Constitutionalisée comme langue nationale et introduite dans le système éducatif depuis maintenant plus de douze ans, Tamazight peine à trouver toute sa place à l'école. Les enseignants de tamazight estiment que les circulaires ministérielles dont cette discipline scolaire a fait l'objet sont sans application dans la wilaya de Béjaïa. L'association qui les regroupe, TIDMI, estime, dans une déclaration-appel signé par son président El Hafid Hadjou, qu'elle ne se doit pas de rester « spectatrice » devant « le spectacle désolant qui s'offre à ses yeux ». Pour toutes ses raisons et à son appel, les enseignants de tamazight s'apprêtent à descendre une nouvelle fois dans la rue aujourd'hui lundi pour observer un sit-in devant le siège de la direction de l'Education dont la première responsable n'a pas donné suite à leurs demandes d'audience répétées via TIDMI. C'est ce que relève l'association dans une déclaration qui a sanctionné les travaux de sa dernière AG tenue à Akbou le 2 novembre dernier et qui a décidé de cette action de rue pour porter une somme de revendications. à commencer par les dysfonctionnements qui reviennent chaque année dans la distribution du manuel scolaire de tamazight qui répond à un circuit différent de celui avec lequel se fait la distribution des autres manuels. « La solution préconisée pour son acquisition découragerait le plus volontaire des chefs d'établissements » écrit TIDMI. « Parfois, ce sont ces derniers qui sont directement responsables des déficits » ajoute l'association qui ne s'arrête pas à cette seule accusation. Pour n'avoir pas trouvé la place qui lui sied dans les emplois du temps dans beaucoup d'établissements scolaires, tamazight est dévalorisée dans son statut de « matière de divertissement lorsqu'elle n'est pas considérée comme un dérangement qui ne doit pas être programmé la matinée. Pour certains responsables, elle constitue juste un bouche trou » accusent les animateurs de TIDMI. Exaspérée, l'association est en voie de finaliser un rapport pour dénoncer « tous les responsables coupables de ce délit ». En attendant, elle dénonce l'absence de stratégie dans la généralisation de tamazight pour laquelle l'administration semble ménager l'effort d'ouvrir suffisamment de postes budgétaires : « dix postes seulement cette année alors que l'université a formé des centaines de jeunes, directement opérationnels ». TIDMI revendique un renforcement en personnel pédagogique pour Béjaïa ou tout au moins un alignement sur la dotation qui est celle de la wilaya de Tizi Ouzou qui a bénéficié d'une centaine de nouveaux enseignants recrutés en plus de trois postes d'inspecteurs. À Béjaïa, la deuxième circonscription pédagogique qui a été créée, et maintenue à la force d'une mobilisation des enseignants, est toujours sans inspecteur. Et rien n'est encore prévu, en ce sens, au programme. « Notre confiance vient, encore une fois, d'être contrariée par le ministère de l'Education nationale qui n'a ouvert aucun poste d'inspecteur pour Béjaïa » déclare TIDMI. « L'association est convaincue que la manière dont l'enseignement de tamazight est géré dans la wilaya de Béjaïa ne répond à aucune logique pédagogique ». Elle en veut pour preuve l'orientation des élèves qui ont étudié cette matière dans le primaire et le moyen vers des établissements des paliers supérieurs où cette discipline scolaire n'est pas assurée. Une rupture que l'on déplore tout comme la mise à l'écart des représentants des enseignants de tamazight de la gestion du dossier de l'enseignement de cette langue. Des enseignants qui s'engagent de la sorte dans la lutte « pour le triomphe des droits élémentaires de cette langue à l'école ». À la lumière de ce constat, « tamazight di likul » (tamazight à l'école) semble être un acquis fragile.