Le chef d'état-major libyen, Youssef Al-Mangouch, a démissionné au lendemain des violences meurtrières à Benghazi (est) liées à la présence des milices armées qui imposent leur loi à travers le pays deux ans après la chute de l'ancien régime, alors que le gouvernement peine à structurer l'armée. Le chef d'état-major a présenté sa démission qui a été acceptée par le Congrès national général (CGN). Cette assemblée, la plus haute autorité politique du pays, se préparait déjà à voter la suspension de M. Mangouch, selon Abdallah Al-Gmati, du CGN. La démission de Mangouch a été validée par un vote du CGN, a précisé un autre membre de l'assemblée. Le CGN a aussi décidé de donner au gouvernement deux semaines pour mettre en place un plan visant à dissoudre les groupes armés et à intégrer leurs membres de manière individuelle au sein des forces régulières, selon M. al-Gmati. Trois jours de deuil national suite aux violences de Benghazi Le CGN a décrété trois jours de deuil national à la mémoire des victimes des violences de samedi à Benghazi, ayant engendré la mort de 31 personnes blessant une centaine d'autres, selon un bilan officiel. Des dizaines de manifestants "anti-milices", dont certains armés, ont tenté de déloger la brigade d'ex-rebelles "Bouclier de Libye" de sa caserne, provoquant un affrontement entre les deux groupes qui ont fait usage d'armes de différents calibres. La brigade "Bouclier de Libye", formée d'anciens rebelles ayant combattu les forces de l'ancien régime en 2011, relève formellement du ministère de la Défense qui a régulièrement recours à ces ex-rebelles pour sécuriser les frontières ou s'interposer dans des conflits tribaux. En octobre, des habitants de Benghazi s'étaient déjà rebellés contre les milices, délogeant certaines d'entre elles de leurs bases. Le Premier ministre libyen Ali Zeidan est intervenu à la télévision nationale pour annoncer que "Bouclier de Libye" avait quitté sa caserne et que l'armée régulière avait pris possession des lieux et des armes lourdes qui s'y trouvaient. Il a annoncé l'ouverture d'une enquête pour déterminer les responsabilités, tout en appelant toutes les parties à la retenue. Efforts internationaux pour stabiliser le pays Dans le cadre des efforts internationaux pour sabiliser la Libye, le secrétaire général de l'OTAN, Anders Fogh Rasmussen, avait annoncé que l'OTAN pourrait assurer la formation des forces de sécurité libyennes hors de la Libye. "Il ne s'agit pas de déployer des troupes (de l'OTAN) en Libye. Si nous nous occupons de l'entraînement et de la formation des forces de la sécurité, nous pouvons le faire hors du pays", avait-il déclaré avant une réunion des ministres de la Défense des 28 pays membres de l'organisation, à Bruxelles. Les Etats-Unis et la France se sont déjà prononcés en faveur de l'octroi d'une assistance à la Libye dans la formation de ses forces de la sécurité. L'Union européenne (UE) a récemment lancé une mission civile dont l'objectif est de former du personnel chargé du contrôle des frontières terrestres, maritimes et aériennes, et de renforcer les services correspondants à Tripoli. Le pays instable face à la présence des groupes armés Le nouveau pouvoir en Libye n'a pas réussi à désarmer et à dissoudre les groupes d'ex-rebelles qui font la loi dans le pays, et tente de légitimer certains d'entre eux malgré l'opposition d'une grande partie de la population. Deux ans après la chute de l'ancien régime de Maammar El Gueddafi, la Libye est face à l'une de ses pires crises politiques. Le nouveau pouvoir éprouve les plus grandes difficultés à imposer son autorité dans un pays où d'importantes quantités d'armes sont en circulation et où les milices armées, issues de la révolution, font la loi, une situation qui inquiète le gouvernement, la population et la communauté internationale. Le 7 mai dernier, le ministre libyen de la Défense, Mohamed Al-Barghathi, avait démissionné avant de revenir sur sa décision dans un contexte de crise, dénonçant le siège imposé par des groupes armés à deux ministères clés. Du 28 avril dernier au 8 mai, des miliciens armés ont imposé un siège aux ministères des Affaires étrangères et de la Justice, et le parlement a adopté le 5 mai une loi controversée sur l'exclusion politique des anciens collaborateurs du régime déchu d'El Gueddafi, leur interdisant de travailler dans la Fonction publique et de la politique pour une dizaine d'années. Ce vote, est intervenu dans la foulée du siège imposé aux ministères par les miliciens armés, qui vont à l'encontre des aspirations du nouveau pouvoir à assoir son autorité sur les institutions de l'Etat et sur l'ensemble du territoire libyen.