Quelques changements ont été opérés dans les rangs de l'ANP ces derniers jours. Ils interviennent alors que tout le monde s'attendait à un large mouvement, notamment dans les rangs de la 1re Région militaire où se concentrent les attentats kamikazes. Si les moyens financiers accordés par l'Etat à l'ANP progressent chaque année, la guerre contre le terrorisme s'essouffle, après 18 ans d'expérience. Des changements au niveau de l'institution militaire viennent d'être annoncés par un décret présidentiel publié dans le dernier Journal officiel. Ainsi, il a été mis fin aux fonctions du général Cherif Zerrad, adjoint au commandant de la 3e Région militaire (depuis le 15 août dernier), pour se voir confier le département emploi et préparation au sein de l'état-major de l'ANP. Une importante promotion, diront des sources bien informées, qui n'est pas passée inaperçue. Le même décret a annoncé la nomination du colonel Omar Kerboua en tant que chef d'état-major de la 6e Région militaire qui englobe les wilayas du Sud-Ouest. Ces légers changements interviennent après ceux opérés au mois de juillet dernier qui ont touché plusieurs départements de l'ANP. Defaillances dans le dispositif Ainsi, le général Abdelhamid Ghriss, qui était à la tête de la direction centrale du matériel, a été nommé au poste de chef de département organisation logistique de l'état-major de l'ANP, cédant son poste de responsable de la direction centrale du matériel au général Ali Akroun, alors que le département approvisionnement a été confié au colonel Mustapha Debbi. En outre, il a été procédé à la nomination du général Abdelghani Hamel au poste de commandant de la Garde républicaine, après un intérim de moins de deux mois assuré par le colonel Naim Hakiki, et ce, à la suite de la suspension du général Layachi Grid de son poste pour des raisons que l'opinion publique ignore toujours. D'après de nombreuses sources proches de l'institution militaire, des changements beaucoup plus importants étaient attendus, notamment après la cascade d'attentats suicide qui ont marqué l'été 2008, notamment au niveau de la 1re Région militaire, où le dispositif sécuritaire semble connaître des failles. Il est vrai que le risque zéro en matière de lutte contre le terrorisme n'existe nulle part dans le monde. Néanmoins, une série d'actions armées aussi spectaculaires les unes que les autres, commises dans un périmètre assez réduit, laisse penser que quelque part les terroristes ont profité d'une défaillance dans le dispositif. Il est quand même intrigant de constater que la lutte antiterroriste était plus positive lorsque les groupes armés étaient plus nombreux et répartis sur une bonne partie du territoire national. Aujourd'hui, il est clairement établi que le GSPC mène les opérations kamikazes à partir de son QG situé dans les montagnes de Kabylie, à cheval entre Bouira, Tizi Ouzou, Béjaïa et Boumerdès. Si les trois premières wilayas constituent la zone de repli et de commandement des terroristes, la quatrième constitue pour ces derniers le réservoir de recrutement et de financement, d'où le nombre important de commerçants et d'agriculteurs rackettés. La stratégie du GSPC étant de fonctionner selon le système de cloisonnement. Cela rappelle la stratégie du GIA, à partir de 1995 et surtout durant l'été 1997, lorsque les phalanges de la mort ont multiplié les attentats aux voitures piégées à Alger. Renseignement, confiance et collaboration Les véhicules étaient bourrés d'explosifs dans la zone de Ouled Allel, à Sidi Moussa, au sud-est de la capitale, avant d'être acheminés sur Alger. Il a fallu que les troupes de l'ANP investissent le quartier de Ouled Allel, après un siège qui a duré plus d'un mois, pour que toute la logistique du GIA soit neutralisée et bon nombre de ses chefs abattus. Les quelques rescapés de ces opérations ont fini par être rattrapés par les forces de sécurité après quelques années de cabale dans les monts de Chréa. Aujourd'hui, tout indique que le « commandement » du GSPC n'a jamais quitté les monts de Sidi Ali Bounab ou de Yakouren et que les véhicules conduits par les kamikazes sont tous venus de ces régions. La question qui reste posée est de savoir pourquoi les forces de sécurité ont encore du mal à maîtriser cette zone, pourtant de loin moins difficile que les monts de Chréa, de Bel Abbès, de Aïn Nser, à Miliana, ou de Mascara, où le GIA sévissait il y a à peine quelques années. Si certaines sources affirment que le renseignement est la colonne vertébrale de la contre-guérilla, d'autres estiment que la nouvelle stratégie du GSPC impose une nouvelle manière de lutte contre le terrorisme, plus professionnelle donc plus coûteuse. Ce qui explique la hausse continuelle du budget consacré par l'Etat à l'armée. Ainsi, la Grande Muette, qui a bénéficié de 2,5 milliards de dollars en 2008, voit cette enveloppe augmenter de 10% en 2009. Une hausse, explique-t-on dans le projet de loi de finances 2009, qui lui permettra de financer l'installation d'unités d'armement et de matériel militaire, mais aussi d'acheter 23 000 véhicules militaires auprès de la SNVI. Equiper l'armée pour venir à bout du terrorisme reste insuffisant, si des moyens colossaux ne sont pas mis en place pour rétablir la confiance entre les services de sécurité et les citoyens et, par delà, encourager et surtout rassurer ces derniers pour une collaboration et une implication dans la lutte contre le terrorisme. Tous les spécialistes s'accordent à dire que le renseignement est le nerf de la guerre contre le terrorisme. Les derniers attentats ont montré que quelque part le renseignement a failli puisque à ce jour, les services de sécurité n'ont pas réussi à mettre la main sur les laboratoires et les ateliers où se préparent les explosifs, seul moyen qui a permis à de nombreux pays d'anticiper sur les événements et de démanteler les réseaux de kamikazes.