Au moment du recouvrement de l'indépendance, les facteurs de développement sont réunis. Bien que les plaies de la guerre soient béantes, force est de reconnaître que l'engouement populaire et les richesses du sous-sol sont autant d'atouts pouvant assurer un bon départ. Hélas, l'équipe dirigeante n'a pas été à la hauteur des enjeux. En effet, au lieu de constituer un facteur de développement, le pouvoir politique, par ses choix irrationnels, a conduit le pays à la dérive. Du coup, toutes les ressources et le capital humain sont marginalisés. Pour reprendre l'expression de Smail Goumeziane, dans « le mal algérien », « pour que le développement réussisse, il ne suffit pas de trouver une source de financement ; il faut aussi que celui-ci s'articule avec l'organisation économique et sociale en place. » À cette organisation économique et sociale, il faudrait aussi ajouter un climat politique apaisé. En effet, si le chef tient son mandat en vue d'exécuter la mission pour laquelle il est désigné, il fera tout pour honorer ses engagements. Un manquement de sa part serait sanctionné aux prochains scrutins. Or, en Algérie, le dirigeant se substitue à la volonté populaire. Et en pensant constamment à la pérennité du système, la question de développement devient, par conséquent, secondaire. Ce qui explique la mauvaise exploitation de la rente pétrolière. Selon Smail Goumeziane, bien que cette rente ait été mobilisée au début des années 1970 pour engager des grands investissements, il n'en reste pas moins que les résultats sont en deçà des attentes. Et pour cause ! Pour l'économiste, « il aurait fallu que la rente soit investie dans les activités générant un profit. Or, entre les mains de l'Etat, elle ne génère que la spéculation. » Pour conclure, il va de soi que l'abandon de la politique agricole –l'Algérie était exportatrice en 1962 –est une erreur très grave. En Europe, à en croire Smail Goumeziane, c'est l'agriculture qui a assuré le financement des grands projets industriels. En plus du secteur agricole, l'Algérie en 1962 avait un atout supplémentaire : la rente pétrolière. Hélas, sa mauvaise utilisation deviendra un frein au développement. En 1989, 75% de cette formidable rente ne sert qu'à payer les services de la dette. En 1994, avec la chute des prix du pétrole, 100% des recettes couvrent les services de la dette. D'où la situation de cessation de paiement. Voila comment un règne qui s'en passe de la concertation et du respect du mandat populaire peut amener son pays à demeurer en perpétuelle crise.