Fragmentés et isolés, déçus par les organisations et les partis, les leaders et les rassembleurs, par la capacité de la vie réelle à créer les facteurs de changement et les éléments naturels de la discorde, les Algérien(ne)s sont nombreux à se retrouver sur les réseaux électroniques. On peut comprendre, la liberté de rassemblement et de manifestation étant liée à la loi du bâton et à l'humeur de Yazid Zerhouni, quoi de plus normal que d'essayer d'être nombreux et seul, avec un PC et une connexion internet ? Les espaces de rencontre étant aussi peu nombreux qu'un magasin ouvert le vendredi à 13h et la constitution de groupes de plus de trois personnes étant soumise à l'accord du général de région, pourquoi ne pas utiliser les espaces virtuels pour protester ? C'est ainsi que sur FaceBook, pour ne citer que le plus populaire des réseaux d'échange, on trouve de tout, des militants et des amis, des pervers et des menteurs, des citoyens et de charmantes filles, bref, à peu près tout ce qu'il y a dans la vraie vie. On y trouve aussi des pétitions comme dans la vie, la vraie, et surtout des appels à former des groupes comme « Non au troisième mandat », « Contre la médiocrité et pour la poésie », ou le délicieux « Vous aussi vous voulez adopter une jeune Suédoise de 20 ans ? » La limite de ce genre de structure est liée à sa nature : où peut bien aller un appel à protester contre la dictature qui s'installe ? Nulle part, il suffit d'un délestage de Sonelgaz pour que tout s'arrête. L'Occident, qui a inventé FaceBook, a d'abord fini de bâtir une démocratie participative avant de se trouver une nouvelle raison d'être dans les réseaux électroniques. L'Algérie a commencé par la fin et on attend toujours le début. Mais peut-être. Et si chaque groupe sur FaceBook kidnappait un député ? Difficile, les députés ne sont pas sur FaceBook. Ils sont en vacances.