L'enseignement supérieur a constitué un axe intense de la coopération algéro-française post-coloniale, a affirmé, dimanche à Oran, le sociologue français Jean-Robert Henry, lors d'une rencontre consacrée à la présentation de son dernier livre intitulé "Le temps de la coopération". "La coopération fut intense dans l'enseignement supérieur, lieu par excellence où se négociaient des éléments de rupture et d'héritage avec le passé", a noté l'auteur dans cet ouvrage présenté au Centre d'études maghrébines en Algérie (CEMA), basé à Oran. Une vingtaine de sociologues des deux rives de la Méditerranée ont contribué à la rédaction de cet ouvrage co-dirigé par Jean-Robert Henry qui est directeur de recherche émérite au Centre national de la recherche scientifique (CNRS, France) et à l'Institut de recherche et d'études sur le monde arabe et musulman (IREMAM, France). "Les contributions à la publication s'attachent notamment à analyser la dimension collective de l'expérience de coopération et ses effets sur la reformulation des savoirs en sciences sociales", a indiqué le chercheur en faisant savoir que "les auteurs ont été pour la plupart acteurs de cette période, ce qui donne à leurs témoignages une tonalité particulière". Le conférencier a axé son intervention sur la genèse de ce travail collectif, faisant valoir qu'il est le fruit d'un programme de recherche sur les sciences sociales au Maghreb, suggéré lors d'un symposium thématique organisé en 2004 à Oran par le Centre national algérien de recherche en anthropologie sociale et culturelle (CRASC). "L'idée avait été réitérée en décembre 2011 à Oran lors du colloque organisé en hommage à Abdelkader Djeghloul, sociologue algérien de talent, qui a eu un rôle considérable dans la structuration des recherches en sciences sociales en Algérie au début des années 1970", a-t-il expliqué. Il a en outre observé que "le moment de la coopération a été une expérience existentielle forte qui a touché une fraction importante, de l'ordre d'environ 10 % des jeunes diplômés universitaires français". "Pour eux-a-t-il ajouté-la coopération était à la fois le tout début d'une vie professionnelle, l'âge des maturations intellectuelles et affectives et la découverte d'un autre monde, à la fois proche et exotique". Le conférencier a par ailleurs souligné que "pour les plus âgés, c'était d'abord la poursuite d'un engagement politique en faveur de la décolonisation". "Un engagement qui avait forgé des personnalités croyant à la possibilité de dépasser le rapport colonial pour aider à reconstruire les sociétés libérées et établir un nouveau rapport entre Sud et Nord", dira-t-il. Né en 1943, Jean-Robert Henry a à son actif plusieurs publications autour des relations algéro-françaises et des questions internationales en rapport avec les pays du Sud. Il fit son entrée à l'Université d'Alger en 1963 pour y étudier et enseigner pendant une dizaine d'années.