Le Mouvement islamiste pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao) a pris le contrôle de la ville de Gao, mercredi au terme d'intenses combats avec les rebelles touaregs du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA). Une défaite sur fond de trafics de drogues, déplacements de populations qui fait craindre aux ONG un risque de somalisation du conflit. Autrefois alliés dans leur offensive pour faire tomber le Nord du Mali, les touaregs du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) et les djihadistes sont aujourd'hui engagés dans d'intenses combats qui ont tourné mercredi au net avantage de ces derniers.Les Mujao (Mouvement pour l'unicité et le djihad en Afrique de l'Ouest, une branche locale d'AQMI) ont pris le contrôle total de la ville de Gao (nord-est du Mali) après de violents combats avec des rebelles touaregs qui ont fait au moins 20 morts. Ils ont subi une lourde défaite, perdant leur quartier général pour tout le nord du Mali, installé dans le palais du gouverneur, ainsi que le camp militaire qu'ils contrôlaient près de l'aéroport. Un risque de somalisation ? Depuis fin mars, les villes et régions administratives du nord du Mali –Tombouctou, Kidal et Gao– sont tombées aux mains du Mujao et d'Ansar Dine, deux mouvements soutenus par AQMI, le MNLA et de divers groupes criminels. Cette chute de plus de la moitié du territoire malien a été précipitée par un coup d'Etat qui, le 22 mars, a renversé le président Amadou Toumani Touré.La collusion entre groupes terroristes d'AQMI, groupes de trafiquants de stupéfiants et mouvements séparatistes au Sahel a été dénoncée à plusieurs reprises par des rapports d'organisations internationales. Islamistes et trafiquants travaillent main dans la main et la région est devenue une plaque tournante du trafic du drogue. « Luttes entre rebelles et entre factions d'islamistes, trafiquants de drogue, otages, effondrement de l'armée régulière...Tout ça risque de tourner à l'affrontement général et à la zone de non-droit. On est en train de se créer une sorte de deuxième Afghanistan de proximité », expliquait en avril à Paris-Match Alain Chouet, ancien responsable de la DGSE. Consciente du risque de voir la situation virer au chaos au profit de groupes islamistes qui ne manqueront pas de nouer des alliances de conjoncture avec n'importe quelle cause, la communauté des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) a affiché un ton ferme dès le début de la crise au nord-Mali mais reste tiraillée par d'insurmontables désaccords entre partisans des négociations avec les séparatistes, et adeptes d'une intervention militaire rapide. A la violente rigueur imposée par les groupes islamistes aux populations de Gao et de Tombouctou, s'ajoutent des pénuries de toutes sortes qui menacent d'un drame humanitaire imminent. La crise malienne a conduit au déplacement interne d'environ 154 754 personnes et plus de 180 000 personnes se sont réfugiées dans les pays voisins, selon l'organisation internationale de migration (OIM). Les ONG sonnent l'alarme Recevant récemment son homologue nigérien, François Hollande a fait connaître le repositionnement de la politique étrangère française à l'égard de la crise malienne. Fini la « Françafrique » et ses options interventionnistes encouragées encore par l'ancien patron de l'Elysée. Place à une diplomatie plus classique. Le chef du quai d'Orsay n'a d'ailleurs pas tardé à nommer un « représentant spécial » pour le Sahel en la personne de Jean Felix-Paganon.« Diplomate chevronné », selon la lettre Sahel intelligence, l'ex-ambassadeur d'Egypte devra remettre un plan d'action pour le Sahel et a déjà fait un détour par Bamako pour des entretiens avec le Premier ministre malien, Cheick Modibo Diarra pour expliquer qu'il était hors de question pour la France de s'engager dans le soutien de « revendications indépendantistes ».