Le projet d'ordonnance portant loi de finances complémentaire 2008 adopté hier par l'Apn avait suscité, avant son adoption hier, de vives controverses et réprobations de la part de certains députés et de formations politiques. Le MSP, un des trois partis de l'Alliance présidentielle, soufflant comme à son habitude le chaud et le froid avait joint sa voix à celle des formations de l'opposition qui avaient vu dans cet usage jugé immodéré du recours aux ordonnances par le président de la République pour faire passer des mesures impopulaires sur lesquelles il est difficile de trouver un consensus une espèce de coup de force, de putsch constitutionnel. Contre toute attente – mais est-ce réellement une surprise ? – lors du vote, ce parti a approuvé, sans sourciller, le projet d'ordonnance en question. Le texte qui divise les députés comporte une série de nouvelles taxes introduites dans la loi de finances complémentaire ; taxes qui vont saigner un peu plus encore le porte-monnaie du citoyen déjà en butte au cycle infernal de l'augmentation du coût de la vie doublé d'une pression fiscale qui prend des allures de racket institutionnalisé. Hier, lors de l'opération de vote et au regard du vent de contestation qui avait soufflé auparavant dans les coulisses de l'Apn, certains observateurs n'avaient pas écarté la perspective d'une offensive parlementaire qui pourrait se traduire non pas par un rejet du projet d'ordonnance, mais par un vote sanction sous la forme d'un vote négatif, ou à tout le moins de l'abstention de la part des députés qui avaient ouvertement et fortement critiqué l'initiative du président de la République. Dans les parlements des pays démocratiques, l'Exécutif est toujours attendu de pied ferme par les parlementaires, y compris dans le camp de la majorité parlementaire, sur la question sensible des taxes, source d'enjeux sociaux, économiques, voire aussi et surtout politique. La question de l'existence et du respect de l'éthique politique se pose de manière dramatique et désespérante au niveau de la classe politique en Algérie. Sinon comment expliquer l'attitude des députés du MSP, du FNA et d'autres formations politiques qui avaient pris la tête de la contestation avant de se rebiffer et de rentrer dans les rangs en votant allégrement les augmentations des taxes et des salaires des parlementaires soumis hier à l'approbation de l'Apn ? Un homme politique, un parti politique qui se respecte se doit, pour être crédible, d'avoir des principes, une éthique qui passe nécessairement par la mise en conformité, en tout lieu et en toute circonstance, de ses actes avec ses déclarations et professions de foi. Avec un salaire de 300 000 DA que se sont octroyés les parlementaires à la faveur de l'ordonnance sur les augmentations des salaires des députés et sénateurs que l'Apn a approuvée hier à l'unanimité moins le Parti des travailleurs qui a voté contre, les députés pouvaient-ils mesurer les retombées sur le citoyen de la pression fiscale qu'ils viennent de cautionner ?