Trois films documentaire et des extraits de productions en cours, en lien avec la Guerre de libération nationale et la période coloniale, ont été projetés, dimanche à Alger, au public du 11e Festival international du cinéma d'Alger (Fica). Accueillies au Palais de la culture Moufdi-Zakaria, ces projections ont été précédées d'une table ronde sur la mémoire et les archives du cinéma dans le cadre d'un focus dédié au 60e anniversaire du recouvrement de la souveraineté nationale. Habituée du festival, la réalisatrice serbe Mila Turajlic a présenté le documentaire "Ciné Guerillas, Scenes of Labudovic's Reels" basé sur les archives de l'ex-Yougoslavie et sur les images et les notes du célèbre Stevan Labudovic, disparu en 2017, un film qui plonge les spectateurs dans une bataille médiatique féroce en plein Guerre de libération nationale. Le film montre l'ampleur du travail du militant et caméraman des maquis de la Révolution algérienne et son engagement indéfectible pour cette noble cause qui l'a mené jusqu'à filmer des batailles, des bombardement d'aviation et d'artillerie et le passage de la tristement célèbre ligne Challe. La réalisatrice qui a beaucoup travaillé sur l'oeuvre de Labudovic s'est également rendu dans les maquis et villages que son prédécesseur avait filmé, accompagnée de quelques une de ses compagnon de route de l'époque encore en vie. L'immersion dans la bataille médiatique de l'époque prend tout son sens quand Mila Turajlic va à la rencontre du regretté Lamine Bechichi, pour évoquer le rôle de la radio et de l'enregistrement de chansons patriotiques, puis en faisant intervenir dans son film Elaine Mokhtefi, militante américaine dans les rangs du Gouvernement provisoire de la République Algérienne (GPRA) et du Front de Libération Nationale (FLN) pour porter et défendre la cause de l'Algérie à l'Organisation des Nations Unies. Le documentaire montre également des images de Stevan Labudovic, décoré de la médaille du Mérite en 2012, lors de sa visite à Alger dans le cadre du ce même festival qui lui avait rendu hommage lors de sa 5e édition en 2014. Dans ce même programme dédié à la mémoire, le film "Roberto Muniz, un argentin dans la révolution algérienne" du réalisateur argentin Nestor Antonio Suleiman qui retrace le parcours militant du Roberto Muniz, dit Mahmoud l'Argentin, disparu en 2022, depuis ses débuts en tant qu'ouvrier syndicalistes et ses premiers contacts avec des émissaires du FLN à Buenos Aires en 1956. Le documentaire restitue le témoignage de Roberto Muniz, en présence de son fils Mahmoud, et relate son voyage avec d'autres argentins recrutés pour fabriquer des armes et des explosifs pour les soldats de l'Armée de Libération Nationale (ALN), puis son installation à Alger au lendemain de l'indépendance. Dans un autre registre plus académique, où le cinéma n'est qu'un prétexte pour publier des documents d'archives, le film français "La conquête" de la réalisatrice, Franssou Prenant, confronte des images contemporaines de l'Algérie et de la France avec des textes de hauts responsables de la France coloniale qui avaient tissé la trame de l'idéologie coloniale pour dissimuler les massacres et les destructions. Ces textes écrits dès les premiers jours de la prise d'Alger en 1830, dévoilent le véritable visage de la machine coloniale et défait le simulacre de "mission civilisatrice" souvent opposé aux idées anticoloniales. Des extraits des films "Capitaine Valchanov" de Djamel Bendeddouche et "Deux vies pour l'Algérie" de Jean Asselmeyer et Sandrine-Malika Charlemagne qui sont en cours de production, ont également été présentés. Le 11e Fica se poursuit jusqu'au 10 décembre avec encore au programme des focus sur l'environnement, les droits des femmes, la mémoire et la résistance ou encore sur les oeuvres de jeunes cinéastes algériens.