Comment gagner la guerre à 30 ans et perdre sa qualité d'ancien moudjahid à 74 ans ? C'est simple, il suffit de dénoncer les abus dans les délivrances d'attestations de l'ONM, l'organisation des moudjahidine. C'est ce qui est arrivé dans l'actuel maquis de Tipaza à A. Braham, qui vient d'être déchu par courrier de son statut de combattant de l'indépendance. Au-delà de savoir ce qui se passe réellement dans les obscures coulisses de l'ONM et de comprendre ce que cette organisation reproche vraiment à A. Braham, on peut affirmer que cette forme de répudiation est anormale, tant les faux moudjahidine sont nombreux et n'ont jamais été inquiétés par l'ONM, qui continue à gérer l'après-guerre comme on gère un kiosque. La question n'est pourtant pas là, même si tous ces faussaires sont rémunérés avec votre argent et vivent en général mieux que la majorité. Quelques jours après une nouvelle commémoration de l'indépendance, les jeunes Algériens peuvent à juste titre se demander comment se fait-il que 42 ans après le 5 juillet 1962 on ne sache toujours pas qui a fait la guerre et qui était caché dans le placard. Ce n'est probablement pas pour cette raison que de nouvelles émeutes de jeunes ont éclaté ces derniers jours, à Djelfa et Skikda, ou encore dans la commune au nom très révélateur de Ennechaâ, mais il est un fait que le passé, tel que (re)composé par les officiels, a une certaine incidence sur le présent. Comment expliquer à un jeune qu'il ne peut rien demander à l'Etat puisqu'il n'a ni fait la guerre ni pris sa carte du FLN ? Comment expliquer à un jeune de 2004 que ceux qui ont arraché l'indépendance ont aussi contribué après la guerre à installer une société inégalitaire et corrompue, violant le serment des jeunes de 1954 ? Comment peut-on gagner à la naissance le droit de vivre en Algérie et tout perdre à 20 ans ? La réponse est dans la question.