Mercredi dernier, 27 juin, la zaouia Boutchichia et pour la septième année consécutive n'a pas manqué de marquer son implantation définitive dans la contrée et dans la mémoire des autochtones qui, depuis les années 1950 n'ont pas vu un tel afflux de chouyoukhs de zaouias, d'érudits, d'exégètes, d'imams et de tolba, ces élèves des écoles coraniques auxquels il fait bon dès leur jeune âge de se frotter aux plus savants pour tenir haut le flambeau de ceux qui un jour lancèrent le djihad pour que vive l'Algérie authentique dont l'identité s'effrite de plus en plus. L'école primaire à la sortie de la ville en allant vers Sidi Harrat Benaïssa a été pavoisée pour l'occasion depuis plusieurs jours. Les autochtones, jeunes et moins jeunes, se sont donnés corps et âmes pour que l'accueil et les conditions de séjour soient à la hauteur de l'événement. Ainsi donc, selon les habitués, la fête a été une réussite, aussi bien de par l'organisation que par les moyens humains et matériels mis en branle. Durant la journée, un va-et-vient incessant de véhicules de tous types y compris des transports en commun, venant de toutes les contrées de l'Algérie, fit rappeler que le mot d'ordre a été donné à tous les adeptes et les hôtes que l'heure est à la fraternité ancestrale. Le Cheikh Benallal Abdelaziz, cet érudit natif de la contrée, venu spécialement de Syrie où il poursuit des études approfondies en théologie, après qu'il eut passé sur les bancs du Caire en Egypte, chez d'éminents Chouyoukh, veilla au grain et se chargea personnellement de l'accueil des invités. Et c'est ainsi que vers l'après-midi, dès l'arrivée sur les lieux de Cheikh Abdelhafid Soufi, la masse compacte de ces gens tout de blanc vêtus, s'aligna, assise sous la tente et sur les beaux tapis égayant de mille couleurs la cour de l'école, pour écouter les prêches de savants et d'imams venus pour l'occasion. Les prêches furent suivis par ces centaines d'universitaires, médecins, ingénieurs, enseignants, cadres de l'état ou simples citoyens, jeunes et vieux, dans un silence religieux. Dans ce monde des zaouias simples et dévouées à la cause du Créateur, l'heure était à la pensée à ceux qui souffrent, aux démunis et à la fraternité. Comme à l'accoutumée, des donateurs nantis ou défavorisés, présentèrent leurs dons discrètement entre les mains d'un prédicateur, une tradition ancestrale, afin d'améliorer la vie des étudiants des écoles coraniques. Tard dans la soirée, avant le copieux repas et la prière de la âicha, Cheikh Laâma Harrat de la zaouia Boutchichia, exceptionnellement pour notre journal ouvrit les portes de ses cuisines installées dans les classes pour l'occasion. Et tout sourire, nous affirma, que la fête est aussi une affaire de famille. Tantes, épouses, mères, grands-mères et filles, s'affairaient autour des grosses marmites. Hors d'œuvres, l'incontournable h'rira, haricots verts, pruneaux et boissons gazeuses étaient prêts à passer demain en main. Pas moins de 150 plateaux furent servis. Et puis vint l'heure des remémorations, des souvenirs, des embrassades, des échanges d'expériences, des présentations et des sourires, car le monde des zaouias est plein d'inoubliables événements qui marquent les individus d'une manière indélébile. Le monde des zaouias, ce monde de sagesse et de dévotion vous fait rêver et espérer comme cette nuit-là, être comme Cheikh Halimi Abdelkrim de la zaouia de Sebâa Chioukh sur les hauteurs de Remchi dans la wilaya de Tlemcen et Cheikh Bendiar Fouad, venu lui d'Achaâcha de la wilaya de Mostaganem. Vous n'échangerez contre rien une djemâa avec Cheikh Mekki Salah de la zaouia de Bermadia, ce professeur d'anglais, qui un jour lâcha tout pour cette intégrité morale qui fit de lui une légende à Sougueur. La zaouia de Zemmora du Cheikh Laâma Harrat, selon les dires, est prête à être mise en chantier, car le choix du terrain a été fait et ne reste plus que les dons de ceux-là qui ne manquent pas de marquer le sentier d'Allah de bienfaisance et de bonnes actions. Quand verra-t-elle le jour pour que Cheikh Harrat, puisse trouver un peu de répit?