Nous avons assisté ces derniers temps à des appels, des ordres et des contrordres en faveur d'un 5e mandat «el houhda el khamssa» (le 5e mandat) ou plus exactement «el houhda el khamja» (le 5e mandat pourri) des Bouteflika. Or, la nouvelle Constitution limitant les mandats présidentiels à deux, l'option d'un 5e mandat ne peut qu'être illégale, comme l'est l'actuel 4e. Ceci étant pour la forme. Quant au fond, il est évident qu'un 5e mandat ne peut en aucune manière régler les nombreux problèmes de l'Algérie, bien au contraire. Sur le plan social, l'Algérie est en proie à des grèves multiples réprimées à coups de matraque, celle des enseignants, des médecins résidents, des étudiants des hautes écoles et celle des retraités invalides de l'armée. Le 5e mandat serait donc le pire scénario envisageable car ce serait signer la reconduction de la crise actuelle, et même son aggravation. À l'heure du bilan du 4e mandat, pourquoi vouloir un mandat supplémentaire d'un président qui a fait de l'Algérie ce qu'elle est aujourd'hui, c'est-à-dire bonne dernière dans tous les classements, que ce soit sur le plan politique ou au niveau économique qui est catastrophique, avec une planche à billets qui fonctionne à plein régime, l'augmentation des prix et la baisse du pouvoir d'achat. Sans parler des mesures et des contre-mesures d'un gouvernement qui ne sert absolument à rien, par exemple la liste des investisseurs dans le montage de voitures qui a été revue nettement à la hausse – de 5 à 40 ! – montre à quel point l'amateurisme et le bricolage sont inhérents à ce pouvoir. En outre, la suspension des produits importés sanctionne avant tout les petits commerçants qui ne peuvent plus proposer aux Algériens des produits de consommation auxquels ils étaient habitués alors que ces restrictions n'ont aucun impact sur l'économie. Concernant le montage des voitures, rappelons comment Abderrahmane Achaïbou a accusé l'ex-ministre de l'Industrie et des Mines Abdeslam Bouchouareb d'avoir demandé un pot de vin pour débloquer ses projets de montage automobile et le renouvellement de ses agréments de concessionnaire, ce comportement faisant penser au pizzo perçu par la mafia. Ce climat délétère fait partie du bilan des quatre mandats consécutifs d'Abdelaziz Bouteflika et se manifeste par le chaos économique, politique, et social. Il est à noter en outre l'absence des partis politiques qui se réclament de l'opposition lors des manifestations des médecins, des enseignants et des étudiants, ainsi que lors des marches des retraités de l'armée qui ont défendu le pays contre le terrorisme. À ce propos, libérez les coordinateurs Amar el Beri et son camarade qui sont en détention arbitraire ! Libérez le général Hassan, bande de traîtres ! Pour en revenir à «l'opposition», cette classe politique a prouvé qu'elle avait du mal à se présenter comme une alternative en manquant à son devoir de donner un contenu politique à ces grèves et à ces mouvements sociaux, démontrant ainsi l'échec du pouvoir et de son opposition. On peut donc dire que le processus du multipartisme est biaisé, et ce, depuis son avènement, car – et on continue à le répéter – il n'a pas su capter l'intérêt du citoyen algérien et le ramener à la politique. On l'a vu au cours des différentes élections dont les Algériens se sont désintéressés. Le désert politique est immense et les mouvements de grève prennent de l'ampleur. Je soutiendrai toujours les mouvements de grève et de protestation dans la mesure où ils expriment des revendications tout à fait justifiées pour améliorer la vie des travailleurs, ce qui est le cas pour les différentes catégories de protestataires cités plus haut. Il est à remarquer que le syndicat UGTA qui devrait défendre les travailleurs a une nouvelle fois démontré qu'il n'est plus qu'un appareil rentier servant les intérêts du puissant du moment, et préfère traiter avec le pouvoir et cautionner la politique du gouvernement. Le Secrétaire général de l'UGTA, Sidi Saïd, n'est là que pour les séances de «bousboussades» avec ses copains-coquins du gouvernement et du patronat, ce qui le disqualifie définitivement et appelle à statuer sur la fin de ce syndicat qui ne représente plus les travailleurs et qui n'a absolument plus rien à voir avec l'UGTA d'antan, ce qui, d'ailleurs, peut s'appliquer à certaines catégories de partis politiques. On ne peut pas vivre indéfiniment du prestige d'un sigle s'étant distingué dans l'Histoire quand on a perdu tout idéal. L'UGTA de Sidi Saïd n'est pas l'UGTA d'Aïssat Idir qui a libéré le pays et participé à la fondation de l'Etat algérien. Dans cette configuration de luttes corporatistes, ajoutons le phénomène dramatique des harragas, ces jeunes qui fuient le pays dans des bateaux de fortune vers l'Italie ou l'Espagne et qui ont perdu toute illusion. Ces nombreux Algériens qui préfèrent risquer la noyade dans la Méditerranée plutôt que de rester dans leur pays prouvent à quel point ceux qui dirigent l'Algérie ont échoué. L'Histoire montre que chaque cité abandonnée par ses citoyens est condamnée à la disparition. Autre point qui caractérise l'ère Bouteflika : l'assassinat d'un proche parent du général Toufik, le gendre du commandant Azzedine, ce dernier étant impliqué dans des affaires de détournement d'argent et d'escroquerie envers le colonel Boubnider et certaines personnalités, comme j'en ai parlé dans un précédent article quand personne n'osait évoquer cette affaire. D'après les forces de l'ordre, il s'agirait d'un suicide et non d'un assassinat. Néanmoins, cette affaire doit être analysée car elle est emblématique de la fin de règne de Bouteflika et du 4e mandat qui va de dérive en dérive jusqu'à atteindre un véritable stade de «mafiocratie», avec des liquidations physiques et autres crimes, comme on l'a vu avec le défunt Mohamed Tamalt, et cela va probablement continuer. Ce régime d'incapables doit impérativement partir pour céder la place à des compétences et à des forces vives qui sauront gérer le pays et le mettre sur les rails de la modernité. Il est temps d'aborder maintenant la question centrale du soutien de la France au régime de Bouteflika et qui date de l'hospitalisation pour AVC du président algérien au Val-de-Grâce sous la présidence de François Hollande. À cette époque, certaines forces au niveau de l'armée et notamment des services de sécurité ont appelé à appliquer l'article 88, devenu aujourd'hui 102, c'est-à-dire à destituer le président pour incapacité à exercer ses fonctions. François Hollande a outrepassé ses prérogatives en déclarant que Bouteflika continuerait son mandat, manœuvrant pour que le président grabataire effectue un 4e mandat au cours des fameux accords du Val-de-Grâce où se sont réunis le frère cadet du président, Saïd Bouteflika, avec le patron de la DGSE Bernard Bajolet. Le fait de détenir le dossier médical d'Abdelaziz Bouteflika qui s'est fait soigner dans un hôpital militaire français était évidemment une aubaine pour la France qui détenait ainsi un moyen de pression sur le pouvoir algérien. La France a utilisé cet avantage pour obtenir de l'Algérie des contrats à volonté, ce qui lui a permis de sauver de nombreux secteurs jusque là déficitaires. Comme dit l'adage, l'argent n'a pas d'odeur... même quand il s'agit d'un chantage caractérisé. Aujourd'hui, deux éléments sont à étudier. Premièrement, l'annulation de la visite d'Etat d'Emmanuel Macron dont la presse algérienne ne dit pas un mot, et bien évidemment cette annulation n'a rien à voir avec un problème de climatisation ! En effet, le président français qui était venu à Alger en décembre 2017 avait annoncé une visite d'Etat en février 2018. Celle-ci n'a pas eu lieu, par contre, nous avons vu, et c'est le deuxième élément, la visite d'une importante délégation de chefs d'entreprises français conduite par Pierre Gattaz, patron du MEDEF. Celui-ci déclare attendre des signaux pour investir en Algérie, et ces «signaux» ne peuvent être que l'ouverture du capital des entreprises stratégiques que sont Sonelgaz et Sonatrach et pourquoi pas des concessions qui toucheraient le domaine militaire. Le chantage de la France continue donc, sauf que le président français actuel procède différemment de son prédécesseur. Il ne s'implique pas directement mais envoie le MEDEF avec 61 participants et 48 entreprises dont Airbus, Suez, Alstom, Dassault, BNP Paribas, Eutelsat, etc. et des cabinets d'avocats d'affaires qui rencontrent Ali Haddad, un évadé fiscal qui représente ce qu'il y a de plus sordide dans ce qui a été sorti de la fange par le régime actuel, un patron privé algérien qui dépend totalement des commandes publiques, un rentier qui ne vit que grâce à l'argent de l'Etat. Depuis quand le privé algérien produit-il quelque chose ? Et ce voleur de sable, ce vendeur de pastèques, parle au nom de l'Etat algérien devant les patrons français ! Ali Haddad el kharay ose parler des bienfaits (!) du privé auprès de Pierre Gattaz : «le secteur privé sera cette force sur laquelle s'appuiera le Gouvernement algérien pour la réalisation de son plan d'action... et une élévation sensible du revenu du PIB par habitant qui devrait être quadruplé» On ne sait pas qui lui a rédigé ce discours mais il l'a lu dans son français approximatif devant la délégation française. Il a beau nier avoir reçu un prêt de 200 millions de dollars pour construire une usine de sidérurgie à Annaba, il a bénéficié de nombreux prêts pour mener à bien les travaux qu'il avait obtenus en gré à gré et qu'il n'a jamais terminés, certains étant toujours en jachère, mieux, il n'a jamais remboursé ses crédits, ni payé ses impôts. Donc, le MEDEF s'est déplacé en Algérie pour demander encore plus. Qu'y a-t-il à prendre de plus en Algérie, à part les entreprises stratégiques ? Est-ce que pour s'assurer un 5e mandat, le clan des Bouteflika va vendre les bijoux de famille à la France ? Qu'est-ce qui peut encore arrêter le clan des mafieux et ses larbins ? Car ce pouvoir qui s'est constitué sur les oligarques est de nature mafieuse et même assassine, ces mêmes oligarques qui dans les années '90, étaient de connivence avec les groupes terroristes, et donc ont du sang sur les mains. Aujourd'hui, ils rencontrent le MEDEF qui leur demande d'autres gages. Quel est l'enjeu à part le 5e mandat ? Macron ne veut pas se mouiller complètement parce qu'il sait que s'il soutient directement Bouteflika, il le portera dans son bilan pour aller vers un 2e mandat car il a comme projet de se représenter. On se demande dans quel état se trouvera l'Algérie avec un 5e mandat du président grabataire, puisqu'à la fin du 4e, nous sommes dans une situation chaotique à tous points de vue. Que ceux qui profitent du système cessent de dire que tout va bien, ce n'est pas l'avis des Algériens qui se noient dans la Méditerranée. Nous ne voulons pas non plus recevoir des leçons de patriotisme de ceux qui sont gavés de crevettes royales et qui viennent déféquer sur les plateaux de télévision. Il est indispensable d'analyser les éléments qui sont en notre possession, ce que la presse algérienne ne fait pas, comme on l'a vu avec la prétendue interview du président Bouteflika dans l'Oxford Business Group, un obscur journal anglais qui vend ses services au plus offrant, et surtout aux despotes africains. Je passe personnellement mon temps à faire des interviews et je trouve hallucinant que la presse se réfère à l'interview de quelqu'un qui n'a pas parlé à son peuple depuis des années : «Le président évoque», «Le président a dit», etc. C'est d'un grotesque ! Si le président a des choses à dire, pourquoi ne les dit-il pas au peuple algérien ? Voilà encore une autre catastrophe en Algérie, cette absence de contrepouvoir avec une presse engluée dans la servilité volontaire, telle une catin sans honneur qui s'est vendue au pouvoir. Il n'y a aucune gloire à être un journaliste algérien. Personnellement, comme je l'ai déjà dit, je revendique le fait d'être journaliste-citoyen et lanceur d'alerte. Je n'ai rien à voir avec la corporation des journalistes pour laquelle je n'ai aucune considération. L'absence d'un soutien direct de la France au président Bouteflika a créé une panique au sein du régime, et l'état major et la Présidence se livrent à une bataille sans merci révélée par l'affaire Tliba. Baha Eddine Tliba, en brandissant une chitta dorée avec son comité de soutien au 5e mandat, lui qui était l'un des premiers à soutenir le 4e mandat, a mis tout le monde dans la mélasse. Pourquoi Tliba ? Pourquoi l'affaire du comité de soutien est-elle venue de Tliba, un oligarque du FLN ? Pourquoi n'est-elle pas venue d'un oligarque du RND, le vrai parti des oligarques liés à Ouyahia, le véritable chef des oligarques ? Baha Eddine Tliba, réputé être un proche des enfants du chef d'état major le général Gaïd Salah, n'a certainement pas lancé cette initiative de son propre chef et sa démarche comporte certainement plusieurs objectifs, dont celui de sonder les intentions du clan présidentiel, voir s'il a l'intention d'aller à un 5e mandat. Tliba a fait fi des ordres de son chef hiérarchique Ould Abbas qui avait interdit de parler du 5e mandat. Cet épisode nous montre qu'il existe au moins deux clans qui s'affrontent, l'un émettant des ordres aussitôt démentis par les contrordres de l'autre. Il est clair qu'il y a un déficit apparent d'arbitrage qui mène à des situations conflictuelles qui risquent de dégénérer au vu de l'état dans lequel se trouve le pays. C'est un peu tordu, il est vrai, mais c'est la politique algérienne et cela révèle l'absence d'un signal fort de la part de la France. On peut dire que Tliba et ceux qui sont derrière lui ont brusqué le clan présidentiel qui joue le temps en attendant la caution de la France pour le 5e mandat. C'est pour cette raison que l'ordre avait été donné à Ould Abbas de ne pas parler de ce 5e mandat jusqu'à nouvel ordre. Voyant cela, on peut dire que désormais l'Algérie a perdu sa souveraineté et c'est la France qui décide du futur président algérien, alors qu'avant c'était le conclave militaire qui décidait. C'est l'une des conséquences mortelles du règne de Bouteflika et de l'infâme 4e mandat où il est parti se soigner au Val-de-Grâce et aux Invalides. Aujourd'hui, cette caste de mafieux du clan Bouteflika ne doit sa survie qu'au soutien de la France. Si Macron a l'intention d'apporter son soutien aux Bouteflika en renouvelant le bail de Hollande, il doit prendre en compte plusieurs paramètres, dont le plus important est l'effondrement de l'Algérie. À Dieu ne plaise. Le 4e mandat qui résulte du soutien du gouvernement Hollande est une catastrophe, nous en voyons les conséquences tous les jours avec les différents mouvements de protestation, et un 5e mandat verra la situation empirer. Si la France persiste dans son soutien du régime illégitime et antinational des Bouteflika, ces traîtres à la nation, elle sera responsable de tout ce qu'il adviendra, soit un problème d'immigration massive d'Algériens, une instabilité croissante voire un chaos généralisé qui profitera aux différents groupes terroristes. Si par malheur, la France opte une fois de plus pour le court-terme comme elle l'a toujours fait, elle participera à l'instabilité, pire, à l'effondrement de l'Algérie, ce que nous n'espérons pas parce qu'il s'agit de notre patrie, avec toutes les conséquences que cela entraînera pour la région méditerranéenne, pour l'Europe et pour le monde. Personne ne sera gagnant. J'ai personnellement interviewé l'ambassadeur d'Irak et l'exemple de son pays devrait interpeler les consciences de ceux qui jouent avec le destin des peuples. L'armée irakienne a été dissoute et cela a été une catastrophe dont on a vu le résultat : l'émergence de Daech. Si la France profite de l'absence de l'Allemagne de la scène politique et de la Grande-Bretagne repliée sur elle-même, elle portera la responsabilité de ses ingérences auprès de ses partenaires européens sur le plan sécuritaire. La France a déjà déstabilisé la Libye et le résultat est catastrophique. La déstabilisation de l'Algérie ne se fera pas au profit de l'Europe, donc je conseille aux dirigeants français de réfléchir avant de soutenir un pouvoir qui n'a aucune solution à offrir à son propre peuple. Le péché mortel de la caste des Bouteflika, c'est qu'elle ne s'appuie pas sur le peuple algérien mais sur des forces extérieures, c'est-à-dire la France. Celle-ci, comme tout pays impérialiste ne pense qu'à ses intérêts immédiats car le jour où l'Algérie sera en proie à des grands bouleversements, la France retirera ses marrons du feu. Messieurs les dirigeants français, ne vous mêlez pas de choses qui ne vous concernent pas. Occupez-vous de votre propre peuple. En Algérie, bien que vous soyez les premiers à la cibler – faut-il vous rappeler le feuilleton du «qui-tue-qui» ? – une seule institution, l'armée, tient encore debout et se bat contre différents fléaux tels que le trafic de drogue et le terrorisme qui vous menace aussi. Vous pouvez faire comme l'autruche en enfouissant votre tête dans le sable, si l'armée algérienne – à laquelle vous avez occasionné des problèmes notamment à ses services de renseignement – n'était pas là pour combattre le terrorisme, celui-ci déferlerait sur vos pays européens comme une nuée de criquets. Au lieu de protéger vos citoyens qui sont visés par des attentats fomentés par des petits merdeux qui mettent des bombes dans vos métros et qui tuent vos enfants, vous déstabilisez des pays et vous vous étonnez du retour de bâton. Nous demandons à Emmanuel Macron de bien réfléchir aux conséquences de ses choix et de ne pas jouer au jeu auquel s'est livré son prédécesseur avec l'Algérie. L'Algérie a ses intérêts, la France a les siens, l'Europe doit aussi avoir les siens, et le MEDEF aussi. Qui défend les intérêts de l'Algérie ? Certainement pas cette fratrie des Bouteflika et leur cour qui nous ont ramenés là où nous en sommes aujourd'hui. Je n'arrête pas d'attirer l'attention des décideurs où qu'ils se trouvent avec des interviews sur ce qui se passe, entre autres, dans la zone de Sahel. Il faut arrêter de s'ingérer dans les affaires intérieures des pays et laisser les peuples décider eux-mêmes par quel type de pouvoir ils veulent être dirigés. Si l'option de l'effondrement et du dépècement de l'Algérie est envisagé, il faut savoir que cela ne servira les intérêts de personne. Bien au contraire, tout le monde sera perdant. Au moment où l'Algérie connaît des problèmes économiques, la France a pondu un décret exécutif le 22 novembre 2017 permettant aux médecins algériens de venir s'installer en France. Cela s'appelle du débauchage de cerveaux tout en aidant leurs zouaves du régime à solutionner le problème de la grève des médecins d'une manière détournée. La France n'a pas à s'ingérer dans des affaires internes algériennes pour casser un mouvement de grève. En même temps, comme par hasard, et sur fond d'un révisionnisme qui s'est installé en Algérie, le Conseil constitutionnel français a décidé de dédommager les victimes non françaises, y compris algériennes, de la guerre d'Algérie. Pourquoi maintenant ? La France veut-elle porter atteinte à notre patriotisme, dénigrer l'ALN et pervertir la mémoire de nos martyrs ? Sachez, Messieurs les dirigeants Français, que le sang de nos martyrs n'a pas de prix et que notre histoire n'est pas à vendre. Vous avez perdu la guerre et l'Algérie n'est pas un département français. Dans les deux cas, aucune voix officielle algérienne n'a protesté contre ces ingérences françaises. Les dirigeants français doivent arrêter de nous traiter en bougnoules. L'Algérien d'aujourd'hui est ouvert au monde, et pas seulement à la France. Les vrais bougnoules, ce sont ceux qui ont la maladie de la France, tels les dirigeants algériens. Une France qui se comporte de cette manière démontre qu'elle n'est pas guérie de ses démons colonialistes. Bien qu'ils aient des problèmes avec notamment la montée de l'extrême-droite qui bat des records de popularité et avec les Dupont-Lajoie qui se multiplient dans l'Hexagone, les dirigeants français savent qu'ils traitent avec un pouvoir faible et illégitime d'où leur ingérence permanente dans les affaires algériennes. Les voilà qui veulent nous piquer nos médecins, qui ouvrent la boîte à Pandore de l'Histoire assassine et meurtrière de leur colonisation de notre pays en faisant abstraction des enfumades, des essais nucléaires, de la torture et autres crimes contre l'humanité. Monsieur Fabius, le président du Conseil constitutionnel, se donne bonne conscience avec cette mesure qui ne pourra jamais dédommager le peuple algérien pour tout ce dont il a souffert pendant la longue nuit coloniale. Gardez cet argent et distribuez-le au peuple français qui se bat pour des pots de Nutella et des couches-culottes dans les hyper-marchés. Le peuple algérien a manifesté son divorce avec le pouvoir politique en refusant de voter aux différentes élections consécutives, l'Assemblée qui siège au Parlement n'a pas atteint 15% du corps électoral. Le peuple fait de la politique à sa manière et a tout à fait le droit d'être exigeant. Il ne se retrouve pas dans l'offre politique actuelle et le fait savoir. Nous aurions espéré voir émerger une force politique et une figure charismatique, mais on ne voit rien d'autre que des gens qui fonctionnent avec des communiqués. Chacun doit jouer son rôle, le mien étant d'informer et d'attirer l'attention sur la gravité de la situation dans laquelle se trouve notre pays. Le politicien, lui, doit aller vers le peuple, faire des meetings dans toutes les villes, et pas seulement lors des campagnes électorales, être impliqué dans les combats du peuple qui se bat chaque jour pour ses droits, mais non, les partis «d'opposition» ne se déplacent pas, et pour certains, ils n'ont même pas de site internet. Ils sont à l'image du pouvoir. Tout le monde raffole des plateaux de télévision, mais ce n'est pas comme ça que l'on change un pays. Il faut vraiment être dans la proposition, dans l'engagement, par l'action en allant à la rencontre du peuple et par un programme élaboré à lui proposer. Comme cela n'existe pas en Algérie, le peuple algérien continue à boycotter tout le monde : pouvoir et éventuels «opposants». Ce constat amer étant fait, la balle est désormais entre les mains des forces vives de la nation et surtout dans la seule force organisée dans le pays, c'est-à-dire l'armée, qui doit peser de tout son poids pour aller vers une période de transition, et si cela n'est pas possible avec le temps qui joue contre les patriotes, au moins faut-il opter pour un minimum vital, à savoir la neutralisation du clan de la fratrie Bouteflika et des oligarques qui les entourent. Ce sera le début d'un changement qui prendra forme après leur départ. Ceux qui disent que le problème n'est pas seulement Bouteflika mais tout le système se trompent sur le plan tactique, et leur discours participe à l'enfumage et à brouiller les cartes. Pour changer un système, il faut peser plus que lui sur le terrain, ce qui n'est pas le cas de ceux qui passent leur temps à évoquer la chute d'un système. Les tenants de ce discours, à moins qu'ils nous prouvent qu'ils pèsent dix fois plus que le pouvoir en place au niveau populaire et, dans cette configuration, qu'ils nous disent de combien de divisions ils disposent, ne nous ramènent nulle part. Le pragmatisme s'impose et le sens des priorités aussi. Aujourd'hui, l'Algérie souffre du règne de la fratrie Bouteflika et des forces extra-institutionnelles qui les entourent et qui se recrutent chez les oligarques et l'argent sale, ils sont une menace d'effondrement du pays. Neutraliser Bouteflika et sa fratrie, cela veut dire neutraliser les oligarques qui les entourent et placer l'Algérie dans une optique de règlement du problème. Après avoir débarrassé le pays de ces forces nuisibles, on pourra aller vers d'autres étapes qualitatives, à savoir un Etat de droit, une Constituante, etc. Pour le moment, il faut abattre le régime des Bouteflika et pour cela, il ne faut pas lésiner ni sur les mots ni sur les moyens, nous sommes dans une ère éminemment révolutionnaire qui est demandeuse d'un encadrement révolutionnaire et certainement pas de partis quémandant leur agrément à un pouvoir illégitime, ou demandant des autorisations pour manifester, etc. Quand on est dans un processus anormal, on ne peut pas appliquer des mesures normales. La situation que vit l'Algérie n'est pas normale et il lui faut des mesures adéquates. Réparer les dégâts qu'a causés le règne de Bouteflika est un chantier immense qui demandera beaucoup d'efforts et surtout des hommes capables, intègres, compétents. Chaque situation concrète exige les hommes qu'il faut et l'Algérie ne manque pas de fils dignes qui ne demandent qu'à la servir et à la mettre sur la bonne route. Cela demande un effort collectif loin du culte de la personnalité auquel se livrent les pantins du régime actuel qui vénèrent un portrait ! L'Algérie nouvelle se fera en renouvelant le système politique, pouvoir et opposition en même temps. Le renouveau doit être total, c'est un objectif à atteindre pour espérer avoir une vie politique. Le changement radical nécessite une thérapie de choc et nous mettons l'armée devant sa responsabilité historique parce qu'elle a installé Abdelaziz Bouteflika comme président en 1999, et qu'elle l'a soutenu. Chacun doit assumer ses responsabilités et personne n'arrêtera la roue de l'Histoire de l'Algérie qui se fera sans les usurpateurs de la fratrie Bouteflika et de ceux qui les entourent. Mohsen Abdelmoumen