43 ans après la mort du dictateur Francisco Franco, les députés espagnols ont approuvé en septembre dernier un décret du gouvernement du socialiste Pedro Sanchez autorisant l'exhumation de la dépouille de Franco du «Valle de los caidos», «la Vallée de ceux qui sont tombés», située à une cinquantaine de kilomètres de Madrid. Après des années de débat, l'Exécutif du gouvernement espagnol fait valoir que le dictateur ne mérite pas «une tombe d'Etat». Sa dépouille doit être transférée vers un lieu discret. Il y a 12 ans, le progressiste chef de gouvernement Jose-Luis Zapatero faisait adopter la loi ayant pour titre «la mémoire historique». L'objectif principal du texte était de retirer tous les symboles exaltant Franco et la dictature de l'espace public. Si la grande majorité des statues, écussons et noms de rues franquistes ont été enlevés, il reste encore, 43 ans après la mort du dictateur (20 novembre 1975), des vestiges symboliquement importants. L'exhumation devait avoir lieu l'été dernier, mais elle a été repoussée et est prévue au mois de janvier 2019. Rien n'est encore sûr, car l'Espagne n'en a pas encore fini avec son encombrant passé. La vice-présidente du gouvernement, Carmen Calvo, après avoir été reçue au Vatican par le secrétaire d'Etat Pietro Parolin, a déclaré, «ce que nous avons convenu, c'est de trouver une solution qui, bien sûr, ne peut être la cathédrale de La Almudena». «Les restes de Franco ne peuvent être placés dans aucun lieu où ils pourraient être glorifiés», a-t-elle précisé. Le Vatican a approuvé les efforts du gouvernement espagnol pour trouver une alternative à l'inhumation de Francisco Franco et qu'il ne s'oppose pas à l'exhumation du dictateur mais précisant que le cardinal Pietro Parolin ne «s'est pas prononcé sur le lieu de l'inhumation». La famille de Franco, soutenue par la fondation qui défend la mémoire du général, refuse l'exhumation et prévoie d'enterrer Franco dans un caveau familial de la cathédrale de La Almudena, un quartier très touristique situé en face du palais royal, dans le centre de Madrid. Un remède pire que le mal pour le gouvernement. En cas d'exhumation, une autre possibilité envisagée est de placer Franco dans un caveau familial au cimetière du Pardo, près de Madrid. Le général Franco a passé 36 ans (1939-1975) à la tête de l'Espagne après une guerre civile qui a fait 500 000 morts. Une sombre page de son histoire que l'Espagne n'a jamais jugée. Des Espagnols viennent voir la tombe de Franco, certains sont des défenseurs du franquisme et s'opposent à l'exhumation du général décidée par le gouvernement. «Aux jeunes qui n'ont pas connu Franco, on dit que c'est un monstre, mais on ne leur raconte pas la vraie histoire», explique un Espagnol. Jamais la tombe de Franco n'avait été autant fleurie depuis sa mort. Le dictateur avait supervisé lui-même les travaux de construction et avait choisi chaque détail du gigantesque mausolée de «Valle de los caidos», d'une impressionnante croix géante de 150 mètres de hauteur, construit entre 1941 et 1959, notamment par des prisonniers politiques républicains condamnés aux travaux forcés. Des dizaines d'entre eux sont morts sur le chantier. Franco est enterré dans la basilique du site où il avait fait transférer au préalable les restes de plus de 33 000 victimes de la guerre civile (1936-1939), nationalistes et républicaines, sans même avertir leurs familles.