L'arrivée des beaux jours signale habituellement la fin de l'épidémie saisonnière de la grippe. Le coronavirus Sars-Cov-2, qui se transmet de la même façon, pourrait-il lui aussi naturellement disparaître avec la chaleur ? Rien n'est moins sûr, même si les chercheurs pensent que sa propagation pourrait être grandement freinée. Le 10 février dernier, le président américain Donald Trump avait déclaré que « d'ici avril, ou au cours du mois d'avril, la chaleur en général tue ce genre de virus [du Covid-19] ». Une prédiction démentie comme on le voit aujourd'hui avec l'explosion des cas dans le monde. Toutefois, on sait que la grippe par exemple est un phénomène saisonnier, l'arrivée du printemps entraînant une baisse significative du nombre de cas. De plus, on constate que le Covid-19 semble se propager moins vite dans les pays de l'hémisphère Sud, comme en Afrique. Pourquoi l'hiver favorise la propagation des virus Cette situation est liée à plusieurs phénomènes liés à la fois à la nature du virus et à nos comportements. « Tout d'abord, le virus de la grippe semble mieux survivre par temps froid et sec, avec moins de lumière ultraviolette », indique Jeremy Rossman, professeur de virologie à l'université du Kent (Royaume-uni), au site The Conversation. Deuxièmement, les journées d'hiver plus courtes entraînent une réduction des niveaux de vitamine D et de mélatonine, ce qui peut affecter les performances de notre système immunitaire. Enfin, nous passons plus de temps confinés à l'intérieur avec d'autres personnes, ce qui augmente les possibilités de propagation du virus. Une étude publiée en 2013 dans PlosOne suggère que l'air sec en hiver (à l'extérieur ou à l'intérieur) altère l'efficacité du mucus nasal qui filtre les corps étrangers comme les virus ou bactéries. Une baisse de 48 % de la contagion d'ici l'été ? Mais, peut-on comparer la grippe et le coronavirus Sars-Cov-2 ? Le mode de transmission (par microgoutellettes lorsqu'on éternue) est en tous cas identique. Or, quand il fait chaud, ces gouttelettes ont tendance à s'évaporer plus rapidement, ce qui limite la transmission. Une étude de l'université chinoise de Beihang publiée le 3 mars 2020 sur le site scientifique SSRN a modélisé les contacts entre les patients des grandes villes chinoises croisés avec des données météorologiques. Elle conclue « qu'une température élevée et une humidité relative élevée réduisent considérablement la transmission de COVID-19 ». Les chercheurs estiment ainsi que le taux de reproduction (indiquant la contagiosité du virus) devrait chuter de 48 % entre mars et juillet. Mais attention : la chaleur ne tue pas le virus et ne l'empêche pas de se propager : elle ralentit simplement sa progression. La chaleur ne va pas tuer le coronavirus En réalité, « nous en savons trop peu à l'heure actuelle sur ce nouveau virus pour prédire les changements qu'il connaîtra en fonction des conditions météorologiques », tempère David Heymann, de la London School of Hygiene and Tropical Medicine, sur le site National Geographic. L'épidémie de Mers-CoV, elle aussi liée à un coronavirus, a démarré en septembre 2012 en Arabie saoudite, lorsque les températures sont élevées et n'a jamais totalement cessé puisque des cas sporadiques sont enregistrés de temps à autre. Et, si les cas de Covid-19 semblent moins nombreux en Afrique, c'est peut-être en raison d'une moins bonne détection du virus ou parce que les personnes âgées, les plus vulnérables, sont en minorité, suggère de son côté Etienne Decroly, directeur de recherche au CNRS, interrogé par LCI. De plus, on constate une intense propagation du virus en Europe en ce moment, alors que justement l'hiver n'a jamais été aussi doux et humide. Bref, mieux vaut ne pas compter sur la seule arrivée des beaux jours pour infléchir la tendance. D'où les mesures de confinement annoncées par les gouvernements qui, on l'espère, dureront le moins longtemps possible. Donald Trump, lui, y croit toujours, même s'il a décalé son pronostic. Lundi 16 mars, le président américain a déclaré que l'épidémie allait durer jusqu'à « juillet, août, ou quelque chose comme ça ». Juste à temps pour sa réélection en novembre ?