L'Algérie est appelée par les autorités suisses à jouer les médiateurs, alors que la crise diplomatique entre la Libye et la Suisse s'envenime. Genève. De notre correspondant Selon le quotidien suisse Le Matin, le président Abdelaziz Bouteflika est intervenu auprès de Mouammar Kadhafi. « Son objectif : rapprocher les points de vue entre Kadhafi et Berne afin d'éteindre l'incendie diplomatique. Alors que la Libye a cessé ses livraisons d'or noir à la Suisse et que ses ports sont fermés à nos bateaux, l'Algérie est prête à prendre le relais avec son propre brut. Les ports de Skikda et d'Arzew ont reçu des directives pour accueillir les tankers qui achemineront le pétrole vers la Suisse », écrit le journal suisse. Mieux, les Algériens sont prêts à alimenter les raffineries helvétiques via leurs pipelines qui passent par l'Italie. « Un marché de 2 milliards de dollars s'offre à l'Algérie », souligne un économiste suisse. Eric Scheidegger, directeur au Secrétariat suisse à l'économie affirme que « les Libyens se tirent une balle dans le pied. Ils perdent un marché et leur réputation. Les autres partenaires vont se demander s'ils peuvent maintenir des relations économiques avec un pays si imprévisible. » Sur le plan diplomatique, l'Algérie, dont l'ambassadeur à Berne a passé une bonne partie de la journée d'hier dans les bureaux de Micheline Calmy-Rey, ministre des Affaires étrangères, va dépêcher une personnalité à Tripoli. Elle devra apporter une lettre de la conseillère fédérale aux Libyens. « La délégation que la Suisse a envoyée en Libye n'a pas pu accéder directement à Mouammar Kadhafi. Elle n'a rencontré que des personnages de second plan », poursuit un diplomate algérien. Que dit cette lettre ? La Suisse y explique sa version des faits concernant l'arrestation d'Hannibal Kadhafi à Genève. Reste que la source diplomatique algérienne ne veut pas en dire plus pour éviter de faire capoter la médiation. En revanche, elle cite le nom de Joseph Deiss comme un des négociateurs possibles, qui a été en charge des affaires étrangères et a gardé d'excellents contacts avec le président Bouteflika et avec Kadhafi. « Je ne peux rien vous dire, nous a déclaré le Fribourgeois hier tard dans la soirée. Mais je suis effectivement en déplacement à l'étranger. » Le temps presse, les deux Suisses arrêtés samedi en Libye ont été inculpés et placés en détention provisoire. Par ailleurs, un embargo des livraisons de brut pour la Suisse a été annoncé. Les autorités libyennes accusent les deux ressortissants d'infractions sur l'immigration et le séjour. Berne s'est dit très préoccupé par leurs conditions de détention « absolument dramatiques ». Les deux ressortissants suisses, dont l'un est employé par ABB, ont été transférés en prison où ils sont détenus dans une petite cellule avec une vingtaine d'autres personnes. Mis à part l'inculpation des deux Suisses, la Libye précise ses menaces sur un autre front. La Compagnie nationale libyenne de transport maritime, dirigée par Hannibal Kadhafi, a annoncé jeudi l'arrêt prochain de ses livraisons de pétrole à la Suisse. Les compagnies nationales de transport maritime et des ports ont indiqué aussi qu'elles interdisent désormais l'entrée et le déchargement des navires battant pavillon suisse dans les ports libyens.