La crise politique en Egypte persiste toujours malgré l'annulation du décret controversé par le président Mohamed Morsi, qui a maintenu le référendum constitutionnel, une décision loin de calmer la rue égyptienne, opposants et partisans du président appelant à de nouvelles manifestations mardi. Après plusieurs jours de manifestations marquées par des violences et des heurts entre les pro-Morsi et les opposants, faisant 13 morts et plus d'un millier de blessés, notamment au Caire, Mohamed Morsi a finalement lâché du leste en annonçant samedi dernier l'annulation du décret renforçant ses pouvoirs, à l'origine de la plus grave crise que connaît l'Egypte depuis la chute de l'ex-régime de Hosni Moubarak en février 2011. M. Morsi a en revanche confirmé la date du 15 décembre pour la tenue d'un référendum sur un projet controversé de Constitution, car la modifier serait légalement impossible, estiment des responsables égyptiens. Il s'agit du premier revers pour le président, issu du mouvement des Frères musulmans, qui a abdiqué devant la pression de la rue égyptienne de plus en plus exigeante, étant désormais consciente du poids qu'elle peut exercer sur la scène politique. Toutefois, certains opposants et experts estiment que ce volte-face du président n'est qu'une tactique +lâcher les accessoires pour mieux préserver l'essentiel+ c'est à dire la Constitution, dont le projet a été rédigé et adopté par l'Assemblée constituante à dominante islamiste. L'opposition dénonce un texte restrictif et répressif qui "ne respecte pas la diversité de l'Egypte sur le plan confessionnel et culturel", appelant à la rédaction d'une nouvelle Constitution. Elle accuse le texte d'"ouvrir la voie à une islamisation accrue" de la législation et de manquer de garanties pour les libertés, notamment d'expression et de religion. La principale coalition de l'opposition égyptienne, le Front du salut national (FSN), dirigée notamment par Mohamed el Baradei, a appelé à "manifester dans la capitale et dans les provinces mardi en signe de refus de la décision du président contraire à ses revendications légitimes". "Nous ne reconnaissons pas le projet de Constitution car il ne représente pas le peuple égyptien", a ensuite indiqué le porte-parole de la coalition Sameh Achour. Face à l'opposition, les partisans du président Morsi ont également appelé à des manifestations mardi pour défendre la nouvelle Constitution. L'alliance des forces islamistes veut organiser une marche sous le slogan +oui à la légitimité et oui au consensus national+", a affirmé le porte-parole des Frères musulmans, Mahmoud Ghozlan. Ces nouveaux appels à des manifestations suscitent la crainte de voir resurgir de nouvelles violences qui risquent d'aggraver d'avantage la situation socio-économique de l'Egypte. Le chef de l'Etat égyptien a chargé l'armée d'assurer la sécurité dans le pays jusqu'à l'annonce du résultat du référendum, selon un décret prenant effet lundi. Les militaires auront également le pouvoir d'arrêter des civils, d'après le texte. Cette ultime décision prise par Morsi reflète le rôle primordial que joue l'armée en Egypte comme la garante de la stabilité du pays. Tenue à l'écart des disputes politiques, l'institution militaire s'est fait entendre pour la première fois, appelant les parties concernées à s'engager dans le dialogue national qui, pour elle, est la meilleure et la seule voie pour parvenir à un accord. "Le désaccord n'est dans l'intérêt d'aucune partie... La nation toute entière va payer le prix d'un désaccord", avait mis en garde le porte-parole militaire Ahmed Ali, soulignant que le désaccord entre concitoyens est "compréhensible" mais que le recours à la violence est "inacceptable". Autre marqueur de la tension dans le pays, les difficultés économiques dont souffre l'Egypte en raison notamment de l'instabilité politique. Mohamed Morsi a décidé dans la nuit de renoncer aux hausses de taxes sur des produits de base et de grande consommation quelques heures après les avoir annoncées.