1. Physique : L'Univers dans une machine C'est un des événements majeurs de l'année mais aussi du siècle, la plus grande expérience que l'homme n'ait jamais entreprise. Le grand collisionneur de hadrons (LHC), un accélérateur de particules européen, est mis en opération le 10 septembre dernier, à la frontière franco-suisse. Les physiciens espèrent apporter des éléments de réponse à plusieurs questions concernant la physique des particules (le boson de Higgs, d'où vient la masse des particules élémentaires) et la cosmologie (comprendre les conditions de la formation de l'Univers il y a 13,7 milliards d'années, chercher l'existence de dimensions supplémentaires, résoudre l'énigme de la matière noire de l'Univers). Son coût : 4 milliards d'euros. Données générées : 15 petabytes par an, soit l'équivalent d'un CD-ROM chaque seconde, qui seront traitées par un réseau informatique mondial de 50 000 ordinateurs et autant de physiciens et informaticiens. Le chef de file du projet LHC du CERN, Lyn Evans, vient d'être élu par la prestigieuse revue Nature comme étant le « newsmaker » (faiseur de l'information) de l'année 2008. 2. Astrophysique : Mars livre ses secrets rouges La planète Mars a marqué l'astrophysique de 2008 pour deux percées scientifiques. La première est l'atterrissage le 25 mai dernier sur le sol martien de la sonde Phoenix (500 kg) à proximité de la calotte polaire du nord, révélant la présence de glace, synonyme de vie probable. Autre révélation : le sol est basique (et non acide), une trouvaille qui a permis de résoudre une énigme scientifique vieille de 30 ans à propos de la dichotomie en les hémisphères nord et sud de Mars. L'étude américaine, qui a fait la une de Nature de 26 juin dernier, a fait part d'un astroïde géant qui se serait écrasé sur Mars, rendant compte de l'asymétrie des deux hémisphères martiens. 3. Génomique : premier chromosome créé en labo Comment révolutionner la biologie ? Décembre 2008, l'Institut J. Craig Venter pense avoir trouvé la solution, en franchissant une nouvelle ligne pour la création d'une vie artificielle : Mycoplasma laboratorium. Les généticiens américains sous l'égide de l'entreprenant Craig Venter ont réussi à assembler en une seule étape les 25 fragments du génome de la bactérie Mycoplasma genitalium. C'est une perfection importante de la méthode qui leur avait permis, en janvier dernier, (publiée dans Science) de synthétiser dans un laboratoire le seul chromosome de cette bactérie, ayant nécessité plusieurs années de labeur mais aussi de difficultés techniques dans la bactérie hôte Escherichia Coli. M. genitalium possède le génome le plus petit (582 970 paires de bases, autant dire 5000 fois moins que celui de l'homme) avec seulement 580 gènes comparativement aux 30 000 de l'homme. 4. Paléontologie : ressusciter le mammouth Le décryptage du génome du mammouth laineux Mammuthus primigenius, une espèce proche des éléphants d'Afrique éteinte il y 20 000 ans, est une vrai prouesse. La génération par une équipe américano-russe d'une séquence de 3.3 milliards de bases (80 % de la séquence) de ce mammouth de la Sibérie a été faite à partir de poils mais non des os. Il en ressort de l'étude, publiée dans Nature du 30 novembre dernier, que le taux de divergence entre le mammouth et l'éléphant africain est approximativement de 2 millions d'années. Aussi, la diversité génétique est tellement faible que cela aurait rendu ces mammouths très susceptibles aux maladies et changements climatiques. L'intérêt de tels séquençages des génomes d'espèces disparues est de révéler des différences de populations non détectables à partir des banques des fossiles, voire même de découvrir des facteurs génétiques rendant compte de l'extinction massive des espèces. L'autre rêve fou est de pouvoir un jour ressusciter le mammouth en clonant son ADN génomique complet dans son parent vivant qu'est l'éléphant. 5. Biologie moléculaire : LUCA, l'ancêtre commun de la vie sur Terre Une vraie percée scientifique de fin d'année : des chercheurs français des universités de Lyon et de Montpellier ont rapporté dans Nature du 19 décembre dernier que le microorganisme LUCA (Last Universal Common Ancestor) serait le dernier ancêtre universel commun de la vie sur Terre, ayant vécu il y a de cela 3,8 milliards d'années. On admettait que LUCA était un organisme hyperthermophile, comme ces êtres étranges vivant actuellement le long des profondes dorsales océaniques à 90° C. Mais totale surprise : il s'avère que LUCA avait vécu plutôt dans un climat de -50 °C. Des analyses ont démontré, donc, que LUCA serait le tronc de l'arbre de la vie ayant bifurqué en différents êtres vivants ultérieurs. 6. Chimie : révolutionner l'énergie solaire L'utilisation de l'énergie solaire à grande échelle nécessite son stockage. Mais comment scinder l'eau en oxygène et en hydrogène à bas prix (car le catalyseur largement utilisé jusqu'alors est l'onéreux platine), sous des conditions simples, de telle sorte que les gaz puissent être stockés comme carburants lors des journées non ensoleillées ? Des chimistes du Massachusetts Institute of Technology ont résolu un problème fondamental qui gênait la génération de l'énergie solaire, en trouvant un catalyseur qui utilise des métaux abondants et moins chers, le cobalt et le phosphore, qui plus est, travaillant dans des conditions de pH neutre pour la libération de l'oxygène. Le système développé mimant le principe du stockage de l'énergie des plantes lors de la photosynthèse, et qui a été publié dans Science Express du 21 juillet dernier, n'est pas seulement moins cher que le platine mais aussi constitue une nette amélioration de la photosynthèse. Le nouveau catalyseur va rendre l'utilisation de l'énergie solaire une pratique à la portée de tous, comme énergie alternative et renouvelable. 7. Géologie : la plus veille roche de la Terre Agées de 4,28 milliards d'années, les plus vieilles roches découvertes et connues sous le nom de « faux-amphobolites », seraient les reliques de la première croûte terrestre primordiale formée. La découverte est faite par des géologues de l'Université de McGill dans la baie de Hudson au nord du Québec (Canada) et rapportée dans Science le 26 septembre dernier : elle ouvre la voie pour percer davantage les secrets des premiers jours de la Terre. Les géologues ont maintenant les éléments qui leur permettent d'explorer quand et comment la vie a commencé. 8. Astronomie : premier cliché direct d'un système extrasolaire. Les premières prises de photos d'un autre système solaire jettent les bases d'une nouvelle ère de l'astronomie. Les images infrarouges montrent une famille de trois mondes géants en orbitant une jeune étoile massive et chaude (HR 8799) dans la constellation de Pegasus, à 130 années-lumière de la planète Terre. Dans le futur, les astronomes aspirent à révéler l'existence d'une vie sur des planètes comme la Terre. Depuis 1990, il y a eu détection de plus de 200 systèmes extrasolaires, mais les images obtenues étaient celles de planètes orbitant tout proche de leurs étoiles, soit 5 Unités Astronomiques (1 UA= 149 millions de km, la distance entre le Soleil et la Terre). Tandis que les nouvelles géantes planètes sont à 25, 40 et 70 UA de leurs systèmes solaires. Les images sont réalisées par l'Observatoire Gemini. Les travaux ont été valorisés dans Science Express du 13 novembre dernier. 9. Innovation : la technologie multi-touch à bas prix Les écrans « multi-touch » (à contact multiples) sont sur le devant de la scène des interfaces hommes-machines. En effet, leur utilisation par Apple et les démonstrations par Microsoft des appareils de salon de type « Surface » ont montré les nombreuses innovations possibles dans l'univers des logiciels. En fait, les écrans à contacts multiples sont des écrans qui détectent la présence des doigts ou des objets proches de leur surface. Contrairement aux écrans tactiles classiques, ils peuvent détecter plusieurs entrées, d'où leur nom. Ainsi, on peut déplacer, déformer, modifier ou agrandir des objets virtuels de façon plus intuitive qu'avec un clavier ou une souris. 10. Math : problème résolu 140 ans après Un problème ayant défait les mathématiciens durant 140 ans a été résolu en mars dernier par un chercheur anglais de l'Imperial College de Londres. Le professeur Darren Crowdy a fait une percée dans le domaine connu sous le nom de « cartographie conforme », un théorème utilisé pour traduire l'information à partir d'une forme compliquée en une forme circulaire simple, facile à analyser. L'outil théorique se trouve des applications dans la modélisation des ailes en aéronautique et en neurosciences pour visualiser la structure compliquée de la matière grise du cerveau humain. La formule de Schwarz-Christoffel avait été développée au milieu du XIXe siècle par les deux mathématiciens éponymes, mais contenait une carence dans la mesure où elle marchait seulement pour des formes dépourvues de trous ou d'irrégularités. Crowdy a fait des ajouts à la fameuse formule, la rendant ainsi utilisable pour les formes compliquées. Le sésame de la formule a été publié dans le périodique Mathematical Proceedings of the Cambridge Philosophical Society.