Le choléra a fait deux morts et plus d'une centaine d'Algériens ont contracté cette maladie infectieuse, qu'on peut déjà qualifier d'épidémie. Que faire pour éviter au pays d'atteindre le stade pandémique qui rappelle le douloureux épisode de 1986 et qui a vu 4500 Algériens infectés ? Comme premier élément éthologique, le ministère de la Santé invoque «une contamination par des fruits ou légumes mal lavés et la consommation d'une eau polluée». La messe est ainsi dite : la pollution. Une pollution dont l'ampleur et les conséquences sur la santé des Algériens sont encore méconnues, mais révélées au grand jour par l'apparition récente d'épidémies telles le paludisme, la tuberculose et maintenant le choléra. Les Algériens payent ainsi un lourd tribut dû à cette pollution, eux qui sont contraints de consommer à leur insu de l'eau douteuse et des fruits et légumes produits sur des terres agricoles irriguées avec des eaux usées ! Des quantités inestimables d'eaux usées non traitées sont utilisées à des fins agricoles. Des eaux usées chargées d'un dangereux éventail de pathogènes bactériens, viraux, protozoaires et helminthiques excrétés et endémiques. Un nombre inestimable d'agriculteurs utilise les eaux usées mal ou pas du tout retraitées pour irriguer leurs cultures, ce qui pose un problème sanitaire inquiétant pour les consommateurs, notamment lorsque les légumes sont consommés crus. Voilà une triste réalité dans un pays où les systèmes de traitement des eaux usées sont très peu étendus ou sont peu efficaces, ce qui engendre une pollution de l'eau à vaste échelle et l'utilisation d'eau de mauvaise qualité pour l'irrigation des cultures. L'établissement d'un lien clair entre l'agriculture, la santé et l'assainissement est souvent le chaînon manquant des débats actuels sur la question de faire des eaux usées un atout. L'Office national d'assainissement (ONA) en sait quelque chose, lui qui a estimé les capacités de réutilisation des eaux usées traitées dans l'irrigation agricole à plus de 325 millions de mètres cubes. Selon un rapport publié par la FAO, «la pollution des ressources en eau atteint des proportions inquiétantes en Algérie, où sur l'ensemble des eaux inventoriées, 12% sont de qualité médiocre». Les cartes de qualité des eaux publiées par l'ANRH montrent que des tronçons importants de cours d'eau dans les bassins de Tafna, Macta, Chéliff, Soummam et Seybousse sont pollués. Au moment où très peu de ressources sont allouées à la prévention et à l'assainissement des sites pollués, l'urgence est de concevoir et mettre en œuvre des actions de dépollution à grande échelle et d'accélérer la réalisation de stations d'épuration pour la réutilisation des eaux usées traitées dans l'irrigation des terres agricoles.