La nationalisation des hydrocarbures en 1971 a sonné le ''tocsin'' pour les derniers restes de la colonisation française en Algérie, et a ouvert la voie au recouvrement définitif de sa souveraineté sur l'ensemble des richesses de son sous-sol. L'Algérie, qui étrennait alors fièrement son indépendance et s'intégrait résolument au sein des grands ensembles internationaux, à un moment où commençait à se dessiner un nouvel ordre économique mondial auquel elle a activement participé, se devait dés lors de reprendre sa souveraineté sur son patrimoine minier et ses richesses naturelles. Le retour de la jouissance des hydrocarbures dans le giron du jeune Etat indépendant était, en fait, une des priorités inscrites dès 1963 à l'agenda des priorités politiques, économiques et diplomatiques de l'Algérie. "Le recouvrement de la souveraineté nationale sur le secteur des hydrocarbures a ouvert de nouvelles opportunités pour le développement de l'économie nationale", commente le ministre de l'énergie et des mines Youcef Yousfi, au cours du forum du quotidien arabophone Ech-chaab, quelques jours avant le 42e anniversaire de cet évènement historique. Depuis cette date, qui a placé l'Algérie au-devant de la scène politique internationale alors que le monde enregistrait d'importants changements systémiques, les exportations algériennes en pétrole et en gaz ont généré plus de 800 milliards de dollars de revenus. Ces revenus, selon M. Yousfi, ont permis de financer le développement économique et social du pays. Cette décision historique de nationaliser les hydrocarbures, prise il y a maintenant 42 ans a permis, au-delà du recouvrement de la souveraineté nationale sur ce secteur stratégique, de placer depuis cette date le groupe Sonatrach parmi les leaders mondiaux du secteur. In fine, la nationalisation des hydrocarbures a été suivie d'une ordonnance signée le 11 avril 1971, qui a promulgué la loi fondamentale sur les hydrocarbures, définissant dès lors le cadre dans lequel devait s'exercer dorénavant l'activité des sociétés étrangères en matière de recherche et d'exploitation pétrolières. Cette décision, évidemment, a eu de nombreuses ondes de choc dans les milieux politiques et financiers occidentaux, mais également dans les pays du sud, qui y ont vu la possibilité, pour eux également, de négocier la nationalisation de leurs richesses minières. Bien plus, le coup de maître réalisé par les responsables de cette époque, à leur tête le président défunt Houari Boumediene, est que tous les intérêts miniers portant sur les gisements de gaz naturel ainsi que tous les intérêts détenus dans les sociétés de transport d'hydrocarbures ont été également nationalisés le 24 février 1971. Les nouvelles conditions régissant les activités des compagnies pétrolières françaises en Algérie, après la nationalisation des hydrocarbures, ont donné lieu à deux accords, l'un signé le 30 juin 1971 par la Sonatrach avec CFPA, l'autre le 13 décembre de la même année entre la Sonatrach et ELF-ERAP. Un bon choix, irréversible Les années 1970 coïncidaient en fait avec l'apparition de grands bouleversements politiques et économiques : la guerre du Vietnam devient un fardeau social pour les républicains, une crise politique profonde ronge les Etats-Unis, les pays du sud s'affranchissent inexorablement de la tutelle des deux blocs (Est et Ouest) avec les Non-Alignés, l'Europe glisse doucement vers le ''communautarisme'', et dans les pays arabes d'où transitent plus de 40% du pétrole, la guerre avec Israël devient une question de mois. Tout ces facteurs géopolitiques font que le pétrole commence à devenir un enjeu stratégique majeur pour les pays exportateurs. Dès lors, il est clair que l'Algérie a fait le bon choix en nationalisant ses hydrocarbures. Les experts sont en fait unanimes, du moins ceux favorables pour l'avènement d'un nouvel ordre économique mondial qui tienne compte des intérêts des pays du Tiers-Monde, à reconnaître le geste historique des autorités algériennes. Nicolas Sarkis, expert pétrolier incontournable de ces trente dernières années, estime que l'Algérie est pionnière parmi les pays exportateurs de pétrole. ''Si on devait résumer les principales caractéristiques de la politique pétrolière de l'Algérie depuis son indépendance, on pourrait dire sans hésitation que parmi les pays exportateurs, l'Algérie a le grand mérite d'avoir été un pionnier à plus d'un égard'', a-t-il estimé dans un entretien à l'APS réalisé en 2008. ''Un pionnier tout d'abord dans l'amorce, dès février 1971, soit neuf ans seulement après l'indépendance, du processus de nationalisation de son industrie pétrolière et gazière'', a-t-il précisé. Pour autant, la décision de l'Algérie de reprendre ses richesses naturelles a permis de ''briser le traumatisme créé par le demi-échec de l'expérience iranienne dans les années 1950''. L'autre grande victoire de l'Algérie, à cette époque, a été de servir de modèle pour les autres pays producteurs, qui ont pris l'exemple algérien pour nationaliser eux également leurs richesses minières. En fait, l'Algérie a tout simplement ouvert ''la voie aux nationalisations en Libye, en Irak, au Venezuela et ailleurs'' dans le monde, rappelle Sarkis. La nationalisation des hydrocarbures, le 24 février 1971 est suivie la même année, en novembre, de la Révolution agraire et la Gestion socialiste des entreprises. (Par Mahdi Boukhalfa)