En annonçant le gel des activités publiques du RCD jusqu'à l'élection présidentielle, Saïd Sadi lance en parallèle une autre initiative politique. Il appelle le FFS à « l'union » et affirme par ailleurs qu'« il ne faut écarter aucune disponibilité, qu'elle soit individuelle ou organisée dès lors que l'on s'émancipe des affrontements claniques ». Nous n'avons pas encore la réaction du parti de Hocine Aït Ahmed, que nous avons tenté de joindre hier, en vain, à la proposition du leader du RCD. Mais force est de constater qu'hormis ce brin d'espoir ou de rêve, du rassemblement démocratique, que caressent toujours et depuis longtemps des pans entiers de la société, tout baigne dans le pessimisme. Après avoir connu l'ouverture démocratique la plus osée et la plus franche dans le tiers-monde, l'Algérie a pris, par la force des choses, le chemin inverse pour se diriger droit vers la pire autocratie que la région n'ait jamais connue. On y est déjà depuis quelques années ! La fermeture des champs politique et médiatique a replongé le pays dans le monolithisme d'antan. Il faut bien l'admettre, tous les acquis démocratiques arrachés, de haute lutte, et parfois dans le sang, ont été repris. Beaucoup disent que ces acquis qu'on pleure aujourd'hui ont été tellement mal entretenus qu'il a été très facile au pouvoir de les reprendre l'un après l'autre. Le dernier est cet acquis constitutionnel qu'est l'alternance au pouvoir, consacré par la limitation des mandats présidentiels, bien qu'il n'ait jamais été traduit dans les faits. Le 12 novembre 2008 s'est éteint, en fait, le dernier rayon de l'espoir démocratique né en février 1989 avec la consécration de la première loi pluraliste, pour enfoncer de nouveau le pays dans la longue nuit glaciale d'un régime autocratique qui se proclame désormais au grand jour. 20 ans après, les plus téméraires des militants démocratiques ont fini, semble-t-il, par se résigner. « Les perspectives sont inexistantes », disait Saïd Sadi dont le parti, le RCD, a décidé jeudi dernier de ne pas prendre part à l'élection présidentielle d'avril prochain. Jusqu'au 12 novembre 2008, il était, estime-t-il, « possible, en théorie, d'activer en tant qu'opposant dans les institutions. L'ancienne Constitution aménageait, selon lui, malgré de sérieuses lacunes, des niches au débat contradictoire au Parlement dans la mesure où le gouvernement était responsable devant l'Assemblée ». Ce n'est plus le cas. Le verrouillage du jeu institutionnel, le plombage des champs politique et médiatique donnent ainsi autant de raisons au leader du RCD d'annoncer la suspension ou le gel des activités publiques du parti jusqu'à l'élection présidentielle. « La participation à une telle compétition qui serait synonyme de compromission dans une opération d'humiliation nationale. Refuser de s'y impliquer est à la fois un devoir civique et une exigence de respect pour notre histoire », a-t-il souligné. Mais cette situation induite par le retour masqué au parti unique finira-t-elle par réunir les démocrates ? Ils sont presque dos au mur, et il est paradoxal que les positions des uns et des autres se rejoignent, que ce soit sur la question de la révision de la Constitution, sur la prochaine élection présidentielle ou sur l'analyse de la situation du pays, sans que cela ne soit traduit concrètement par un rassemblement ou une alliance. Un tel projet est-il possible à présent ? Nous avons vu comment des initiatives aussi généreuses que le Rassemblement pour la République (RPR) envisagées au début des années 1990 ou encore le projet des états-majors des patriotes républicains ont buté sur des divergences surmontables en théorie mais indépassables sur le terrain de la réalité du camp des démocrates algériens. Il y a énormément de leçons à tirer de ces échecs, qui ont permis au pouvoir de se réapproprier les espaces qu'il a perdus. Faut-il encore, au point où en sont les choses, qu'il y ait le déclic qui enclencherait cette dynamique de rassemblement. Au jour d'aujourd'hui, on en est encore au stade des vœux. On craint que l'étau ne se resserre davantage au lendemain de l'élection présidentielle.