Le marché des voitures d'occasion a repris du "poil de la bête" après le coup d'arrêt donné en juillet 2009 au crédit à la consommation pour l'achat de véhicules neufs, et fatalement, les souks hebdomadaires reviennent à la vie, et les "Smasrias" font de belles affaires, même si l'arnaque n'est jamais loin. Sur le grand marché hebdomadaire de Boufarik, à 30 km au sud d'Alger, il n'y a pas foule autour des voitures en ce jour de grosses chaleurs d'été, juste des rabatteurs et quelques intrépides louvoyant entre deux berlines, en quête d'une belle occasion. "A Boufarik, il faut venir tôt pour chasser la bonne affaire", lance de sa voiture Ali, nonchalamment accoudé à la portière. "Le marché est calme, et il n'y a pas beaucoup d'acheteurs en ce moment", ajoute-t-il. En fait, le marché des voitures d'occasion en Algérie a repris des couleurs depuis juillet 2009, après l'application de la loi de finances complémentaire (LFC 2009), qui avait mis un terme au crédit à la consommation pour l'acquisition de voitures neuves. Du coup, des centaines de dossiers d'achat ont été mis de côté, et les espoirs d'une voiture neuve se sont vite évanouis chez beaucoup d'adeptes du leasing automobile. "Certes, c'est bien d'avoir une voiture neuve que l'on paie à tempérament. Mais, à mon avis, rien ne vaut l'achat d'une belle berline d'un coup, sans crédit ni intérêts qui vous mènent la vie dure et malmènent vos fins de mois", affirme Said, le genre de fouineurs qui cherchent les défauts d'une voiture là où ils ne devraient pas exister. Au marché de Tidjelabine (Boumerdes), une ambiance différente rythme un "souk" qui brasse des sommes énormes, comparativement à celui de Boufarik. Fréquenté par les revendeurs des wilayas de Tizi-Ouzou, d'Alger, de Boumerdes, de Bouira et même de Blida ou de Bordj Bou Arreridj, ce marché voit chaque semaine plus d'une centaine de voitures changer de mains. Pour les services des impôts, la plus value est de plusieurs centaines de millions de dinars par mois. "Tidjelabine est un bon marché de voitures, car les gens y viennent pour acheter, et les vendeurs proposent des voitures en bon état, bien entretenues et à des prix plus ou moins raisonnables'', souligne Amar, pour qui la fin du crédit automobile "a donné un coup de fouet aux prix de la voiture d'occasion". La LFC 2009 a été annoncée et appliquée fin juillet, et au mois d'août déjà, les prix des voitures d'occasion avaient grimpé de plus de 5 %. Globalement, les petites berlines de marques européennes de moins de trois ans d'âge, sont passées d'un prix moyen oscillant entre 900.000 dinars et 950.000 dinars à 1.000.000 de dinars et plus. Quant aux petites "asiatiques", leur prix reste dans la fourchette des 600.000 dinars. Mais, les prix des berlines ainsi que les grosses cylindrées sur le marché de l'occasion, ont été dopées également par un recul assez prononcé des importations. Au 1er trimestre 2010, 63.674 véhicules ont été importés par les 36 concessionnaires présents en Algérie contre 68.303 véhicules à la même période en 2009, soit un recul de 6,78 %. En valeur, les importations des véhicules ont baissé à 67,808 milliards de DA contre 71,228 milliards de DA au cours des trois premiers mois de 2009. Libellés en dollars, les achats de véhicules neufs durant cette période ont reculé de 25%, et se sont établis à 303 millions de dollars contre 404 millions de dollars à la même période en 2009. Bref, la vente de véhicules neufs en Algérie s'est repliée de 23,64% en 2009 par rapport à 2008, selon les chiffres du Centre national de l'informatique et des statistiques (CNIS) des Douanes. Une belle aubaine pour les "Smasria", ces professionnels de la revente de voitures d'occasion. Et, avec l'été, une période propoice à la vente de voitures, la demande, si elle n'a pas explosé, reste "bonne" pour les revendeurs, qui généralement, prennent de petites marges sur des voitures achetées sur les marchés de l'intérieur du pays, comme ceux de Mesra (Mostaganem), et Sidi Aissa (M'sila) où l'état des voitures est "excellent" et les prix "intéressants", selon un spécialiste de ce genre de business. L'Algérie, avec 3,9 millions de véhicules, possède le deuxième parc le plus important d'Afrique après l'Afrique du Sud. Le coup de frein au crédit automobile, s'il a contrarié les concessionnaires au début, n'en a pas moins intéressé d'autres pour des investissements orientés vers le montage sur site, en Algérie. Des contrats de partenariat sont actuellement en cours d'études, mais rien de concret pour le moment, du moins sur le plan officiel, affirme un agent des assurances. Mais, "avant tout, il faut organiser le marché de l'occasion, car il n'y a pas vraiment un marché de l'Argus en Algérie, juste des repères pour juger de la valeur d'une voiture en bon état, de moins de deux ans d'âge qu'il faut garantir et assurer avec des primes calculées presque à perte", ajoute t-il. "Aujourd'hui, devant la situation d'un marché automobile dominé par la précarité sur le plan de son organisation et de sa réglementation, la valeur d'un véhicule assurée est calculée selon son prix d'achat déclaré par l'assuré, et non plus comme avant selon la cylindrée du véhicule", précise la même source. Et puis, en 2010, le marché se rétrécit, après le "boom" de l'année 2008 et, dans une moindre mesure, 2009. L'Algérie a importé 269.018 véhicules en 2009 contre 352.315 voitures en 2008, alors que les importations en valeur ont baissé de 286,9 milliards de dinars en 2008 à 277,3 milliards de dinars en 2009. Les 36 concessionnaires qui dominent le marché du neuf n'ont importé que 246.522 véhicules en 2009 contre 327.506 en 2008, une baisse de 24,73%. Les particuliers, quant à eux, ont importé 22.496 véhicules en 2009, contre 24.809 unités en 2008, un recul de 9,32% pour un montant de 31,5 milliards de DA, selon les chiffres du CNIS. Suffisant pour redonner des couleurs au marché informel, aux "Smasrias" et à tous les chasseurs de bonnes occasions à tout prix.