L'intergroupe sur le Sahara occidental au Parlement européen a exhorté mercredi la Commission européenne à faire preuve de transparence et à "préserver la crédibilité" de l'Union en tant que bloc régional respectueux du droit européen et international lors des nouvelles négociations sur les accords UE-Maroc afin de se conformer à l'arrêt de la Cour européenne de justice (CJUE) sur le Sahara occidental. Dans une lettre adressée à la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini et aux commissaires européens chargés du Commerce et des affaires économiques et financières, respectivement, Cécilia Malmstrom et Pierre Moscovici, l'intergroupe met en garde la Commission européenne contre toute tentative de "contourner l'arrêt de la CJUE" rendu le 21 décembre dernier, considérant un tel plan "surprenant et inquiétant" à la fois. Vendredi dernier, l'Observatoire des ressources naturelles au Sahara occidental (WSRW) révélait que la Commission européenne a sollicité l'approbation des Etats membres de l'UE pour écarter le jugement de la Cour de justice de l'UE en négociant un nouvel accord avec le Maroc pour le commerce avec le Sahara Occidental occupé. L'intergroupe sur le Sahara occidental s'inquiète, principalement, de la possibilité de voir la Commission européenne négocier "exclusivement" avec le Maroc et ignorer un des principes, pourtant clairs, posés par l'arrêt de la CJUE, à savoir que le Front Polisario est le représentant légitime du peuple sahraoui comme la reconnu l'ONU. L'intergroupe met la Commission en garde contre toute manœuvre visant à confondre le "peuple" du Sahara occidental avec la "population" du Sahara occidental, constituée pour une énorme majorité de colons marocains incités à s'installer dans les territoires occupés, soulignant, à ce titre, que la CJUE se réfère explicitement au consentement du "peuple du Sahara occidental". Il craint, également, de voir la Commission européenne aller demander le consentement d'une institution ou d'un organe marocain, alors que la CJUE a déclaré que le Maroc et le Sahara occidental sont des territoires distincts et séparés. Les députés européens de l'intergroupe sur le Sahara occidental redoutent "un autre acte illégal" de la part de la Commission européenne qu'ils tiennent pour responsable de la bataille judiciaire menée par le Front Polisario devant la CJUE pour annuler l'accord de libéralisation UE-Maroc signée en 2012 et qui a conduit à la décision historique rendue par cette même Cour, excluant le Sahara occidental du champ d'application des accords UE-Maroc. Mise en garde contre la tentative de "servir les intérêts géopolitiques et commerciaux" de certains Les atermoiements de l'UE inquiètent les parlementaires européens qui dénoncent ces tergiversations visant à "servir des intérêts géopolitiques et commerciaux" de certaines parties occultes. "Le droit européen et international ne peut pas être pris à la légère", ont-ils affirmé dans leur lettre aux dirigeants européens, mettant l'accent sur la nécessité de "ne pas renier les droits du peuple sahraoui simplement pour servir les intérêts géopolitiques et commerciaux de quelques-uns". L'intergroupe sur le Sahara occidental au Parlement européen exhorte, dans ce contexte, l'exécutif européen à faire preuve de "transparence" sur le mandat sollicité auprès des Etats membres de l'Union pour lancer de nouvelles négociations sur l'accord de libéralisation UE-Maroc. L'intergroupe exige, à ce titre, de l'exécutif européen de réponde à une dizaine de questions sur la manière de se conformer à l'arrêt de la CJUE qui a conclu que les accords d'association et de libéralisation UE-Maroc ne sont pas applicables au Sahara occidental. Les députés européens s'interrogent notamment comment la Commission comptait procéder pour solliciter le consentement du peuple sahraoui, et si elle envisageait d'inclure les Sahraouis vivant en territoires libérés et dans les camps des réfugiés à Tindouf. Ils exigent, en outre, de la Commission des garanties sur la conformité des nouvelles négociations qu'elle compte lancer avec le Maroc à l'arrêt de la CJUE et des explications sur sa façon de procéder pour surveiller la mise en œuvre des accord UE-Maroc au Sahara occidental occupé, sachant que ce territoire reste inaccessible aux observateurs internationaux, aux parlementaires et aux journalistes. Dans un entretien accordé à la revue Afrique-Asie, l'ambassadeur d'Algérie à Bruxelles, Amar Belani a rappelé que "la décision irrévocable de la justice européenne est contraignante aussi bien pour la Commission européenne que pour les Etats membres de l'UE", soulignant que cette décision, "découle du statut distinct et séparé reconnu par le droit international et la Charte des Nations unies au Sahara occidental en tant que territoire non autonome". Mettant en garde contre les solutions de contournement, Belani a estimé qu' "il serait regrettable" que "l'UE décide, au nom d'un pragmatisme de mauvais aloi, de fouler au pied les principes et valeurs sur lesquels elle a été construite et dont elle se prévaut dans ses relations avec le reste du monde".