la publicité d'Etat, et les maisons de la presse qui mettent des locaux à la disposition des titres de la presse dans différentes wilayas du pays». Concernant les moyens de préserver les droits des journalistes, il a signalé la nécessité de la mise en place «d'associations et de syndicats représentatifs, actifs, puissants et unitaires, qui valorisent le bon exercice du métier». Le ministre a par ailleurs appelé au renforcement du lien entre une mobilisation sociale et populaire permanente avec la représentation politique. Le changement «c'est la rupture avec un état de fait qu'il faut évaluer préalablement », a-t-il déclaré sur les ondes de la radio Chaîne 3. Le plan du gouvernement, selon lui, est venu pour sortir le pays de ce «champ de mines et de ruines ». Sur le plan politique, Belhimer estime que «l'Etat algérien était dans un état de délabrement total et heureusement que le Hirak béni a pris conscience de l'état d'effondrement avancé des institutions de la République». Le ministre soutient que le soulèvement populaire est le fruit d'une « crise d'un modèle de représentation déjà précaire » qui caractérise l'Etat. « Précaire, parce qu'il remonte à la Constitution de 1989, secouée par plusieurs crises et parce que plus récemment encore, ce modèle [de représentation politique] est aggravé par un double facteur : une allégeance de type féodal... et l'intrusion de l'argent sale sur la scène politique ». Le ministre plaide pour un raffermissement du « lien entre une mobilisation sociale et populaire permanente avec la représentation politique». «Si vous ne changez pas de mode de gouvernance, il ne sert à rien d'emprunter ou d'injecter de l'argent», dit-il. C'est pour cela que « le plan d'action du gouvernement place l'équation politique au premier rang des chantiers ouverts », affirme l'invité de la radio qui explique que «la crise en Algérie est d'essence politique avant d'être économique et financière ». Selon Belhimer, la démarche du gouvernement vise « à réhabiliter les institutions de l'Etat, fortement menacées par 20 ans de gabegie », en insistant, particulièrement, sur la nécessité de « renouer avec le système de suffrage universel et de couper la relation entre l'argent et l'exercice du pouvoir ».