Le président Bouteflika a choisi son conseiller personnel pour gérer et suivre les dossiers sensibles entre les deux pays. Le ministère des Affaires étrangères a confirmé, dans un communiqué rendu public avant-hier, la nouvelle, qui n'était jusque-là qu'une simple rumeur, de la nomination de Missoum Sbih, 71 ans, au poste d'ambassadeur d'Algérie en France. Le département de Bedjaoui a annoncé avoir reçu la réponse positive à la demande d'agrément introduite il y a quelques jours : “Le gouvernement français a donné son agrément à la nomination de M. Missoum Sbih en qualité d'ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire, haut représentant de la République algérienne démocratique et populaire auprès de la République française”. Même si la date des passations de consignes entre les deux ambassadeurs n'est pas précisée, on croit savoir de sources gouvernementales que Missoum Sbih, à l'image des nouveaux représentants diplomatiques de l'Algérie, sera installé dans ses fonctions durant la première semaine d'octobre prochain. Proche parmi les proches du chef de l'Etat, Missoum Sbih, conseiller à la présidence de la République depuis avril 1999, a eu à gérer des dossiers sensibles que lui a confié Bouteflika depuis son accession au pouvoir, il y a six ans. Il y a quelques mois, celui qui représentera mais surtout défendra les intérêts de l'Algérie dans l'Hexagone a élaboré un rapport sur la restructuration de la première institution du pays sur demande “express” du chef de l'Etat. Ce travail a été réalisé après une série d'auditions des différents cadres et directeurs exerçant dans le palais d'El-Mouradia. Le nouvel ambassadeur d'Algérie à Paris a déjà eu à présider la commission de la réforme des missions et structures de l'Etat qui a été installée par Bouteflika en 2000. Après plus de neuf mois de travaux, cette structure a élaboré un rapport détaillé comportant, outre le diagnostic, des propositions et solutions à préconiser, remis au premier magistrat du pays durant la même année. Spécialiste des affaires constitutionnelles et diplomate expérimenté, Sbih, discret et peu loquace, est l'un des hommes de confiance et proche collaborateur du chef de l'Etat à la lumière des dossiers et missions qui lui ont été confiés jusque-là. Sa nouvelle nomination vient confirmer la place que l'homme tient dans l'échiquier du premier magistrat du pays. Sur la scène diplomatique, Missoum Sbih a déjà occupé des postes éminemment stratégiques : secrétaire général du ministère des Affaires étrangères dans les années 70, soit au moment où Bouteflika était chef de la diplomatie, et plusieurs fois ambassadeur dans des capitales de premier plan à l'image de Ottawa (Canada) et Bruxelles (Belgique) durant les années 90. L'homme avait assumé la charge de représenter le pays en 1994 auprès de l'Union européenne au moment où l'Algérie était en mauvaise posture diplomatique et carrément isolée sur la scène internationale. Après des années passées à la Présidence, Sbih, professeur des relations internationales, revient à son terrain de prédilection pour diriger l'ambassade d'Algérie à Paris, une des plus importantes chancelleries algériennes à l'étranger. La nomination de Sbih à ce poste intervient au moment où les relations entre l'Algérie et la France connaissent un ralentissement dans la cadence des visites bilatérales. Un “froid diplomatique” provoqué par l'adoption par le Parlement français d'un amendement, le fameux article 4 en l'occurrence, introduit à la loi du 23 février 2005 et qui glorifie la présence coloniale en Afrique du Nord. Ce texte a soulevé le courroux du président Bouteflika qui l'a d'ailleurs dénoncé vigoureusement et à plusieurs reprises. L'arrivée de Sbih au poste à Paris intervient au moment où les responsables des deux pays s'attellent à finaliser le traité d'amitié sur lequel se sont engagés les deux présidents, Bouteflika et Chirac, en avril 2004. Les deux chefs d'Etats continuent à suivre “au plus haut niveau et personnellement les relations entre les deux pays”, assure une source gouvernementale. En choisissant de nommer son conseiller comme ambassadeur à Paris, le président Bouteflika confirme cette option qui consiste pour les deux chef d'Etat, de confier la gestion des relations entre les deux pays à leurs proches collaborateurs, tous deux ex-SG des ministères des Affaires étrangères de leurs pays respectifs. Sbih, qui prendra certainement ses fonctions en octobre prochain, aura à gérer le dossier sensible du traité d'amitié sur lequel fondent tous les espoirs des deux rives de la Méditerranée. Un texte qui pourrait être celui de la refondation des relations entre les deux pays sur de nouvelles bases. Il aura également à suivre la question de l'immigration et la communauté algérienne établie en France qui reste la plus importante communauté étrangère vivant dans l'Hexagone. M. A. O.