Avant de déclarer le forum algéro-libyen ouvert, le ministre des Affaires étrangères a annoncé l'arrivée hier à Alger du chef du gouvernement libyen d'Union nationale, Abdelhamid Dbiba, «avec une importante délégation». Sabri Boukadoum a ainsi étroitement lié deux événements importants, le premier économique qu'est le forum algéro-libyen et le second éminemment politique par l'arrivée de Dbiba à Alger. On apprend que le chef du gouvernement libyen d'Union nationale sera accompagné de 9 ministres. Les autorités des deux pays prévoient par cette visite de s'entretenir sur la situation politique et sécuritaire de la Libye et conclure des accords bilatéraux dans des domaines économiques et commerciaux. C'est donc le MAE qui a procédé hier à l'ouverture du forum économique algéro-libyen à l'hôtel El Aurassi en présence des officiels, Alahoum, conseiller du président de la République, le secrétaire général du ministère de la Défense nationale, le ministre du Commerce ainsi que le ministre libyen de l'Economie et du Commerce venu à Alger avec un nombre considérable de responsables d'institutions et plus de 300 chefs d'entreprises et hommes d'affaires. Forum qui, a dit Boukadoum, «représente une autre forme toute aussi importante que celle politique et sécuritaire qu'apporte l'Algérie à la Libye parce qu'il permet de mettre en place les fondements d'un partenariat économique réel et global entre les deux pays». L'Algérie, a-t-il enchaîné, «estime que le partenariat entre les deux pays ne doit pas se contenter de l'augmentation du volume des échanges commerciaux mais doit aller au-delà pour concrétiser l'échange d'investissements directs entre eux, la création de sociétés mixtes, la participation dans le capital des entreprises et autres, la mise en place de mécanismes susceptibles de permettre l'exploitation des grandes opportunités de coopération qui existent entre les deux pays». Pour réaliser «cet objectif stratégique», a-t-il fait savoir, «les autorités algériennes ont pris une série de décisions et de mesures à même de poser le cadre institutionnel et juridique qui permet aux hommes d'affaires des deux pays de lancer des projets de coopération et des partenariats( )». Réouverture du poste frontalier Edebdab-Ghdames Le chef de la diplomatie algérienne a annoncé «sur instruction du président de la République, la réouverture du poste frontalier d'Edebdab, avec la Libye, reste du côté algérien les dernières mises en place logistiques et techniques en collaboration avec le côté libyen». Présent au forum, le maire de Ghdames a affirmé qu' «on est en train de préparer la réouverture du poste frontalier du côté libyen pour recevoir les marchandises algériennes». Il a profité pour lancer «un appel aux hommes d'affaires des deux pays pour s'occuper des zones du Sud». Boukadoum a indiqué, en outre, que «les deux pays se préparent à relancer les discussions finales autour de la réouverture de la ligne maritime reliant Tripoli à Alger en vue de son exploitation pour le transport des marchandises». En préambule de ces annonces, le MAE a déroulé à l'effet de «l'objectif d'un partenariat économique stratégique», une véritable feuille de route qu'il a émaillée de rappels historiques et diplomatiques importants. Son premier rappel historique, les deux bombardements par la France coloniale d'Issine, la ville frontalière libyenne avec Illizi, le 3 octobre 57 et le 25 septembre 58, «parce ce qu'elle a accusé sa population de fournir des armes aux moudjahidine algériens». Boukadoum a vite fait de revenir à la situation en Libye pour rappeler «les efforts de la diplomatie algérienne pour convaincre au plan régional et international de la nécessité pour la Libye de reprendre sa place au sein du Maghreb arabe, de l'Afrique et des Nations». Il a alors affirmé qu' «au moment où certains ne se sont pas rendu compte et d'autres ont craint la difficulté, l'Algérie a pris l'initiative de recevoir les antagonistes libyens et ce, quelles que soient leurs divergences, pour rapprocher entre eux en vue de rechercher par eux-mêmes des solutions consensuelles pour éloigner leur pays des velléités et des interventions de pays étrangers qui convoitent ses richesses». L'Algérie a en outre, rappelle-t-il, «soutenu toutes les initiatives internationales sérieuses et sincères visant l'arrêt des hostilités en Libye tout autant que le processus de Berlin et la signature de l'accord politique libyen sous les auspices des Nations Unies». Les demandes libyennes à l'Algérie Le MAE a réitéré «le soutien indéfectible de l'Algérie aux efforts des autorités libyennes incarnées par le Conseil présidentiel et le gouvernement d'Union nationale pour la stabilité politique et sécuritaire en Libye, la réalisation de la réconciliation nationale entre tous les Libyens, l'unification de l'ensemble des institutions de l'Etat et leur renforcement en prévision de la tenue d'élections générales transparentes et crédibles». Présent hier à l'Aurassi, le ministre de l'Economie et du Commerce libyen, Mohamed El Houidj, a, pour sa part, déclare que «le forum est un pas vers la véritable voie pour construire l'avenir ensemble». Il a exhorté les hommes d'affaires des deux pays «à lancer des investissements ensemble et d'échanger mutuellement les connaissances et le savoir». L'énergie, la construction, la sécurité alimentaire, les ressources hydriques, les industries manufacturières sont les premiers secteurs, selon lui, où il est possible pour les deux pays de coopérer. Il a pour cela demandé la réactivation des accords signés depuis de longues années entre les deux pays mais jamais appliqués. Les deux parties algérienne et libyenne sont appelées, estime-t-il, à «travailler ensemble pour pénétrer les marchés des pays voisins mais aussi africains dans le cadre de la zone africaine économique et commerciale de libre-échange». Le ministre libyen a fait savoir à l'assistance algérienne que «le gouvernement libyen d'Union nationale et les hommes d'affaires publics et privés offrent toutes les facilités pour lancer un programme de partenariat économique et commercial entre les deux pays». El Houidj a demandé à «unifier les formalités douanières au poste frontalier de Ghdames, d'ouvrir une ligne maritime commune ainsi qu'une autre aérienne». Il estime qu' «il est possible de créer des zones de libre-échange aux frontières des deux pays». Pour lui, «il est possible d'augmenter le volume d'échanges entre les deux pays à 3 milliards de dollars et c'est facile par la mise en place d'un programme commun de coopération économique». Avant lui, le ministre du Commerce, Kamel Rezig, a fait savoir que le volume d'échanges commerciaux entre les deux pays a atteint les trois dernières années 59 millions de dollars, en hausse par rapport à 2015 où il n'a pas dépassé les 31. 320 Libyens à Alger les dernières 24h Au lieu des 100 hommes d'affaires et chefs d'entreprises libyens inscrits à la CACI pour participer au forum, Alger a reçu «les dernières 24h, 320 libyens tous secteurs confondus», nous ont appris des organisateurs. Le forum algéro-libyen a compté hier plus de 500 participants entre Algériens et Libyens que la salle de conférence de l'Aurassi n'a pu contenir. Il fallait en projeter les travaux sur écran dans d'autres salles mitoyennes. La fin de la matinée d'hier a été consacrée à la présentation «des besoins des Libyens» pour la reconstruction de leur pays. Le président de l'institution libyenne de la privatisation et de la promotion de l'investissement, Djamel Nemouchi, a proposé la constitution de consortiums entre Algériens et Libyens «parce que le monde n'aime pas les faibles mais aime les forts». Il estime que «la production du ciment, l'industrie, l'agroalimentaire algériens ont atteint des niveaux appréciables, ce qui nous pousse à vous solliciter pour la reconstruction de la Libye». Il a cité une loi libyenne de 2007 amendée en 2010 qui octroie «beaucoup d'avantages à l'investisseur local et étranger». Il a fait part de l'existence d'«un guichet unique, d'un programme de privatisations totales ou partielles d'entreprises publiques et des avantages fiscaux importants, exemptions de taxes douanières tout au long de la réalisation des projets( )». Il estime qu' «il ne faut pas réfléchir trop longtemps, il faut nous lancer ensemble dans un partenariat stratégique» tout en assurant que «la Libye est sécurisée». Aujourd'hui et demain, la Safex abrite une exposition de produits algériens assurée par près de 300 entreprises publiques et privées aux côtés de quelques entreprises libyennes.