Parmi la foule de projets structurants inscrits ces dernières années au profit de la wilaya de Constantine, dans le cadre des différents programmes de développement, le viaduc Trans-Rhumel tient sans conteste la vedette. Comment pourrait-il en être autrement dans une cité que l'on désigne, depuis toujours, sous le nom de "ville des ponts" en raison des 7 ouvrages qui relient depuis de nombreuses décennies les berges de l'oued Rhumel en faisant le "pied de nez" à l'imposant rocher sur lequel l'agglomération est bâtie. Le Trans-Rhumel sera le plus imposant de ces ouvrages d'art et sans doute le plus beau. Ce n'est pas le moindre des exploits lorsqu'on sait que de tous temps, les cartes postales dédiées à Constantine ne manquent jamais de faire la part belle au pont suspendu de Sidi-M'cid et à celui, tout en pierres, surplombant le mausolée de Sidi Rached. Pourtant, il y a un peu plus de quatre ans, lorsque l'idée de faire naître un 8ème pont à Constantine avait commencé à germer pour être ensuite évoquée par les responsables locaux, il ne s'est pas trouvé grand monde pour y croire. L'air plutôt dubitatif du commun des constantinois s'expliquait surtout, à cette époque, par le caractère "colossal" d'un viaduc capable de faire la jonction sur une distance de plus de 1.100 m entre la place de l'ONU, au cœur de la cité, et l'avenue de Batna, à une encablure du plateau du Mansourah après avoir enjambé le lit du Rhumel qui se trouve plus de 130 plus bas. Ce pont géant aux lignes futuristes bouleversera, quoi qu'il en soit, la configuration urbanistique de cette ville qui cherche coûte que coûte à recouvrer son aura d'autrefois et à récupérer son statut de capitale de l'Est algérien. Le viaduc dont la silhouette commence à émerger dans le paysage constantinois rejoindra le chemin forestier et les hauteurs de Mansourah via un tronçon routier de plus de trois km, ce qui va sans doute soulager une cité qui étouffe sous le poids d'une circulation devenue insupportable. De conception brésilienne, le viaduc Trans-Rhumel en réalisation par le groupe Andrade-Gutierrez sera "accroché" à une route dont les travaux de construction tournent autour d'un taux de 30% de façon à desservir toute la partie sud de la ville dont l'immense cité de Sakiet Sidi-Youcef et ses prolongements vers Djebel Ouahch, Ziadia, Daksi et Oued El Had. Des techniques de pointe ont été utilisées pour maîtriser les glissements de terrain constatés sur un sol "valsant" d'un mouvement turbulent, faisant que les 8 pylônes sur lesquels le tablier du Trans-Rhumel sera posé sont aujourd'hui solidement ancrés. D'une largeur de plus de 27 mètres, cette infrastructure de base qui viendra témoigner du degré de développement atteint par l'Algérie après 50 ans d'indépendance, est réalisée pour deux voies avec, aux extrémités, deux trottoirs qui permettront aux piétons de s'y aventurer sans le moindre risque. Appartenant à la catégorie "pont à haubans", le Trans-Rhumel est présenté par ses concepteurs comme un ouvrage "transparent", ce qui ne veut pas dire qu'il sera invisible (loin s'en faudrait) mais qui signifie tout simplement que le viaduc n'aura pas d'incidence négative sur le panorama de la cité. Dans quelques mois, peut-être au début de l'été, les deux pylônes porteurs (dits aussi mâts, d'une hauteur de 40 m depuis la chaussée) sur lesquels seront fixés les haubans (câbles en acier destiné à soutenir le tablier et à répartir les efforts), seront visibles. Fuselés au maximum, ils n'altéreront en rien les repères de la ville. L'on dit qu'à Constantine, les relations entre les hommes ont eu toujours besoin, pour se maintenir d'être consolidées. En mars 2014, lorsque cet ouvrage sera inauguré, ces relations devraient, en suivant cette logique, se consolider davantage entre les constantinois qui avaient fait montre d'une certaine réticence à l'idée d'un 8ème pont. Cette réticence, née de réflexions rétrogrades véhiculées par des partisans du statut-quo, a aujourd'hui laissé place, chez les constantinois, à de la fierté. Une fierté nourrie par la perspective de voir leurs enfants grandir dans une ville où trônera ce qui sera sans doute l'un des plus beaux ouvrages d'art dans le monde.