La rentrée politique en Algérie aura finalement un parfum plutôt sécuritaire… La lutte contre le terrorisme a fini par ravir la vedette au projet de révision de la Constitution et, partant, à la campagne en faveur d'un troisième mandat pour le président Bouteflika. Alors qu'on attendait un coup de starter comme l'a maintes fois promis un Belkhadem décidément déboussolé, voilà que Ouyahia tire un coup de sommation en annonçant un branle-bas de combat contre le terrorisme. Le chef du gouvernement a en effet enfilé, hier, l'uniforme en marge de la cérémonie d'ouverture de la session d'automne de l'APN, promettant que l'Etat va enfin sévir. Aux terroristes encore aux maquis, il signifie qu'ils n'ont que deux choix : « Se rendre ou être abattus en sanction des crimes qu'ils sont en train de commettre. » Et d'ajouter : « Nous les combattrons jusqu'au dernier ! » Voilà des déclarations qui cadrent parfaitement avec Ahmed Ouyahia l'éradicateur pur et dur des années 1990. S'agit-il d'un nouveau discours politique décliné sous forme de stratégie de reprise en main de la chose sécuritaire, parallèlement à un engagement militaire accru sur le terrain ? C'est possible si l'on rappelle la « grande offensive » contre les maquis évoquée par Ahmed Ouyahia et le DGSN Ali Tounsi, il y a quelques semaines. Le chef du gouvernement avait même conseillé aux journaux de ne pas relayer la propagande des chefs terroristes. « La presse a tout intérêt, et ce n'est pas une menace, à reprendre sa raison et à ne pas servir de tribune à des gens qui n'épargnent personne, ni les militaires, ni les gendarmes, ni les fonctionnaires, ni les journalistes et même les petits enfants », a souligné Ouyahia, faisant allusion aux entretiens accordés par d'anciens chefs terroristes à certains quotidiens nationaux. On retiendra en tout cas, via le laïus du chef du gouvernement, que le centre d'intérêt des décideurs semble avoir basculé du politique au sécuritaire. Révision de la Constitution : « Chaque chose en son temps » La révision de la Constitution pour permettre à Bouteflika de postuler à un troisième mandat ne ferait plus recette aujourd'hui. Interrogé hier par les journalistes, Ahmed Ouyahia s'en est tiré par une vague « chaque chose se fera en son temps ! ». Une réponse qui offre le confort de l'interprétation et aux partisans et aux adversaires du troisième mandat. Pour le chef du gouvernement, les priorités sont ailleurs que dans les spéculations sur le départ ou pas de Abdelaziz Bouteflika. A sept mois de l'élection présidentielle et à cinq mois de la convocation du corps électoral, Abdelaziz Bouteflika, qui devrait au préalable triturer la Constitution s'il décide de briguer un 3e mandat, ne dispose pas d'assez de temps. Il est plus logique de penser qu'il serait un lièvre et non plus un candidat à sa propre succession. A moins d'un montage politique à la soviétique qui expédierait la procédure du « kit du 3e mandat » en deux temps trois mouvements. Le fait est que même le Parlement n'a pas reçu de texte lié à l'amendement de la Constitution. Pourtant, l'ordre du jour de la session est particulièrement chargé. Les parlementaires seront appelés à débattre d'un projet de loi portant approbation de l'ordonnance définissant les conditions d'attribution de l'exploitation des terres relevant des biens de l'Etat et destinées à la réalisation de projets d'investissement. Puis ils plancheront sur un projet de loi portant régulation des conditions d'exploitation des terres agricoles relevant des biens de l'Etat et définissant les droits et devoirs des exploitants. L'APN et le Sénat examineront en outre l'ordonnance relative à la loi de finances complémentaire pour 2008 qui comporte une série de modifications introduites par le gouvernement sur les budgets sectoriels, ainsi que la loi de finances 2009 qui porte sur le budget de l'Etat dans ses volets équipement et fonctionnement et met en place d'importantes mesures de lutte contre la fraude fiscale. Les parlementaires devront par ailleurs examiner et adopter le statut particulier des fonctionnaires du Parlement. Au total, ce seront une bonne vingtaine de projets de loi que les députés et les sénateurs devraient adopter durant cette session d'automne, que certains pensaient être celle de l'onction parlementaire pour la « ouhda thalitha ».