L'histoire du théâtre dans la wilaya de Biskra durant le XXe siècle démontre que le père des arts a constitué un moyen efficace de lutte contre l'occupation française en Algérie. L'auteur de ''La musique et le théâtre à Biskra'', Abdelhamid Zerdoum, qui ramène à 1929 la naissance de ce qu'on appelait ''le théâtre indigène'', cite plusieurs troupes, pièces et comédiens de talent. Il rappelle que Mekki Chebbah, cafetier de profession, avait fondé en 1936 la troupe théâtrale ''Les jeunes okbis'', par référence à Sidi-Okba, sa ville natale. Parmi les œuvres de cette compagnie figurent ''Tarek ibn Ziad'' et surtout ''Le pharaon du désert'', une œuvre foncièrement critique envers les tenants de l'occupation, ce qui a valu au fondateur de la troupe de nombreux harcèlements, avant la disparition des ''Jeunes okbis'' en 1938. Une autre troupe dénommée ''El Hayat'' (La vie) a été fondée en 1938 par Hassani El-Hadj Bendjilani, commerçant et négociant de dattes de son état. Cette formation avait notamment produit ''Hannibal l'africain'', référence au général phénicien qui fit trembler Rome. La pièce fut interdite par l'administration militaire française et Hadj Hassani et un co-fondateur de la troupe, Ali Zaouiche furent temporairement exilés hors de Biskra engendrant la dissolution de fait d'El Hayat. En 1946, la troupe ''El Ittihad'', fondée par un comptable de métier, Mohamed El-Bachir Achouri, monta une pièce intitulée ''Pour le trône'', traitant du thème de la traîtrise de la patrie, interprétée, entre autres, par le Chahid Mohamed-Larbi Ben M'hidi, puis une autre intitulée ''Le héros de Tripoli'', dédiée à la volonté d'un résistant libyen au colonialisme italien. ''Salah-Eddine'' fut, en 1951, l'intitulé d'une autre ouvre théâtrale montée et jouée par la troupe ''El Amel'', créée par Mohamed Omri Belmihoub El-Ghomari, un des hommes de théâtre les plus actifs dans les Ziban. Toutes ces pièces révèlent le degré de conscience et le nationalisme qui transparaît des £uvres théâtrales de l'époque et leur rôle dans la diffusion de l'esprit patriotique, selon Zerdoum. Le président de la compagne théâtrale Ouchak el Masrah (Les passionnés du théâtre), Ahmed Khoussa estime de son côté que ces pièces ont marqué de leurs empreintes les esprits et ont constitué un vecteur pour la transmission de messages nationalistes en direction des couches populaires. Pour sa part, Faouzi Masmoudi, spécialisé dans l'histoire des Ziban, rappelle que la résistance à l'occupation française et à ses incessantes tentatives de contenir la fronde des algériens épris de liberté, a conduit l'élite locale à exploiter diverses formes d'expression, dont le théâtre.