La Fédération nationale des agences immobilières (FNAI) a fait, hier, le bilan de l'ensemble du secteur de l'immobilier, largement dominé par l'informel, lequel serait le créneau le plus absorbant de l'argent sale. La grosse affaire de saisie de cocaïne où Kamel Chikhi, dit «Le boucher», est le premier suspect, remet à l'ordre du jour plusieurs sujets dont essentiellement le blanchiment d'argent. Des pans de la société bougent et dénoncent. Parmi ces derniers, la Fédération nationale des agences immobilières (FNAI). Lors d'une conférence de presse, tenue hier, Menaceri Noureddine, chargé de la communication au sein de cette fédération, a tenu à faire le bilan de tout le secteur de l'immobilier, qui est le créneau le plus absorbant de l'argent sale. «Cela fait des années que nous appelons l'Etat à intervenir pour mettre un terme à toute cette anarchie dans le secteur de l'immobilier ainsi qu'à l'activité de la mafia du foncier et de l'informel. Sauf que malgré nos maintes correspondances, aucune suite n'a été donnée par les ministères que nous avons contactés. Entre-temps, des achats et des ventes se font sans pour autant que l'Etat n'intervienne ou enclenche des enquêtes sur la provenance de cet argent. L'agent immobilier est le dernier de la chaîne de l'opération de blanchiment. Les grosses opérations se font plus haut, chez les promoteurs immobiliers. Pas tous heureusement !» constate M. Menaceri, qui explique que 70% du marché immobilier sont accaparés par le réseau de l'informel. «L'intervention des courtiers, les ventes directes et les annonces sur les différents sites électroniques et les journaux offrent un milieu propice à ces personnes nouvellement riches d'écouler leur argent sale. C'est la raison pour laquelle nous insistons sur la proposition que nous avons fait il y a deux ans sur la nécessité de rendre obligatoire le passage par l'agence immobilière agréée dans toute transaction immobilière», assure-t-il. Chute des transactions immobilières La vision de la FNAI est d'obliger les intervenants sur ce marché juteux d'acquérir et remplir un formulaire auprès des agences immobilières. Ces dernières valideront ce formulaire qui sera par la suite une pièce obligatoire lors de la signature de l'acte de propriété. «Ceci mettra également un frein aux fausses déclarations chez le notaire. L'agent immobilier connaît parfaitement les prix des biens et du foncier et aura avec cette mesure, si elle est appliquée, le pouvoir de refus de toute sous- déclaration. Je tiens à préciser, dans ce sens, que 90% des déclarations de prix chez le notaire ne représentent que 40% du prix pratiqué lors de la transaction. Ces 40% sont en réalité le prix réel du bien et les prix tels qu'ils sont sur le marché ne sont que le fruit de la spéculation et la surenchère», explique notre interlocuteur. Selon le porte-parole de la FNAI, Azzedine Chemseddine, ce tissu de l'informel et la concurrence déloyale pratiquée par les différents canaux illégaux ont fait que le marché stagne. «Cette stagnation est également due aux différentes opérations de distribution de logements. De facto, les tractations immobilières ont chuté d'une manière drastique et 20% des agences immobilières ont baissé leurs rideaux. Le malheur est que ces dernières ont versé dans l'informel, rétorque-t-il. Il est plus rentable et les charges y sont nettement moindres. Les 80% restants sont en situation de grande difficulté et ne sont pas loin de cette finalité qu'est de cesser l'activité», signale-t-il avant de rappeler que sur les 6400 agences immobilières, qui existaient avant le décret exécutif n°09-18 fixant la réglementation relative à l'exercice de la profession d'agent immobilier, il ne reste que quelque 3000 agences actives sur le territoire national. Il ajoute que les 3400 agences qui ont disparu ont certainement viré vers l'informel. En plus du passage obligatoire par l'agence immobilière dans toute transaction, la FNAI recommande également, pour une meilleure traçabilité et canalisation de la profession et du marché, de créer une chambre nationale des agences immobilières où l'adhésion serait obligatoire. Ceci permettra de parer à toute défaillance de la part des agents immobiliers et de mieux gérer le marché.