La problématique de l'orientation scolaire et professionnelle présente en général un double objectif : offrir au sujet les conditions voulues pour lui permettre de s'exprimer au sens global, selon ses aptitudes, ses capacités et son expérience dans un cadre dynamique et évolutif ; ensuite, permettre la continuité de cette expression au sein du système de production. A l'issue de chaque palier d'orientation, à savoir la 9e année et la 1re année secondaire tronc commun, beaucoup d'élèves ressentent une certaine angoisse quand ils réfléchissent à leur devenir. Les impératifs de l'économie et de la société ne vont toujours pas de pair avec les «aspirations des individus» vus sous le double aspect quantitatif et qualitatif. Là réside sans conteste une des causes essentielles de cette angoisse partagée également par les parents. En d'autres termes, l'orientation se heurte inévitablement à ces obstacles chaque fois qu'il faut convaincre un jeune qui aspire à la formation, alors que le pays a aussi besoin d'autres qualifications nécessaires aux différents secteurs de l'activité économique. Actuellement, les jeune gens sont eux-mêmes «assez tôt» préoccupés par les débouchés de leurs études et refusent au départ le principe de toute perspective d'intégration dans une société de consommation. Cette situation est d'autant plus accentuée dans notre contexte actuel où le choix d'orientation est aussi limité par : – L'absence totale du profil du sujet que se propose de former l'école et pour quel projet de société. – Les capacités d'accueil des établissements scolaires, infrastructures en deçà des besoins, passage soumis toujours au système des quotas. – La difficulté actuelle de saisir et de maîtriser les données de notre environnement socioéconomique en pleine mutation (économie de marché, privatisation, concurrence). – Des contraintes induites par des contradictions dues à la résistance au changement à travers un système de valeurs que traîne encore notre appareil économique par rapport à l'option de l'économie de marché. – L'insuffisance des moyens humains spécialisés, tels que psychologues scolaires conseillers d'OSP, groupes d'aides psychopédagogiques, devant encadrer et intervenir dans l'actions d'orientation. De tels problèmes doivent trouver graduellement leur solution par le biais d'une réelle mise à niveau du système éducatif avec celui du développement économique, scientifique et technique que connaît le pays. L'initiation d'ores et déjà de mécanisme de communication et de réseaux d'information en milieu scolaire ainsi que la réhabilitation encore timide de l'enseignement technique à travers la révision fondamentale de ses finalités sont des signes annonciateurs d'une véritable prise de conscience des décideurs du secteur de l'éducation. L'information pour l'orientation doit être organisée, planifiée et structurée au sein du système éducatif afin d'assurer, par son contenu et ses objectifs, des liens et des passerelles entre le secteur de l'éducation et celui de l'emploi. Cela permettra aux pédagogues et planificateurs de l'éducation de disposer d'un capital d'informations sur les structures de l'emploi et leur mobilité, leur évolution, l'introduction de techniques nouvelles qu'engendrent de «nouvelles qualifications». A ce propos, Henri Janne écrit en préface à l'ouvrage de Bertrand Schnarts (L'éducation demain) : «L'orientation, c'est essentiellement l'information de l'individu au sujet de ses possibilités propres dans le système d'études, la prise de conscience de ses aspirations traduites en motivations et la connaissance des débouchés qui s'offriront aux compétences qu'il est capable d'acquérir.» Il reste entendu que toute action d'orientation n'est pas une fin en soi, mais demeure un «essai d'adaptation progressive» aux filières scolaires et professionnelles existantes. Cette adaptation exige au départ suffisamment d'informations sur les filières sous le double aspect qualitatif et quantitatif, c'est-à-dire le cheminement des carrières et leur évolution avec un horizon des débouchés possibles. L'objectif à long terme d'une telle information permettra de supprimer les contradictions héritées sur le double plan des mentalités et des attitudes encore tenaces au niveau de l'école et du système de production qui obéissaient aux mécanismes de la «gestion centralisée». L'information en milieu scolaire doit être considérée comme une action éducative, car elle doit faire parvenir les réalités du monde économique et social par une projection des besoins et des activités de l'homme, des ressources et des lois économiques, de l'évolution des sciences, de l'introduction des technologies nouvelles et des techniques de pointe. L'objectif avéré consiste à éviter à l'élève, sujet orientable, une vision étriquée de ses possibilités qui doivent s'inscrire et s'intégrer dans un cadre global du développement du pays. Cette information ne pourra atteindre les objectifs assignés que si elle a les caractéristiques suivantes : – une programmation judicieuse ; – une permanence pour assurer sa diffusion, mesurer son impact et évaluer ses résultats par rapport aux objectifs fixés ; – inclure la participation de l'élève qui devra s'autodéterminer à travers un effort de réflexion présentement et sur son devenir par une prise de conscience sur son statut. Par une sensibilisation et une perception des problèmes socioprofessionnels auxquels il sera confronté ultérieurement. De par son impact à caractère éducatif, l'information en milieu scolaire doit être élaborée pour être intégrée et disposée durant les heures d'enseignement et permettra aux conseillers d'OSP de mieux jouer leur rôle d'orientation en s'intégrant mieux et plus au sein de l'équipe éducative de l'établissement. Cela évitera les incidences négatives véhiculées par des réseaux informels et parallèles d'information intra et extrascolaire qui parasitent la perception des élèves et des parents de l'action d'orientation et sa finalité. Un plan d'information doit obéir à trois phases successives, à savoir la sensibilisation par palier d'orientation ou groupes de classes ; l'information à travers son contenu, ses objectifs et les populations ciblées et enfin la documentation et appuis, par les panneaux publicitaires, dépliants, affiches, guides et revues spécialisées. Ce plan d'information qui doit être continu devra tenir compte du programme d'activités des centres d'OSP, de l'organisation pédagogique des établissements scolaires, du timing des sessions d'examen et être actualisé à tout moment par de nouvelles données. En plus des deux paliers d'orientation qui sont la 9e année moyenne et la 1re année secondaire, tronc commun, il est utile, pour la troisième année secondaire, classe d'examen du bac, d'initier et d'organiser une journée nationale d'information pour l'orientation en direction des élèves, des parents et des enseignants, avec la participation des partenaires de l'éducation, à savoir l'enseignement supérieur et la recherche scientifique en plus de la formation professionnelle. Les supports et partenaires pour la vulgarisation du plan d'information sont multiples et divers, telle la participation de la presse écrite, parlée et télévisuelle qui assumera ainsi sa fonction de moyen parallèle d'information d'éducation. Au niveau des centres d'OSP et des établissements scolaires, par l'élaboration d'une liste des statistiques sur le devenir d'anciens élèves, par des visites de familiarisation des établissements de formation et visites d'unités de production. L'organisation de conférences données par des parents d'élèves et des spécialistes, de projection de films documentaires à caractère économique, l'acquisition et le déplacement de cinébus vers les établissements scolaires, en particulier ceux des zones enclavées. Conclusion Faire des prévisions en matière de moyens d'éducation s'avère donc une nécessité inéluctable, et cette nécessité s'est «imposée» à des pays ayant des systèmes économique et politique les plus différents. Aussi, les prévisions de l'emploi constituent un élément d'information qui ne saurait être négligé dans l'établissement des prévisions éducatives, ce qui induit une certaine harmonisation des données entre le secteur de l'emploi et celui de l'éducation. C'est sans doute le seul moyen d'augmenter la proportion de chances des jeunes diplômés, qui, à la fin de leur cursus de formation, trouveront «peut-être» un débouché professionnel aux études qu'ils auront faites. Néanmoins, tant que les structures de l'emploi demeurent instables, situation générée par le coût social des réformes économiques du plan d'ajustement structurel (PAS) pour l'entrée en économie de marché, il est actuellement aléatoire de concilier les perspectives de l'éducation et celles de l'emploi. Il serait peut-être nécessaire d'entamer la révision des filières scolaires et leur actualisation avec des nomenclatures des spécialités et des professions des secteurs de l'enseignement supérieur et de la formation professionnelle. Equation à trois inconnues quand on sait qu'au plan de l'emploi, les réformes économiques menées à la hussarde par les pouvoirs publics ont induit un dégraissage des personnels de 400 000 travailleurs, et ce n'est pas fini, alors que le système éducatif se déleste, lui aussi, chaque année scolaire de plus de 500 000 élèves qui iront grossir les cohortes de la rue et dont la prise en charge est actuellement des plus aléatoires. C'est dire l'épineuse situation qui se présente sous le double questionnement : comment créer et assurer l'emploi et comment former pour déboucher sur un emploi ? Notes : – Lios n°23 – Lios n°33 – L'OSP – Maurice Reuchlin PUF . Que sais-je ? – L'OSP – Jean Drevillon – PUF – La psychopédagogie, Gaston Mialaret. Que sais-je ? – Les sciences de l'éducatiion, Eric Plaisance et Gérard Vergnaud. Ed. La Découverte.