Dieu, qu'il est affligeant de savoir que 30 de nos honorables enseignants crèvent de faim dans les locaux du Snapap, pendant que notre éternel ministre de l'Education fait bronzette à Club des pins où sur une île paradisiaque de la Méditerranée. Affligeant oui, de savoir que les oreilles de Benbouzid n'ont pas pu capter les cris de détresse humaine lancés par ces laissés-pour-compte alors que Fred Van Leeuwen de l'internationale de l'éducation (IE) a écourté ses vacances le temps d'envoyer un message de soutien aux grévistes de la faim depuis Bruxelles ! Faudrait-il qu'il y ait mort d'homme pour que le ministre de l'Education daigne consacrer un peu de son précieux temps à ces malheureux enseignants qui ont eu la malchance de servir son secteur du temps des vaches maigres ? Est-ce une façon de traiter ces messieurs et ces dames à qui la République a confié l'éducation de milliers d'enfants des années durant ? C'est assurément une drôle de façon de remercier ces contractuels pour services rendus. Quel sentiment éprouveraient donc ces millions d'élèves en regardant le sort réservé à leurs maîtres ? On s'en doute, « El wazir » ne se pose pas ce genre de questions pas plus que ses enfants qui ont dû fréquenter une autre école où l'enseignant est élevé en haut de la hiérarchie des valeurs citoyennes. La place de l'éducateur est sans doute ailleurs que dans un petit local vide, affalé à même le sol et où il reçoit quelques bâtons de sucre de survie… C'est la triste quotidienneté de nos contractuels qui observent une grève de la faim, à huis clos et depuis un mois, sans que la générosité de la République se manifeste. Pas même la solidarité nationale de Ould Abbès si prompt à agir quand il s'agit de la monnayer politiquement. Il est vrai que, par leur action, nos enseignants incommodent la tranquillité de nos gouvernants. Benbouzid refuse obstinément de les écouter au risque de se laisser convaincre… lui l'enseignant. Relents d'arrogance C'est lui en effet qui leur a fait signer des contrats renouvelés depuis une dizaine d'années pour certains et c'est lui maintenant qui décide de rompre unilatéralement ce contrat de confiance. Mais comment, grand Dieu, a-t-il pu se convaincre de jeter en pâture un bataillon de 40 000 contractuels en les obligeant à subir un concours de recrutement – aléatoire – alors qu'ils ont acquis un savoir-faire dans ses classes ? Hypothèse d'école : si après les épreuves, 30 000 contractuels sont recalés, va-t-il les envoyer au chômage après avoir usé et abusé de leur savoir quand il avait besoin d'eux ? Il est à se demander également à quoi auront servi tous les stages de recyclage financés par l'Union européenne pour la mise à niveau de ces enseignants issus de l'ancien système de recrutement ? Le bon sens aurait voulu qu'il invite les concernés pour tenter de trouver une solution qui satisfasse et l'Etat et cette corporation. Or, cette sourde oreille dégage des relents d'arrogance qui ne seyent guère à la stature d'un responsable. La première qualité d'un ministre de l'Education est celle d'écouter pour mieux comprendre. Mais Benbouzid ne veut manifestement rien voir ni entendre. Il ne reste aux grévistes de la faim qu'à espérer que le président de la République tance son ministre en direct à la télévision pour qu'il remplisse illico son contrat moral avec les enseignants. Eh oui, s'il a été capable de réformer le « saint » baccalauréat, de rectifier les erreurs monumentales dans les manuels scolaires, de « corriger » l'hymne national et de revoir le cœfficient de certaines matières, par un simple claquement de doigts du président, alors oui, Benbouzid peut aisément mettre fin au drame humain de ces contractuels. Sinon, ils pourront toujours mourir en silence…