La majorité des personnalités nationales proposées par le Forum civil pour le changement (FCPC) en vue de mener la médiation et le dialogue pour une sortie de la crise politique que traverse le pays ont donné leur accord de principe, sous condition que le pouvoir prenne "des mesures d'apaisement pour instaurer la confiance". Dans un communiqué diffusé après l'annonce de la liste des 13 personnalités nationales, dont il fait partie, l'ancien président de l'Assemblée populaire nationale (APN), Karim Younes, s'est dit "favorable et disposé" à mener le rôle de la médiation et du dialogue. Pour lui "cette initiative fait partie de la médiation souveraine entre enfants du même pays, et partant de là, elle s'inscrit en droite ligne des revendications légitimes de millions d'Algériens, sortis dans la rue pour exprimer leur colère et leur désir du changement". "Conscient que l'impasse politique que nous vivons présente des risques majeurs, je reste convaincu que seule la voie de la médiation et la communication avec toutes les parties agissantes de la société peut aboutir à un résultat pacifique à même de répondre aux aspirations des Algériens. J'espère être à la hauteur de la confiance placée en ma personne", a-t-il ajouté. De son côté, l'avocat Mustapha Bouchachi a remercié les jeunes du FCPC de l'avoir proposé parmi les personnalités nationales devant mener le dialogue. "Je considère que le dialogue constitue le moyen optimal et civilisé pour une sortie de crise que vit l'Algérie aujourd'hui", a-t-il posté sur son compte Facebook. Pour maître Bouchachi, les conditions doivent être réunies avant l'entame de tout dialogue à savoir "le départ des symboles du système, la libération des détenues politiques et détenus d'opinions, l'ouverture de l'espace public et des différents médias à toutes les opinions et orientations en toute liberté et la levée de toutes les restrictions imposées aux manifestants". Pour sa part, l'expert en économie Smaïl Lalmas a déclaré à l'APS être très honoré par cette proposition, d'autant qu'il figure parmi ceux qui ont, depuis le début du hirak appelé au dialogue. "J'ai été contacté, il y a quelques semaines, pour mener cette mission", a-t-il fait savoir soulignant que la sortie de la crise politique "passe par un dialogue sérieux qui débouche sur une feuille de route unifiée réunissant toutes les parties". Pour lui, l'aboutissement de processus du dialogue doit se réaliser à travers "un consensus populaire sur les personnalités proposées" et "être accompagné de mesures d'apaisement de la part du pouvoir, à l'instar de la libération des activistes du hirak, à leur tête le moudjahid Lakhdar Bouragaa, en sus du départ de tous les membres du gouvernement actuel". De son côté, la juriste et spécialiste en droit constitutionnel, Fatiha Benabbou a affirmé avoir donné "son accord de principe" après avoir être contactée par le Forum civil pour le changement, estimant que "l'Algérie amorce un virage dangereux requérant de toutes les parties des concessions et de s'asseoir autour de la table". Elle a exigé, elle aussi , des "concessions et l'initiation de mesures d'apaisement, pour calmer le climat politique et rétablir la confiance parmi les citoyens, dont la plus importante est la libération des jeunes arrêtés", a-t-elle dit. Par ailleurs, le syndicaliste Ilyes Merabet a estimé que le principe du dialogue et de la médiation devrait être à la tête des préoccupations de tous les acteurs politiques et représentants de la société civile et du pouvoir, affirmant "défendre ce principe parce qu'il est la seule voie pour sortir de la crise politique actuelle". Il a plaidé, à ce propos, pour "l'élargissement du cercle de consultation en ce qui concerne la liste des personnalités proposées pour qu'elle soit largement consensuelle", appelant à "l'instauration d'un climat de confiance" à travers les mêmes mesures d'apaisement prônées par les autres personnalités. Pour sa part, le sociologue Nacer Djabi a déclaré que "le dialogue ne peut se faire qu'à travers la réalisation des attentes des Algériens, tels que le départ des personnalités indésirables, la libération des détenus de l'opinion, l'arrêt du harcèlement contre le hirak". Mouloud Hamrouche et Djamila Bouhired démentent avoir être approchés Par ailleurs, certaines personnalités nationales ont émis des réserves quant à l'initiative lancée par le Forum, à l'image de l'ancien chef du gouvernement, Mouloud Hamrouch qui a précisé "personne ne m'a contacté et je ne suis pas concerné" par cette liste annoncée mercredi par Abderrahmane Arar. La moudjahida Djamila Bouhired a démenti, elle aussi, avoir été approché pour rejoindre les 13 personnalités proposées, affirmant dans un communiqué avoir été "surprise" de voir son nom figurer sur cette liste. "J'ai appris avec étonnement que mon non figurait sur la liste des personnalités auxquelles est dévolue l'organisation d'un dialogue entre le pouvoir et le mouvement populaire (hirak)", a- t-elle écrit. "Personne n'as demandé mon avis et je n'ai donné mon accord à personne. Je ne peux pas faire partie d'un groupe de personnes dont certains ont servi le pouvoir", a-t-elle insisté, ajoutant qu'"il ne peut y avoir de dialogue avec ceux qui nous menacent et nous accusent de trahison. Je réaffirme mon soutien aux personnes qui militent pour leur émancipation civile en toute liberté, dignité et démocratie". A ce propos, le président du FCPC a affirmé à l'APS que le forum "avait contacté directement la plupart des personnalités proposées, qui ont donné leur consentement pour mener la mission du dialogue, néanmoins Djamila Bouhired, Mouloud Hamrouche et Ahmed Taleb Ibrahimi n'ont pas été approchés au vu de leur statut dans la société algérienne, et pour lesquels nous avons préféré adresser une lettre à travers la proposition de cette initiative". La liste des 13 personnalités proposées regroupe des personnalités nationales, des anciens responsables, des militants des droits de l'Homme, des syndicalistes et des académiciens ainsi que la société civile. Il s'agit de la moudjahida Djamila Bouhired, de l'ancien ministre des Affaires étrangères et diplomate, Ahmed Taleb Ibrahimi, des deux anciens chefs de Gouvernement Mouloud Hamrouche et Mokdad Sifi, outre l'ancien président de l'Assemblée populaire nationale (APN), Karim Younes. Parmi les personnalités proposées figurent également: l'avocat Mustapha Bouchachi, la constitutionnaliste Fatiha Benabou, les académiciens Nacer Djabi et Smail Lalmas et Islam Benattia, le syndicaliste Ilyes Merabet, la militante associative Nafissa Hireche, la militante des droits de l'Homme Aicha Zinai.