L'intervention militaire au Mali dans le cadre de la résolution 2085 du Conseil de sécurité de l'ONU risque d'aggraver la crise dans ce pays, a averti lundi à Alger un panel d'experts, en soulignant la nécessité de s'engager dans l'action diplomatique pour résoudre le conflit malien. Lors d'une conférence sur l'application de la résolution onusienne sur le Mali adoptée le 20 décembre dernier, organisée au Forum d'El Moudjahid, Mhand Barkouk, directeur du Centre des études stratégiques d'Alger, a expliqué que cette résolution porte essentiellement sur quatre volets : "la reconstruction politique et le rétablissement des relations civil/militaire, la reconstruction des capacités militaires maliennes, les dispositions d'engagement au Mali, et l'expertise". M. Barkouk a toutefois estimé que sur le terrain "les conditions et les échéances fixées par le Conseil de sécurité ne seraient jamais respectées", ajoutant que les 3.300 soldats de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) qui doivent être déployés dans le nord du Mali sous mandat de l'ONU "n'ont pas l'expérience nécessaire". Une intervention dans ce pays du Sahel conduirait à "la sanctuarisation du terrorisme et sa prolifération vers les autres pays de la région", a-t-il averti. Pour cet expert, il existe trois "acteurs", "sources de menaces" : les revendications identitaires de groupes tels le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) et Ansar Dine, le terrorisme notamment d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et le trafic transfrontalier de drogue et d'armes. Il a souligné la nécessité de créer les conditions du dialogue au Mali incluant le MNLA et Ansr Dine, déplorant cependant que ce dialogue ne soit pas "encore prioritaire" dans le règlement de la crise. Khelfan Karim, docteur en Droit et Sciences politiques à l'Université de Tizi Ouzou a, pour sa part, évoqué les conséquences de l'intervention militaire au Mali notamment sur le plan humanitaire. Il a insisté sur le fait que toute action militaire internationale au Mali doit se faire "dans le cadre du respect du droit international et des droits de l'Homme". De son côté, Bachir Mdjahed, expert en questions sécuritaires, a soulevé la question de "la légitimité" de l'intervention militaire alors que le Mali vit dans la "confusion" notamment sur le plan politique. Nouredine Amrani, Officier à la retraite, a abondé dans le même sens, estimant que la résolution de l'ONU autorisant l'intervention militaire a "passé outre l'action diplomatique". Le 20 décembre dernier, le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté une résolution approuvant le déploiement d'une force armée internationale au Mali pour déloger les groupes armés qui en occupent le Nord. Le texte porte sur une approche globale pour résoudre le conflit, en prenant notamment en compte les deux aspects militaire et politique. Aucun calendrier précis n'a toutefois été décidé pour ce déploiement, programmé par étapes selon les Nations unies, qui ont aussi appelé au dialogue avec les groupes armés rejetant le terrorisme et la partition du pays.