Le processus irréversible des réformes politiques, entamé en 2011, connaîtra son couronnement dimanche à la faveur de l'adoption du projet de révision de la Constitution, avec pour objectif de consolider l'Etat de droit, renforcer l'unité nationale et arrimer l'Algérie vers la modernité. Initiées par le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, ces réformes connaîtront leur aboutissement par l'adoption de la nouvelle Constitution, dont la révision a été annoncée dans un discours à la nation prononcé par le chef l'Etat à l'occasion de la célébration de la Journée du savoir en Algérie, le 15 avril 2011. En ce sens, la nouvelle Constitution devrait permettre à l'Algérie de franchir une nouvelle étape à même d'adapter les lois et le dispositif législatif régissant les institutions du pays aux standards universels. La nouvelle Constitution a été précédée d'un large processus de réformes politiques et sécuritaires, marqué notamment par la levée de l'état d'urgence et la promulgation de plusieurs lois organiques ayant permis de consolider l'Etat de droit et la pratique démocratique en Algérie. 2011 : premier round de consultations politiques Au lendemain de l'annonce de la révision constitutionnelle, des consultations politiques ont été conduites en 2011 par le président du Conseil de la nation, Abdelkader Bensalah. Ces consultations avaient permis à M. Bensalah de rencontrer des partis politiques, des personnalités nationales et des experts ayant émis des avis divers sur le projet de révision du texte fondamental du pays. De son côté, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, avait rencontré dans le cadre de ces consultations, des personnalités politiques et nationales. Dans le sillage de ces réformes, cinq lois organiques ont été promulguées en 2012. Il s'agit de lois relatives respectivement au régime électoral, aux cas d'incompatibilité avec le mandat parlementaire, à l'élargissement des chances d'accès de la femme à la représentation dans les Assemblées élues, à l'information et aux partis politiques ainsi que la loi relative aux associations. Dans la lancée des réformes et de la révision constitutionnelle, une commission d'experts chargée d'élaborer un avant-projet de loi sur la révision constitutionnelle, a été mise en place en 2013 par le président de la République, Abdelaziz Bouteflika. Composée de professeurs d'universités, connus pour leur compétence et leurs qualités morales, la commission avait élaboré l'avant-projet de loi sur la révision de la Constitution en s'appuyant, à la fois, sur les propositions retenues des acteurs politiques et sociaux et sur les orientations du président de la République, en vue de leur traduction en dispositions constitutionnelles. Des consultations pour une révision consensuelle Le deuxième round de consultations politiques a été lancé après l'élection présidentielle de 2014 qui avait vu le président Bouteflika réélu pour un quatrième mandat. Dans son discours d'investiture, le chef de l'Etat avait annoncé qu'il relancerait le chantier des réformes politiques pour aboutir à une révision constitutionnelle "consensuelle". "C'est avec la volonté résolue de renforcer notre entente nationale et faire franchir de nouvelles étapes qualitatives à la démocratie, que je relancerai, sous peu, le chantier des réformes politiques qui aboutira à une révision constitutionnelle consensuelle", avait souligné le présidente Bouteflika. Le chef de l'Etat n'avait posé ''aucune limite préalable" au projet de révision constitutionnelle, hormis celles relatives aux constantes nationales et aux valeurs et principes fondateurs de la société algérienne. C'est dans le but de permettre aux parties n'ayant pas pris part, pour diverses raisons, au premier round des consultations politiques, qu'un deuxième round a été mené par le ministre d'Etat, directeur de cabinet de la présidence de la République, Ahmed Ouyahia. Un total de 114 rencontres ont été organisées avec des partenaires politiques et sociaux et une trentaine de contributions écrites ont été reçues dans le cadre des consultations menées par M. Ouyahia en 2014. Les suggestions des différentes parties prises en compte Lors de ces consultations, les parties invitées avaient notamment proposé la limitation des mandats présidentiels, la nature du régime politique et la séparation des pouvoirs. Plusieurs partenaires aux consultations avaient mis l'accent sur la nécessité de doter le parlement de larges prérogatives et évoqué la question de la séparation des trois pouvoirs. Le renforcement de l'indépendance de la justice a figuré aussi parmi les préoccupations des partenaires, tout comme l'élargissement des pouvoirs du Conseil constitutionnel, sa composante et le mode de désignation de ses membres. La constitutionnalisation de la langue amazigh, avec ses différentes variantes, en tant que langue officielle a été également suggérée. La promotion des droits de l'Homme, le renforcement de l'Etat de droit et des libertés individuelles et collectives, ont été réaffirmées aux cours de ces concertations. Une révision pour une démocratie plus apaisée La président de la République a choisi la date de la commémoration du 61ème anniversaire de la commémoration de la glorieuse Révolution du 1er Novembre 1954 pour annoncer, le mois de novembre dernier, que le projet de la révision constitutionnelle sera bientôt rendu public. "J'espère que cette révision constitutionnelle contribuera à l'affirmation d'une démocratie plus apaisée dans tous les domaines, ainsi qu'à davantage d'épanouissement des énergies des acteurs politiques, économiques et sociaux du pays, au service des intérêts de notre peuple, qui est la source exclusive de la démocratie et de la légitimité et qui est le seul arbitre souverain de l'alternance au pouvoir", avait souligné le chef de l'Etat dans son message à cette occasion. En décembre 2015, le président de la République avait présidé un Conseil restreint consacré à l'examen de l'avant-projet de révision de la Constitution, marquant ainsi l'étape de finalisation du projet. Deux semaines plus tard, le chef de l'Etat avait présidé un deuxième Conseil restreint au cours duquel il avait validé l'avant-projet de révision "substantielle" de la Constitution. Au début de l'année 2016, soit le 5 janvier, la synthèse et les grandes lignes l'avant-projet de révision de la Constitution ont été présentées par le ministre d'Etat, directeur de cabinet de la présidence de la République, Ahmed Ouyahia. Après que le Conseil des ministres eut approuvé le projet de loi portant révision de la Constitution le 11 janvier dernier, le chef de l'Etat avait saisi le Conseil constitutionnel pour qu'il rende un avis motivé sur ce texte. Le 28 janvier 2016, le Conseil constitutionnel a rendu un avis motivé concernant le projet de loi soulignant que le projet de loi en question "ne porte aucunement atteinte aux principes généraux régissant la société algérienne, aux droits et libertés de l'homme et du citoyen. Il n'affecte d'aucune manière, les équilibres fondamentaux des pouvoirs et des institutions constitutionnelles". A la faveur de l'avis motivé du Conseil constitutionnel, le président de la République a signé le 30 janvier dernier un décret portant convocation du parlement en ses deux Chambres pour une session sur le projet de révision constitutionnelle, conformément à l'article 176 de la Constitution. Le parlement avec ses deux chambres (Conseil de la nation et Assemblée populaire nationale) a entamé lundi dernier les préparatifs de sa réunion consacrée à la présentation et au vote du projet de loi portant révision constitutionnelle. Le vote interviendra dimanche à l'occasion d'une session qui sera présidée par le président du Conseil de la nation, Abdelkader Bensalah. Une session qui devrait aboutir à l'adoption de la nouvelle Constitution, laquelle adaptera l'Algérie à l'évolution rapide et aux mutations profondes actuellement en cours à travers le monde. Une Constitution qui aspire aussi à "consolider l'unité nationale autour de l'Histoire, de l' identité et des valeurs spirituelles et civilisationnelles du pays, tout en confortant le respect des droits et libertés des citoyens, ainsi que l'indépendance de la justice".