L'accord nucléaire historique entre l'Iran et les grandes puissances était dimanche en pleine application après son entrée en vigueur la veille, ouvrant une nouvelle page dans les relations internationales, après la levée des sanctions économiques imposées par les occidentaux à Téhéran depuis plusieurs années. Six mois après la conclusion de l'accord nucléaire de Vienne, au terme d'un long marathon diplomatique, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a certifié, après vérification, que Téhéran avait bien respecté toutes ses obligations destinées à garantir la nature strictement pacifique de son programme nucléaire, mettant fin à un contentieux de plus de treize ans. "L'Iran ayant rempli ses engagements, aujourd'hui, les sanctions économiques et financières multilatérales et nationales liées au programme nucléaire iranien sont levées", ont annoncé dans la foulée les chefs de la diplomatie de l'Union européenne (UE), Federica Mogherini, et iranienne, Mohammad Javad Zarif, dans une déclaration commune à Vienne. Les Etats-Unis, l'UE et l'ONU ont précisé que cette décision avait un effet immédiat. Le président iranien Hassan Rohani a immédiatement salué une "victoire glorieuse" pour le "peuple" iranien. "Aujourd'hui (...) le monde entier est plus sûr car la menace des armes atomiques a été réduite", s'est félicité à Vienne le chef de la diplomatie américaine, John Kerry, l'un des principaux artisans, avec M. Zarif, de cet accord conclu le 14 juillet 2015. Au final, il s'agit "d'un succès historique de la diplomatie", a relevé le ministre allemand des Affaires Etrangères, Frank-Walter Steinmeier. Simultanément, Téhéran et Washington qui ont amorcé un rapprochement à la faveur de l'accord, ont annoncé la libération de quatre Irano-américains détenus en Iran, dont le journaliste du Washington Post Jason Rezaian, en échange de sept Iraniens détenus aux Etats-Unis. Des défis attendent L'Iran après la mise en oeuvre de l'accord Téhéran va devoir relever d'énormes défis économiques internes pour mieux exploiter les effets prévisibles de la levée des sanctions. Cet accord, négocié par l'Iran et le groupe 5+1 (Etats-Unis, France, Royaume-Uni, Russie, Chine et Allemagne), suscite l'excitation des multinationales du monde qui n'attendent désormais que le moment opportun pour pénétrer un marché de plus de 70 millions de consommateurs. Les milieux économiques se tiennent prêts depuis plusieurs mois à revenir en Iran, un pays qui dispose des quatrièmes réserves de brut au monde, et des deuxièmes de gaz. Membre de l'Opep, il peut désormais exporter à nouveau librement son pétrole. L'accord est aussi interprété comme l'amorce d'un rapprochement entre les Etats-Unis et l'Iran, une évolution qui met en rage les alliés traditionnels de l'Amérique dans la région, l'Arabie saoudite et Israël en tête, qui voit de cette concrétisation "une erreur historique pour le monde". Israël a d'ailleurs jugé que Téhéran n'avait "pas abandonné ses ambitions de se doter d'armes nucléaires". A Paris, le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a indiqué espérer un même "esprit de coopération" pour "tous les enjeux régionaux". Le ministre allemand des Affaires Etrangères, Frank-Walter Steinmeier, a salué "un succès historique de la diplomatie". L'AIEA a attesté samedi que Téhéran a réduit comme convenu le nombre de ses centrifugeuses permettant d'enrichir de l'uranium, et envoyé à l'étranger la quasi-totalité de son stock d'uranium faiblement enrichi. En outre, l'agence a établi que l'Iran a bien, comme il s'y est engagé, retiré le coeur de son réacteur à eau lourde d'Arak et bétonné une partie de l'installation, de façon à ne plus pouvoir y fabriquer de plutonium de qualité militaire. La levée de l'intégralité des sanctions sera échelonnée sur dix ans, alors que durant 15 ans les mesures pourront être automatiquement rétablies en cas de manquements de Téhéran. L'Iran a accepté de se soumettre à des inspections renforcées de l'AIEA. L'embargo de l'ONU sur les armes conventionnelles et les missiles balistiques sont maintenus jusqu'en 2020 et 2023 respectivement. "Nous resterons vigilants pour vérifier que l'Iran respecte ses engagements chaque heure de chaque jour dans les années à venir", a averti John Kerry. La République islamique d'Iran a toujours nié vouloir se doter de l'arme atomique, tout en revendiquant son droit à exploiter une filière nucléaire civile complète. L'AIEA a cependant établi en décembre que Téhéran avait bel et bien mené jusqu'en 2009 des recherches pour avoir la bombe. Washington avait fait valoir que ce constat ne devait pas empêcher d'"aller de l'avant" dans ce dossier.