Traditionnellement qualifiées de "privilégiées", les relations algéro-tunisiennes sont promises à une nouvelle dynamique à l'aune de la nouvelle ère de la Tunisie post-révolution. C'est dans le cadre de cette nouvelle dynamique que s'inscrit la visite du chef du gouvernement tunisien, Mehdi Jomaa, fraîchement désigné à la tête de l'exécutif de son pays, en Algérie, samedi et dimanche. Le président tunisien, Mohamed Moncef Marzouki, a tenu à saluer "le rôle de l'Algérie s£ur dans le soutien du processus de transition démocratique en Tunisie", et à exprimer pour cela, sa "gratitude" tout en notant que ce soutien s'inscrit dans le cadre des "relations de coopération privilégiées qui lient nos deux pays et nos deux peuples frères et des liens de fraternité et de solidarité que nous puisons des relations historiques solides". Tout en saluant "les pas importants" franchis jusque-là entre l'Algérie et la Tunisie, le président Marzouki évoque une "ère nouvelle" aux "relations historiques" qui unissent les deux pays. La visite aujourd'hui à Alger du nouveau chef du gouvernement tunisien, Mehdi Jomaa, la première du genre, s'inscrit précisément dans cette optique et à un moment où la Tunisie vit une étape charnière de sa vie politique avec l'adoption du nouveau texte fondamental du pays. Tout au long des péripéties qu'a connues la Tunisie depuis la Révolution du 14 janvier 2011, l'Algérie n'a eu de cesse d'appuyer les efforts de son voisin de l'Est en perspective d'une transition "démocratique" réussie. Lors de sa visite en décembre 2013 à Paris pour prendre part au Sommet de l'Elysée sur l'Afrique, le Premier ministre, Adelmalek Sellal, avait indiqué que "l'Algérie était ouverte à toute solution en Tunisie", tout en refusant de "s'ingérer dans les affaires internes à la Tunisie". Une position maintes fois réitérée par les autorités algériennes et qui a été "appréciée" par leurs homologues tunisiennes, alors que les visites effectuées de part et d'autre par les officiels algériens et tunisiens ont permis à Tunis, outre de renforcer la coopération tous azimuts, de prendre "conseil" auprès d'Alger, s'agissant de sa transition politique, post-révolutionnaire. C'est le cas notamment lors de la visite de deux jours effectuée à Alger en février 2012 par le président Tunisien, Moncef Marzouki, au cours de laquelle il s'était entretenu avec les plus hauts responsables algériens, à leur tête le président de la République, Abdelaziz Bouteflika. "Nos relations avec l'Algérie ont de tout temps été fraternelles et j'estime que la révolution constitue également une occasion pour que ces relations s'améliorent", avait déclaré le président tunisien, dans le sillage de ce déplacement. A l'occasion de la commémoration du 1er anniversaire de la Révolution tunisienne, le 14 janvier 2012, le chef de l'Etat Abdelaziz Bouteflika s'était déplacé à Tunis pour prendre part aux festivités et mettre à profit cette visite pour le "raffermissement" des relations "exceptionnelles" entre les deux pays. Les visites échangées de part et d'autre ont permis aux hauts responsables d'examiner, outre les questions bilatérales, celles liées au devenir et à la construction de l'Union du Maghreb arabe (UMA), les deux parties ayant exprimé à maintes reprises leur volonté doeuvrer dans le sens d'une "redynamisation" de ce projet fédérateur des pays de la région. Alger consultée pour son expertise sécuritaire A la lumière des évolutions internes vécues par la Tunisie et du contexte régional prévalant dans la région du Sahel, la nécessité d'une coopération accrue dans le domaine sécuritaire et de la lutte antiterroriste s'est imposée aux deux pays, comme souligné récemment par le Premier ministre, Abdelmalek Sellal. "La sécurité des deux pays est étroitement liée à une stratégie commune de lutte contre le terrorisme et la grande criminalité", avait-il déclaré le 29 décembre dernier, à l'occasion d'une brève escale en Tunisie en provenance de Libye et au cours de laquelle il avait été reçu par l'ex-chef du gouvernement tunisien, Ali Laarayedh. M. Sellal avait annoncé que les deux parties "avaient examiné la question de la sécurisation des frontières, de la consolidation et de la coordination sécuritaire entre les deux pays", car "la sécurité de la Tunisie est aussi celle de l'Algérie et vice-versa", avait-il souligné. Dans sa lutte contre les poches de terrorisme qui menacent la stabilité de son territoire, la Tunisie n'a eu de cesse de "consulter " l'Algérie en matière de lutte contre ce phénomène transfrontalier, l'expertise algérienne en la matière étant avérée et sollicitée à l'échelle internationale. Une coopération économique appelée à se densifier Au diapason du volet diplomatique et politique, les relations économiques liant les deux pays sont également promises à une densité qui profiterait aux deux économies et pour le bien-être des deux peuples. Le 8 février prochain, devra se tenir à Tunis la 19ème session de la Grande commission mixte algéro-tunisienne, coïncidant avec la célébration du 56ème anniversaire des événements de Sakiet Sidi Youssef. L'accord commercial préférentiel entre l'Algérie et la Tunisie devant entrer en vigueur au début de l'année 2014, le projet relatif au développement des zones frontalières ainsi que les résultats de la commission mixte chargée des affaires consulaires, sociales et immobilières, réunie la semaine dernière, sont également à l'ordre du jour en prévision de la prochaine session de la Grande commission mixte algéro-tunisienne. La 18ème session qui s'était tenue en décembre 2010 à Alger avait été, rappelle-t-on, sanctionnée par la signature de douze accords et programmes de coopération dans divers domaines ainsi qu'un mémorandum d'entente. En outre, cinq autres programmes exécutifs de coopération ont été signés entre les deux pays dans les domaines du tourisme, la formation professionnelle, l'éducation et la culture, ainsi qu'un programme exécutif technique en matière de protection de l'environnement. Les deux pays ont procédé aussi à la signature d'un mémorandum d'entente dans le domaine de la recherche agronomique. A l'issue de sa visite à Alger en août 2013, l'ex-ministre tunisien des Affaires étrangères, Othman Jarandi, avait exprimé sa "satisfaction" du fait que plusieurs décisions prises lors de cette visite ont été "concrétisées sur le terrain" et avait rappelé qu'il a été décidé, à l'occasion de la visite de Ali Larayedh en Algérie en avril 2013, de transformer la grande commission mixte algéro-tunisienne en la commission "stratégique" de coopération entre les deux pays.