La misère semble faire recette à Ath Mansour, 45 km à l'est de Bouira. La jeune commune qui a pris son autonomie de la commune-mère de M'Chedallah connue à l'ère coloniale sous le nom de Maillot, n'arrive pas à voir grand, car héritant d'une panoplie de problèmes depuis l'indépendance. Apparemment, on n'a pas l'impression que le niveau de vie s'y est amélioré quand bien même la commune a eu l'opportunité de présider à sa propre destinée. Au niveau du chef-lieu communal, s'exhibe non loin de la RN5 un ghetto nommé la cité de recasement. C'est une sorte de camp de concentration improvisé par l'armée coloniale d'occupation pour avoir un contrôle total sur les populations de montagne suspectées alors d'activisme en faveur des moudjahidine ou en tout cas de constituer leur soutien logistique. C'est donc par souci d'avoir raison de la résistance que le taudis a été ouvert. Seulement, un demisiècle de souffrance pour les trente familles qui y ont été parquées ne semble pas avoir changé les conditions inhumaines dans lesquelles elles ont livrées, une autre résistance peut-être plus stoïque cette fois pour s'accrocher à la vie. Aujourd'hui, l'explosion démographique a fait que les familles qui croupissent dans l'étroit et l'insalubrité narguant toutes sortes de maladies liées à la pauvreté ont vu leurs besoins immobiliers augmenter. Au moins, deux problèmes de taille se posent aujourd'hui : leur relogement et l'indemnisation des propriétaires terriens. La situation délétère éludée, voire ignorée par les pouvoirs publics, prend les allures d'un dédale dont il est difficile de repérer l'accès ou la sortie. Les familles qui souffrent le martyre ne savent plus à quel saint se vouer. Néanmoins, l'option d'un relogement ne les tient pas du tout à cœur. Et pour cause, ils appréhendent qu'on les extirpe de leurs demeures de fortune étroites pour leur proposer des conditions similaires dans les logements qui pourraient leur être destinés. A deux kilomètres plus à l'est un même spectacle de cabanes s'offre aux usagers de la RN5. A quelques mètres du cimetière des martyrs où flottent les couleurs nationales en signe d'indépendance, c'est un autre taudis où sont oubliées d'autres familles qui ne suscitent l'intérêt des élus qu'à l'occasion d'échéances pour accéder au trône local. Pire, dans des sites de tout temps cachés aux walis qui se sont relayés depuis 2001, il est possible de voir des familles abritées dans des maisons centenaires complètement en ruine. Ce genre de spectacle choquant est éloigné délibérément des yeux des responsables à chaque fois qu'ils venaient pour s'enquérir des conditions de vie des habitants lesquelles sont pour certains dignes de l'époque coloniale d'où ces endroits n'ont jamais figuré sur les itinéraires que devrait prendre le wali hôte. A chaque fois, il y a plus d'une ruse pour que le responsable n'ait droit qu'à passer en revue les chantiers ou les problèmes qui ne portent pas atteinte à l'image de marque qu'on s'évertue obséquieusement de faire parvenir à la délégation du premier magistrat de la wilaya. La preuve, qu'ont apportées toutes les visites de travail alternées depuis très longtemps par les walis et les chefs de daïra ? Pour la dernière en date effectuée récemment, on languit les dispositions à prendre et on se demande si cette visite va porter ses fruits. En tout cas dans cette localité frondeuse, il aura fallu recourir à maintes actions de rue pour arracher quelques projets comme le gaz de ville et le réseau routier en 2004. Quant aux ghettos, ils ont tout l'air d'avoir encore de bien beaux jours devant eux pour que l'Etat se risque à jeter un coup d'œil pour se rendre compte que des habitants otages de ces taudis n'ont pas encore goûté à l'indépendance à l'exception dans les slogans qu'on leur scande lors de propagandes électorales ou autres conjonctures des partis dévoués à la coalition gouvernementale aux ambitions politiciennes et triomphalistes.