Le comité exécutif du Parti de l'Istiqlal (PI) a annoncé lundi soir la mise en exécution de la décision de son conseil national de se retirer du gouvernement marocain de coalition dirigé par le Parti justice et développement (PJD, islamiste), précisant que ses ministres allaient présenter une démission collective au chef de l'exécutif, Abdelilah Benkirane. Le Comité exécutif de cette formation conservatrice a estimé, dans un communiqué "avoir donné au chef de gouvernement le temps suffisant pour remédier au retrait du PI de sa majorité gouvernementale", ajoutant qu'il a aussi appelé les deux groupes du PI au parlement à une prochaine réunion avec la direction du parti afin de "mettre au point la méthodologie de travail et de coordination qu'exige l'opposition". Pour rappel, l'Istiqlal avait annoncé le 11 mai dernier son retrait de la coalition gouvernementale avant de surseoir le lendemain à cette décision, en attendant un arbitrage du roi du Maroc dans cette crise politique intervenue près d'une année et demi après la formation de l'exécutif en janvier 2012. Le report de ce retrait avait été décidé suite à l'appel téléphonique du roi Mohammed VI au secrétaire général du parti, Hamid Chabat l'exhortant à "maintenir les ministres du PI au sein de l'actuel gouvernement dans le souci de préserver le fonctionnement normal du gouvernement", soulignant qu'un mémorandum allait être soumis au souverain par le chef de PI. Le mémorandum en question avait été remis au roi le 26 juin dernier et le comité exécutif a entériné la décision de retrait du gouvernement trois jours après, relève-t-on. Dans ce document de dix pages, le PI a souligné qu'il n'a pris cette décision qu'après avoir procédé à l'évaluation de la gestion des affaires par le gouvernement. L'Istiqlal détient six ministères au sein du gouvernement composé de 31 départements ministériels dont ceux de l'Economie et des Finances, de l'Education et celui délégué auprès du ministre des Affaires étrangères et de la coopération. Deuxième force politique du Maroc, l'Istiqlal est dirigé, depuis septembre 2012, par Hamid Chabat en remplacement de l'ancien chef du gouvernement Abbas El Fassi. Chabat est également secrétaire général de l'Union générale des travailleurs au Maroc (UGTM), maire de Fès et député. Depuis son arrivée à la tête de ce parti, il a formulé, à plusieurs occasions, des griefs contre l'exécutif notamment en ce qui concerne le redressement de l'économie au moment où le Maroc traverse une grave crise dans divers secteurs. Il reproche également au chef du gouvernement l'absence de concertation avec son parti, voire le monopole des décisions du gouvernement, plaidant pour la redynamisation de l'action de l'exécutif par le biais d'un remaniement ministériel qui permettra de redistribuer les portefeuilles ministériels sur la base des résultats des élections législatives de 2011. Le PJD vainqueur des législatives anticipées du 25 novembre 2011 avec 107 sièges sur 395 députés de la chambre des représentants, dirige une coalition gouvernementale hétéroclite comprenant des membres du PI (60 députés), du Mouvement populaire (MP, libéral 32 députés) et le Parti du progrès et du socialisme (PPS, ex-communiste, 18 sièges). C'est la première fois que l'exécutif est dirigé au Maroc par un parti islamiste longtemps dans l'opposition. Avec environ 33 millions d'habitants, le Maroc est confronté à une crise économique marquée par une aggravation du déficit budgétaire (17,5 milliards de dirhams) à fin mars 2013 et une hausse de la dette extérieure brute de 15,70% au 1er trimestre de l'année en cours (296,72 Mds de DH contre 256,44 Mds de DH durant la même période de 2012), entrainant l'arrêt de l'exécution de 15 Mds de DH d'investissements. A fin 2012, le taux du chômage est passé à 9,4 % de la population active. En février dernier, l'agence d'évaluation financière Moody's, la deuxième plus importante agence de rating du monde, avait dégradé la note souveraine du Maroc passant de "stable" à "négative" en raison de déficit public record enregistré par le royaume atteignant 7,1% du Produit intérieur brut (PIB) en 2012, contre 6,2% une année auparavant.