Alors que les besoins pour 2017 étaient estimés à 570 milliards de dinars, les tirages de monnaie se sont chiffrés à 2185 milliards de dinars au 31 décembre 2017 avant que la valeur de la masse créée ne grimpe à 3585 milliards de dinars au 31 mars 2018. La planche à billets carbure à plein régime ! Le montant des tirages effectués par la Banque d'Algérie au 31 mars dernier s'élève à 3585 milliards de dinars. Les projections de départ sont ainsi nettement dépassées, raison pour laquelle les économistes et les institutions de Bretton Woods sont opposés au dispositif dit de financement non conventionnel, proposé en septembre 2017 au vote des deux Chambres du Parlement. L'Exécutif jurait alors ses grands dieux qu'il ne s'agissait que d'une option provisoire et que les besoins de financement étaient clairement définis. Le ministre des Finances, Abderrahmane Raouia, avait évalué alors les besoins de financement à 570 milliards de dinars pour 2017, à 1815 milliards de dinars pour 2018 et à 580 milliards de dinars pour 2019. Cependant, les situations mensuelles communiquées par la Banque d'Algérie, publiées au Journal officiel (JO), font état d'un usage pour le moins excessif de la planche à billets. Alors que les besoins pour 2017 étaient estimés à 570 milliards de dinars, les tirages de monnaie se sont chiffrés à 2185 milliards de dinars au 31 décembre 2017 avant que la valeur de la masse créée ne grimpe à 3585 milliards de dinars au 31 mars 2018. Pour l'ensemble de l'exercice en cours, les besoins de financement par le moyen de la planche à billets étaient estimés à 1815 milliards de dinars. En un seul trimestre, la Banque d'Algérie a tiré 1400 milliards de dinars. La lecture des situations mensuelles de la Banque centrale, publiées dans le JO, montre des contrastes saisissants entre les prévisions de départ et les montants réels des tirages. Une situation préoccupante, alors que nombre d'économistes, voire d'institutions financières multilatérales, appellent à la retenue et à la relance des réformes structurelles. Les 3585 milliards de dinars ont été tirés, rappelons-le, dans le cadre de l'article 45 bis de la loi relative à la monnaie et au crédit de 2003 modifiée et complétée en octobre 2017. L'article en question stipule que «la Banque Algérie procède, à titre exceptionnel et durant une période de cinq années, à l'achat directement auprès du Trésor, de titres émis par celui-ci, à l'effet de participer, notamment à la couverture des besoins de financement du Trésor, au financement de la dette publique interne et au financement du Fonds national d'investissement (FNI).» En outre, l'article 45 bis note que «ce dispositif est mis en œuvre pour accompagner la réalisation d'un programme de réformes structurelles économiques et budgétaires devant aboutir, au plus tard, à l'issue de la période susvisée, notamment, au rétablissement des équilibres de la trésorerie de l'Etat et de l'équilibre de la balance des paiements». Les institutions de Bretton Woods ont alerté maintes fois sur le risque d'un retour de manivelle si le gouvernement venait à recourir exagérément à la planche à billets. Dans son plus récent rapport d'appréciation sur l'évolution de l'économie algérienne, diffusé la semaine dernière, le Fonds monétaire international (FMI) suggère «l'arrêt du financement monétaire dès cette année», même s'il «note que le gouvernement reste engagé dans son plan de consolidation budgétaire qu'il compte reprendre dès 2019 pour rétablir l'équilibre extérieur et budgétaire dans les délais». «Le gouvernement est convaincu que cette stratégie de financement», allusion faite à la planche à billets, «est moins risquée que le recours aux emprunts extérieurs», rapporte le FMI dans son dernier rapport sanctionnant la visite de ses experts en Algérie au titre de l'article 4 de ses statuts. Cependant, au vu des quantités d'argent créées par la Banque d'Algérie, l'effort de stérilisation des liquidités injectées risque de montrer rapidement ses limites. Le montant des tirages risque de grimper davantage compte tenu du poids de la dette interne et des besoins de financement. Selon des indiscrétions, le gouvernement se prépare à se retirer progressivement de cette option de financement au profit d'emprunts extérieurs qu'il compte négocier dès le second semestre de 2019.