L'ambassadeur d'Algérie en France, Missoum Sbih, a poursuivi, la semaine dernière à Lyon, ses rencontres avec les élites algériennes présentes dans l'Hexagone. Représentants d'associations diverses, avocats, professeurs d'université, médecins, élus d'origine algérienne dans les instances françaises (communes, département, région) ont répondu présents à l'invitation à un déjeuner-débat fort instructif. Le représentant de l'Etat algérien continue son tour de France des circonscriptions consulaires. Après Marseille, Strasbourg et Lille, l'itinéraire qui l'a conduit d'un consulat général à l'autre devrait s'achever d'ici à l'été 2009 par une rencontre nationale à Paris. A Lyon, il s'agissait pour Missoum Sbih d'avoir en toute convivialité un échange direct avec la communauté algérienne afin de « pouvoir poser un certain nombre de questions sur les relations bilatérales, la situation en Algérie et la situation de nos compatriotes ». L'ambassadeur a aussi indiqué qu'il voulait une « discussion ouverte, sans restriction et sans limite », affirmant qu'il était « surtout venu écouter ». Effectivement, de l'écoute il y en eu de sa part, mais il était aussi là pour faire passer des messages dont le plus décisif fut distillé dès la première salve d'interventions de M. Sbih, entre le dessert et le café. Le thème concernait la coopération avec l'Algérie. M. Sbih est parti du principe que « la coopération existe déjà plus qu'on ne peut l'imaginer en dehors des administrations nationales, française ou algérienne » par les relations amicales entre personnes des deux rives de la mer. L'ambassadeur souligna les difficultés dans l'encadrement universitaire en Algérie, malgré un quart du budget consacré à l'éducation. La question cruciale qu'il posa concerne « les mécanismes à mettre en place pour aider les énergies algériennes » à apporter leur concours au pays. La réponse de l'ambassadeur à cette équation fut clairement énoncée : « Organisez-vous par métier, au niveau des circonscriptions consulaires, puis dans une coordination nationale, et venez me voir à l'ambassade munis d'un mémorandum. Fort de cette volonté organisée, j'interviens alors dans les ministères concernés à Alger ». Sachant les doutes qu'il éveillait dans la docte assemblée, l'ambassadeur précisa : « Au-delà des initiatives individuelles, voilà la formule que je suggère, je sais qu'elle n'est pas facile, mais je crois que vous êtes en mesure de surmonter cette difficulté dans la mesure où je sais que vous voulez apporter votre concours à l'Algérie et que ce recours vers vous est attendu en Algérie. » A une question sur les engagements passés et les belles paroles des ambassadeurs successifs ces dernières années, M. Sbih, en poste depuis 2006, devait balayer cette critique : « Je ne suis pas responsable des propos tenus par le passé. Moi, je pense avancer avec une proposition claire, justement pour aller au-delà des promesses et des paroles non tenues. » Et il a insisté sur la démarche proposée : « Il n'y a pas d'autres moyens pratiques. Je sais bien que cela ne veut pas dire que tout le monde va être unanime. L'essentiel est qu'on avance, qu'on déclenche un mécanisme concret. » A voir. D'autres sujets furent débattus, jusqu'à fort tard dans la nuit. La question des visas afin que les familles puissent venir rencontrer les proches en France fut largement explicitée par M. Sbih. Le sujet épineux de l'entrepreneuriat algérien en Algérie avec ses difficultés vécues fut évoqué par un représentant de l'Association des entrepreneurs algériens en France. Un thème vite traité par l'ambassadeur dont on peut résumer ainsi la réponse : « Les entreprises doivent agir par elles-mêmes, on le dit aussi aux entreprises étrangères qui veulent investir au pays. » Mais par effet boomerang, des représentants de la deuxième, voire troisième génération, ont relevé que l'Algérie ne faisait pas assez pour ses ressortissants en France, face à leurs difficultés et à leur intégration sans retour en Algérie, jusqu'à poser la question des carrés musulmans dans les cimetières français qui ne sont pourtant pas du ressort algérien. Mais surtout, si tous les intervenants louèrent l'initiative de l'ambassadeur de cette rencontre, ils renvoyèrent un autre vœu : « Il n'y a pas que d'ici qu'on peut apporter là-bas. L'Algérie aussi peut nous apporter et il y a une attente. Il y a une place en France pour l'Algérie qui peut nous apporter une fraîcheur, une audace populaire, un esprit d'initiative qui mérite d'être visible et pourrait nous inspirer. »