La voie publique est finalement devenue infréquentable en ce Ramadhan caniculaire, sensé être le mois de la piété et de la sagesse. Rien ne subsiste de ces bonnes vertus qui distinguaient autrefois le mois du carême, la place a été prise d'assaut par une violence qui ne s'explique plus, les rixes et les accrochages verbaux débutent de bon matin, et malheureusement finissent souvent en drame, à l'heure du f'tour….. ! De 10 à 15 bagarres sont enregistrés juste au centre-ville en une seule heure, sans les autres dizaines de plaintes qui pleuvent au commissariat du matin au soir, selon un officier de la police nationale. Mostaganem, comme le reste des régions du pays, n'a pu échapper à cette flambée de violence qui a atteint son paroxysme en cette première semaine du Ramadhan, en enregistrant un bilan national des plus alarmants, qui laisse apparaitre le chiffre effrayant de 2000 bagarres et plus de 100 blessés aux quatre premiers jours du carême ! La chaleur torride du mois, le ventre vide, et la soif qui ne peut s'étancher que le soir, au delà de 20 heures, le jeuneur semble perdu au sein de cette jungle où d'autres énergumènes ont les nerfs à fleur de peau et la dégaine trop facile. Trop souvent, il suffit d'un simple regard ou d'un geste de main pour qu'une bagarre éclate et dégénère en une rare violence où le recours à l'arme est fatal et cause des blessures ou l'inévitable mort. Le théâtre de ces drames du Ramadhan, reste le marché public d'Ain Sefra, et les rues commerçantes du centre ville, qui vivent de 10 heures à 20 heures de rixes en bagarres rangées. L'origine de la querelle reste souvent un moindre mot qui a été différemment interprété par les jeuneurs, et dont chacun tenait à avoir raison. La violence a connu une escalade sans précédent pendant ces premiers jours du mois sacré, qui devait être celui de la piété, de la charité, du pardon et surtout de l'abstinence de toute mauvaise chose, malheureusement, seules quelques furtives explications nous ont été fournies sur cette étrange recrudescence de l'agression qui règne en maitresse en tout lieu. A la direction des affaires religieuses, un cadre rejette ce regain de violence sur l'absence d'éducation religieuse, de la perte des vertus et surtout de l'incivisme qui distingue tous nos actes quotidiens et regrette que la cellule familiale, qui est la base constitutive de la société ne joue plus son rôle d'élément majeur d'éducateur. A l'un des commissariats, un inspecteur qui tient à garder l'anonymat, pense que l'absence d'une forte culture est à l'origine de ce drame national, qui tend à s'intensifier davantage en face d'un pouvoir qui doit se plier aux différents traités de droits de l'homme. Au centre culturel islamique de la ville, un professeur d'université rencontré en ce haut lieu de savoir, croit que la recrudescence de l'agression en ce mois de Ramadhan est un phénomène national qui s'est installé depuis une longue date au pays, et qui tient ses origines de l'injustice sociale due à la mondialisation qui frappe de plein fouet les pays qui ne disposent pas d'organismes publics pour prendre en charge les tares sociales résultantes (chômage, délinquance, pauvreté et banditisme ). Quant à la réalité de ce fléau social qui bat son plein et fait rage aux quatre coins de la ville, il continue en ce neuvième jour à s'offrir un spectacle gratuit et sanglant tel ce drame qui a été évité de justesse grâce à l'intervention de la police, c'est à Beymouth qu'un vieux problème de voisinage a été « ressorti » par le plus vieux des voisins, et qui a failli mettre à feu et à sang la paisible localité, beaucoup de voisins se sont ligués avec le vieux qui avait tort de remuer une plaie de voisinage, déjà cicatrisée par le temps; le jeune voisin a failli être lynché par les autres voisins, en face des larmes du vieux loup, qui a profité pour ressortir une histoire de mœurs au cœur de Ramadhan. Le jeune accusé n'a du son salut qu'à l'intervention des éléments de la police nationale, qui ont été alertés par d'autres voisins. Une autre bagarre a éclaté juste à une centaine de mètres, au marché public du quartier, entre le chauffeur d'un bus qui a failli renverser une vieille dame qui revenait de son domicile, avec un panier de pain de maison. Les jeunes ont blâmé ce chauffard, qui a mal supporté ces vertes remarques, et a répondu par « un bras d'honneur » aux jeunes. Malheureusement, la violence est ancrée dans les mœurs de tous les algériens, ces derniers ne se sont pas faits trop attendre pour monter dans le bus et rouer le chauffeur de violents coups et seule la fuite vers le proche commissariat a pu le sauver d'une mort certaine par une bande de déchainés. Le Ramadhan ne peut expliquer à lui tout seul toute cette rage de violence qui relève plutôt d'une absence d'éducation morale et religieuse, et surtout une maitrise de soi en face de la faim, de la soif et de la canicule. Le mois sacré est un apprentissage de la patience, malheureusement, il semble être le mois de toutes les opportunités, une aubaine pour les commerçants pour fructifier les affaires, et une formidable chance pour les bandits de tous bords pour s'enrichir.