La presse israélienne a concentré ses derniers commentaires politiques sur les conséquences et les risques de l'agression contre la bande de Ghaza. « Ceux d'entre les Israéliens qui avaient manifesté contre les massacres de Sabra et Chatila en 1982 et qui avaient fait tomber Sharon manifesteront une nouvelle fois », écrit l'écrivain et journaliste Uri Avnery dans le quotidien Maariv. « En réalité, les massacres de Sabra et Chatila sont en train de se reproduire aujourd'hui dans les ruelles de Ghaza, lorsque des civils désarmés sont écrasés par l'aviation, les canons, les chars et les navires, mais le public ne voit pas cela parce que les médias sont embrigadés et orientés », écrit celui qui a fondé le mouvement Bloc de la paix. Dans le quotidien Haaretz, une tribune est ouverte à Gedeon Levy, militant israélien des droits de l'homme : « Au moment où nos propagandistes nationalistes expliquent – avec des arguments stupides comme d'habitude – sur toutes les chaînes de télévision que Hamas est responsable de la mort d'enfants, un Palestinien qui venait de perdre ses enfants criait en hébreux à l'entrée de l'hôpital de Ghaza : tout cela pour des élections ! », tout en montrant deux corps d'enfants criblés de balles. « Hier encore, notre gouvernement ne savait pas s'il devait miser sur une nouvelle phase avec son lot de conséquences connues d'avance, c'est-à-dire davantage de victimes innocentes, ou arrêter une des guerres les plus sauvages et les plus injustifiées de l'histoire d'Israël. » Selon plusieurs commentateurs israéliens, cette agression n'est pas sans relation avec les enjeux politiciens internes en Israël. L'ancien chef d'état-major de l'armée israélienne, Moshé Yaalon, a exprimé son inquiétude au Jérusalem Post quant aux décisions prises par Olmert, Barak et Livni au cours de l'opération militaire à Ghaza, il a considéré que « certaines positions étaient prises à la lumière de la campagne politique ». Une campagne électorale en pleine crise gouvernementale où chaque parti, le Likoud de Netanyahu, Kadima de Livni et d'Olmert et le Parti des travailleurs de Barak tentent de glaner les dividendes du carnage contre les populations de Ghaza. C'est peut-être pour cela que Haaretz a rapporté dans son édition de jeudi qu'un « profond désaccord existait entre Olmert et Barak, d'une part, et Livni de l'autre, sur la manière d'y mettre fin ». Toujours selon Haaretz, « Olmert et Barak sont favorables à l'obtention d'un accord, par le biais des Etats-Unis et de l'Egypte, qui garantira le maintien du calme pour une longue période et empêchera le réarmement du Hamas, alors que Tzipi Livni prône l'arrêt de l'opération sans parvenir à aucun accord, mais en faisant savoir qu'Israël ripostera sévèrement à toute tentative de l'attaquer ». Hier, le vice-ministre israélien de la Défense israélien, MatanVilnaï, a estimé que la fin de l'offensive semblait proche : « La décision du Conseil de sécurité ne nous donne plus tellement de marge de manœuvre. Par conséquent, je suppose que nous sommes proches de l'arrêt des actions terrestres et de l'ensemble des opérations d'une manière générale », adéclaré M. Vilnaï à la radio publique. Maintenant que le Parti des travailleurs et Kadima sont légèrement remontés dans les sondages – les législatives sont prévues le 10 février – face au Likoud (droite), Barak, Livni et Olmert tenteront de sauvegarder cette position. Second scénario : une prolongation de l'agression qui se conclurait sans véritable amélioration de la position stratégique d'Israël, voire par une dégradation de celle-ci (par exemple après des opérations terrestres infructueuses). Dans cette hypothèse, le Likoud de Netanyahou, mais aussi les formations plus à droite (Israël Beitenou, Union nationale, Foyer juif) ont toutes les chances d'emporter la mise, selon Alain Dieckhoff, directeur de recherche au CNRS en France, dans un article paru dans Alternatives économiques. Durant la guerre contre le Liban l'été 2006, un commentateur israélien a écrit que si Israël savait commencer une guerre, il ne sait jamais comment la terminer !