L'Union européenne (UE) suit "avec attention" la situation au Rif, dans le nord du Maroc, secoué depuis huit mois par un mouvement de protestation populaire, a affirmé une porte-parole de l'Union, au moment où de plus en plus de voix s'élèvent pour exhorter l'UE à condamner la répression des Rifains par les autorités marocaines et à prendre les mesures nécessaires pour protéger cette population. "L'Union européenne suit avec attention les développements dans le Rif. L'expression publique des attentes et aspirations de la population fait partie intégrante de tout Etat de droit", a déclaré à l'APS, une porte-parole de l'Union. Selon cette porte-parole, "l'UE réitère régulièrement l'importance du respect de l'Etat de droit, en particulier dans le domaine de la justice". Depuis le décès fin octobre 2016 du jeune marchand de poisson, Mohsen Fikri, broyé par une benne à ordures alors qu'il tentait d'empêcher la destruction de sa marchandise saisie par la police, la mobilisation n'a jamais cessé à Al-Hoceima (nord du Maroc) et dans plusieurs localités alentour. Le mouvement s'est même durci pour exiger que justice soit faite pour la mort du jeune poissonnier, mais également pour porter des revendications économiques et sociales en faveur de cette zone enclavée. Animé par des jeunes de la région, le mouvement de contestation populaire Hirak, est longtemps resté pacifique. L'arrestation fin mai de Nasser Zefzafi, le leader du mouvement, a marqué un durcissement de la crise. Plus d'une centaine de personnes, notamment les activistes constituant le noyau dur du mouvement, ont également été arrêtées. Accusés d'"atteinte à la sécurité de l'Etat", de nombreux militants du Hirak risquent de lourdes peines. L'approche ultra-sécuritaire (renforcement de la présence militaire dans la région) choisie par les autorités marocaines en réponse aux soulèvements populaires dans la région du nord et la répression du mouvement de contestation pacifique ont suscité l'indignation des organisations de défense des droits de l'Homme telles Human Rights Watch et Amnesty International qui ont dénoncé "les violences policières" contre le leader du "Hirak" Nasser Zefzafi et d'autres militants de ce mouvement. Des voix s'élèvent pour dénoncer la répression au Rif Ces dernières semaines, de plus en plus de voix, au sein même de l'UE, s'élèvent pour exhorter l'Union à condamner la répression des Rifains par les autorités marocaines et à prendre les mesures nécessaires pour protéger cette population. Les eurodéputés français d'Europe écologie les verts (EELV) affiliés au groupe Verts/ALE au Parlement européen ont exhorté en juin le roi du Maroc, Mohamed VI à "prendre en compte" les aspirations de son peuple et à "ne pas réprimer" les manifestations populaires exprimant un "profond malaise social". Lors d'une conférence-débat organisée, il y a quelques jours, au Parlement européen, les participants ont exigé de l'UE et de ses Etats membres de condamner la répression, la violence et la persécution policière pour des raisons politiques ainsi que la torture et les traitements inhumains et dégradants que les forces de sécurité marocaines infligent aux manifestants pacifiques de la contestation populaire dans le Rif. "Il faut que l'UE arrête d'ignorer les revendications des mouvements politiques", a déclaré le député européen Miguel Urban Crespo, initiateur de la conférence, jugeant le moment "opportun" de faire pression sur l'UE pour qu'elle use des outils dont elle dispose afin d'amener le Maroc à respecter les droits de l'Homme. L'eurodéputé Florent Marcellesi a déploré la position de l'UE par rapport au mouvement de contestation populaire qui agite le Rif marocain, regrettant que l'Union n'ait "rien fait" pour protéger les manifestants. "L'UE n'a rien fait, encore moins Mogherini, pour exiger une solution à ce conflit et dénoncer la réponse, par la répression, du régime marocain aux revendications légitimes des manifestants", a-t-il regretté, faisant remarquer que l'UE aurait pu activer une clause sur le respect des droits de l'Homme figurant dans l'accord d'association UE-Maroc. Dénonçant le recours excessif des forces de l'ordre marocaines à la violence en réponse à ces soulèvements, l'eurodéputée Kati Piri a invité la Commission européenne à livrer son point de vue sur "la procédure légale" dans l'affaire Fikri, adoptée par les autorités marocaines qui ont précipité les procédures judiciaires pour présenter des boucs émissaires à la place des vrais responsables de la mort de ce poissonnier. Cette députée européenne a interpellé, d'ailleurs, la Commission sur la surveillance du respect de ces droits, invitant l'exécutif européen à s'exprimer sur la procédure judiciaire dans l'affaire de la mort du jeune marocain, Mohsen Fikri. L'ambassadeur d'Algérie à Bruxelles, Amar Belani, a déploré de son côté, l'"ambiguïté" et le "flou artistique" entretenus par l'UE et ses Etats membres par rapport à la vague de répression et d'arrestations arbitraires au Rif, regrettant que l'Union ait "fermé les yeux sur des pratiques de torture révélées par des organisations et activistes marocains". M. Belani a regretté également le silence de l'UE qui "s'est interdite tout commentaire ou appréciation critique sur la situation au motif, fort commode, de ne pas compliquer davantage les relations, déjà tendues, avec le Maroc".