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Quelques murmures sur la jeunesse en général et la jeunesse rurale en particulier (1ère partie)
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 24 - 11 - 2022

Souvent dit-on qu'il faut faire quelque chose pour les jeunes parce qu'ils constituent les hommes et les femmes de demain, les responsables et les décideurs de demain. Cela n'est pas tellement faux, mais je crois pouvoir dire autrement ; il faut s'occuper des jeunes parce qu'ils sont le dynamisme d'aujourd'hui, l'enthousiasme et la créativité, l'esprit innovateur d'aujourd'hui et tout ce qui en découle c'est le fruit d'aujourd'hui et le bienfait de demain.
En Algérie, l'importance accordée aux jeunes est déjà pleinement confirmée dans la Constitution de 2020 (Art.73) qui stipule d'une manière explicite que «l'Etat veille à réunir les moyens institutionnels et matériels à même de développer les capacités de la jeunesse et à encourager son potentiel créatif» Doté aujourd'hui d'un cadre institutionnel «le Conseil supérieur de la jeunesse» qui constitue, on ne peut mieux, une assise pour participer pleinement à la vie publique et contribuer au développement national, les jeunes ont toute la latitude d'exprimer leur force motrice et leur volonté d'œuvrer à la promotion socio-économique du pays.
Il est à rappeler que cette entité (le conseil) est venue concrétiser l'un des 54 engagements de Monsieur le Président de la République qui veille, d'une façon soutenue à inscrire la promotion de la jeunesse comme l'une de ses priorités nationales, c'est dire que le Conseil dédié à l'expression des jeunes constitue une aubaine qui leur permet d'adhérer pleinement à la «nouvelle dynamique» que connait le pays.
Cet organe consultatif institué le 27 octobre 2021, en vertu des dispositions de la constitution de 2020, formule des avis, des recommandations et des propositions concernant les questions relatives aux besoins de la jeunesse ainsi qu'à son épanouissement dans les domaines économique, social, culturel, sportif et autres. Il contribue aussi entre autres, à la promotion des valeurs nationales, de la conscience patriotique, de l'esprit civique et de la solidarité sociale au sein de cette catégorie de la population et participe à la conception du plan national jeunesse, ainsi que des politiques, des stratégies, des programmes et des dispositifs publics y afférents tout en favorisant l'esprit de citoyenneté, le volontariat et l'engagement des jeunes vis-à-vis de la société.
Ainsi donc, le conseil muni d'une panoplie de missions et de prérogatives, aussi larges que diversifiées lui conférant la responsabilité de s'intéresser à toutes les catégories et franges en mettant en exergue leurs préoccupations et attentes et ce, en coordination avec les instances publiques qui veillent indéniablement à leur promotion.
Dans ce modeste essai que nous réservons à la jeunesse, nous n'avons nullement la prétention d'aborder d'une façon exhaustive la problématique liée à cette catégorie de la population, mais seulement tenter de mettre sur le parterre certaines idées qui sont, estimons-nous au centre d'intérêt de cette frange sociale tout en ciblant particulièrement les «jeunes ruraux» et leur implication dans les grands enjeux économiques, politiques et sociaux et les défis qu'ils peuvent relever en matière de développement du pays et notamment en ce qui concerne le développement agricole et rural et de la manière par laquelle, ils peuvent être une force motrice pour promouvoir un tel développement, base de la sécurité alimentaire.
En prélude, il convient de souligner que la position des jeunes ruraux dans le processus de renouvellement des générations est à l'intersection de deux dynamiques essentielles. La première est celle des transformations économiques et sociales de la ruralité elle-même; la seconde est en relation avec les enjeux à portée structurelle pour l'avenir des formations sociales rurales dans leur ensemble, pour être un soubassement de l'évolution.
Voyons alors dans le contour de ce moult d'acceptions à caractère théorique mais sans rhétorique, certains des éléments de descriptif de la jeunesse et notamment la jeunesse rurale, en se référant à diverses expériences entreprises à l'échelle mondiale concernant cette catégorie à laquelle, un grand intérêt est accordé presque partout dans les milieux de réflexion, ici et ailleurs d'ailleurs visant à promouvoir les jeunes et leur permettre d'exprimer leur volonté et leur motivation pour contribuer au progrès et développement des nations.
1. La problématique des jeunes ruraux
Disons tout d'abord qu'à l'échelle mondiale, une énorme bibliothèque s'est constituée autour du développement des zones rurales et des populations qui y vivent. Dans ces zones, dit-on, la lutte quotidienne des pauvres pour leur survie particulièrement dans les régions les plus défavorisées et peu industrialisées, peut être une menace insidieuse, ici où la pauvreté épuise parfois, non seulement les hommes, mais également les ressources naturelles.
Très fertiles en volonté, mais démunies souvent de moyens, les populations rurales dans plusieurs régions du monde se trouvent accablées à des conditions du milieu défavorables, des populations parmi lesquelles, les jeunes ruraux en paient souvent un lourd tribut, car imbriqués dans «un circuit de misère», cette jeunesse dont les espoirs en buttent aux marasmes, ne peut ni se développer, ni créer des richesses. Telle est l'image éloquente dressée dans de nombreux endroits de la planète.
Circonscrits dans de tels problèmes, les jeunes ruraux particulièrement ceux dénudés de formation et d'enseignement adéquat, se mettent à chercher d'autres issues. Parmi eux, ceux qui ne succombent pas à l'apathie et au désespoir, se mettent à conquérir les villes, mais en réalité ces jeunes ne font que courir de la pauvreté à la misère, car la vie dans les villes engendre de nouveaux frais et de nouvelles charges qu'ils ne peuvent y satisfaire.
Les jeunes s'aperçoivent alors que la grande part de leurs revenus -lorsqu'ils obtiennent un poste de travail aussi dérisoire soit-il- est absorbée par les frais de l'alimentation, du logement, du transport et autres qu'ils ne peuvent y couvrir. Cette catégorie pris entre l'aspiration de vivre dans la ville et le retour au village sera livrée enfin au désespoir ; il en découle parfois des dérapages et des maux sociaux.
Héritiers des effets néfastes de l'accroissement démographique et d'une activité agricole qui constitue la base économique et sociale des zones rurales et particulièrement vulnérables au manque de services sociaux, sportifs et culturels en réponse à leurs attentes, de plus privés, pour la plupart, d'une éducation qui favorise l'épanouissement de leur intelligence, les jeunes ruraux seraient en danger. Mais bien que livrés à de telles conditions, ces jeunes ne perdent pas pour autant espoir, ils s'attendent à des perspectives plus prometteuses pour accéder aux possibilités d'emploi et de création de richesses. Pour une large part, c'est le secteur de l'agriculture qui leur offre les opportunités de s'épanouir.
Telle est résumée en somme, l'image qu'on peut dresser «vaille que vaille» concernant la jeunesse rurale dans de nombreux endroits de la planète notamment dans certaines régions appauvries par les tensions, les guerres et les aléas de la nature. Dès lors, la conscience et la volonté humaine, seront mises à rude épreuve.
2. Le concept de la jeunesse
Tout d'abord, il n'existe pas une unanimité sur le concept de la jeunesse et ses limites d'âge. Cette étape est comprise entre l'enfance et l'âge adulte. Le terme «jeunesse» ne désigne pas seulement un stade chronologique de la vie, mais chaque société à ses propres indicateurs, ses repères et ses propres critères de définition. Pour certaines sociétés, des garçons et des filles de dix (10) ans et peut-être moins ne sont plus considérés comme des enfants. Pour d'autres, le stade d'enfance dure plus longtemps.
En dépit de cette énorme diversité, il existe des caractéristiques communes à la jeunesse. Il s'agit d'une période de transition, de développement de l'indépendance sur les plans physique et moral, de préparation scolaire ou non, aux exigences, aux devoirs et aux responsabilités de membres à part entière de la communauté. C'est un moment d'incertitude et de découvertes.
C'est également une période où les dons, les compétences et les intérêts, la valeur en tant qu'individu et membre d'un groupe et les aspirations sont mises à l'épreuve. C'est une période où l'avenir- passionnant ou lugubre-apparaît dans toute sa dimension» (FAO-Journée mondiale de l'alimentation 1988).
Aussi et à des fins statistiques, les Nations Unies utilisent le terme «jeunes» pour désigner des catégories d'âges de 15 à 24 ans, une définition retenue lors des travaux de l'année internationale de la jeunesse (1985) et approuvée par l'Assemblée générale de l'ONU dans sa résolution 36-28 de 1981.
De nombreux pays dans le monde utilisent aussi la limite de l'âge de la majorité (correspondant généralement à 18 ans) comme un élément de référence pour parler de la jeunesse. C'est l'âge à partir duquel un individu est considéré comme adulte et bénéficie d'une égalité de traitement. Néanmoins, la définition opérationnelle et les nuances à apporter à l'expression « les jeunes » varient, nous avons vu, d'un pays à l'autre, selon des facteurs socioculturels, institutionnels, économiques et politiques.
Aujourd'hui, les Nations Unies estiment qu'il existe 1,2 milliards de jeunes répondants au critère d'âge de 15 à 24 ans représentent 16% de la population mondiale. Cependant, à l'horizon 2030, l'échéance retenu pour la mise en œuvre du programme de développement durable et de ses 17 objectifs (ODD), le nombre de jeunes devrait augmenter de 7 % pour atteindre près de 1,3 milliard d'individus, estime les Nations Unies.
3. Les problèmes auxquels butent les jeunes
Dans l'arbre des attentes, chaque catégorie de jeunes a ses aspirations et ses préoccupations. En somme, dans beaucoup d'endroits, les jeunes ne sont pas à l'abri des problèmes. Ils sont livrés parfois aux problèmes de la sous-alimentation, du manque de logements adéquats et de services médicaux et sociaux, de la dégradation de l'environnement qui sont autant de difficultés exacerbées dans de nombreux cas par les conséquences des tensions, des conflits et des guerres. Les changements climatiques affectent aussi les jeunes, car ils induisent l'exode suite aux sécheresses récurrentes, aux inondations et au phénomène de désertification.
Les jeunes ruraux sont en outre et souvent, dans certaines régions, acculés à des problèmes particuliers dont le plus important est peut-être l'impossibilité d'acquérir un enseignement satisfaisant de telle sorte que non seulement les écoles sont rares et manquent de personnels et d'équipements et parfois les programmes dispensés ne sont pas adaptés aux intérêts et aux besoins de ces jeunes du milieu rural. Aussi, lorsque la scolarisation est possible, ce sont les parents qui, parfois, ne veulent pas ou ne peuvent pas pour des raisons économiques ou autres sociales, envoyer leurs aînés à l'école et tout particulièrement les filles. Il en découle souvent et c'est clair, un analphabétisme crucial, ce qui constitue pour eux un handicap et un fardeau qu'ils entrainent, peut être toute la vie, un phénomène qui s'aggrave et qui devient une tare à supporter par le pays concerné.
Ainsi, un grand nombre de jeunes reste donc mal préparés du point de vue intellectuel et professionnel à participer à la vie économique, sociale, culturelle et politique de la communauté et ils ne peuvent de ce fait, avoir le bagage nécessaire pour contribuer d'une façon efficace aux processus de développement local ou national en dépit de leur espoir de se voir promouvoir.
Dans bien des pays, la jeunesse rurale pose aux pouvoirs publics un certain nombre de problèmes qu'ils doivent d'abord comprendre et percevoir. L'expérience acquise en la matière dans diverses parties du monde a permis de constater qu'il se pose presque partout les mêmes difficultés liées tout particulièrement :
• à la motivation : réalisant que les zones rurales sont omises dans les programmes de développement, les jeunes perdent confiance et s'inquiètent de leur avenir. Dès lors, ils épousent l'idée de partir ailleurs notamment dans les villes, là aussi, avons-nous soutenu, ils n'ont pas d'avenir, au contraire ils aggravent les problèmes sociaux et infrastructurels des grands centres urbains.
• à la formation : bien que de nombreux jeunes aient fréquenté les écoles, ils se voient souvent démunis du savoir-faire valable pour gagner leur vie dans les zones rurales. Aussi, ils restent mal préparés et peu équipés pour répondre aux exigences du développement rural, en particulier.
• à la participation : cet aspect est peut-être le plus important. Les jeunes se sentent souvent isolés et ne parviennent pas à s'insérer dans le contexte local. Dans certains cas, Ils ne sont pratiquement pas représentés et n'ont aucun moyen de se faire entendre. Livrés à eux-mêmes et à défaut d'une orientation valable, les jeunes perdent espoir; ils aggravent de la sorte, les conditions de vie dans les zones rurales voire urbaines.
• aux opportunités et possibilités : en réalité, ils n'existent pas assez de programmes ou de projets qui visent particulièrement les jeunes ruraux, mis à part, certains projets enregistrés dans le cadre de coopération et ils sont très rares. Aussi, même si des programmes sont envisagés, ils sont à caractère général et ne répondent pas directement aux préoccupations spécifiques de ces jeunes.
D'une manière générale, il est partout admis que l'espace rural constitue une plateforme de développement auquel la jeunesse rurale pourrait apporter toute sa contribution, les implications de cet apport seront d'autant avantageuses pourvu que l'on soutienne ses efforts et ses initiatives personnelles et collectives, sachant toutefois que les jeunes sont au centre du changement propre à favoriser le développement.
A suivre
*Agronome post - Universitaire


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