Quotidiennement, tôt le matin, et jusqu'à la tombée de la nuit, ils fréquentent la décharge publique de Berka Zerga située dans la commune d'El Bouni. Ce sont des garçons âgés entre 10 et 30 ans, que l'on appelle les « fouilleurs d'ordures ». Dans leurs « prospections », ils ramassent de tout : des bottes baillant, des clefs rouillées, ferraille et cuivre, plastique, des outils en quantité, des médicaments périmés et même des produits alimentaires pour leur famille. Les trouvailles plus intéressantes sont tenues secrètes. Les fouilleurs préfèrent les laisser là où elles se trouvent, particulièrement lorsqu'il s'agit de cadavre de nouveau-né, ou de membres humains, amputés dans l'une des cliniques privées ou publique que compte la wilaya. Abderahmane fréquente ce lieu de misère et de désolation depuis l'âge de 10 ans. Le teint blafard, apparemment maladif, il survit grâce aux « fruits » de ses recherches, à mains nues, dans les tas d'ordures quotidiennement déversées par des dizaines de camions et tracteurs. Ils sont plus d'une centaine à fréquenter ce lieu et y vivre ainsi. Sans le savoir, plusieurs d'entre eux sont atteints de différentes infections, notamment de la peau ou pulmonaires. L'un de ces fouilleurs, Radouane, mauvaise mine et air flegmatique dira : « Beaucoup de nos jeunes camarades, dont la plupart sont âgés de 20 ans, sont décédés à la suite de diverses maladies parce qu'ils n'avaient pas les moyens de se payer une visite médicale ou d'acheter les médicaments nécessaires à leur état de santé. » Cependant, ces « chercheurs de trésor » ne sont pas les seuls. Ils disputent le territoire de Berka Zerga avec un autre concurrent, qui n'est pas des moindres : les vaches laitières. Elles broutent à longueur de journée toutes sortes d'ordures, y compris celles hospitalières. Mais, elles devront se passer de ces dernières, car une note a été mise en évidence la semaine écoulée interdisant le déversement des déchets hospitaliers. Le projet d'organisation et de réaménagement de la décharge publique de Berka Zerga, destiné à maîtriser la gestion de plusieurs centaines de tonnes de déchets dangereux, n'est pas près d'être réalisé. Prévus pour être lancés en juillet 2003, les travaux avaient été reportés à octobre de la même année. Contacté, le premier responsable de cette dernière déclare être dans l'incapacité d'avancer une quelconque date quant au démarrage des travaux.