I – Introduction générale d'approche interpellative Le choix de l'intitulé de notre contribution est dicté par le souci de revisiter les éléments constitutifs de la face cachée de l'iceberg de la société. En suivant la logique du développement de certaines émissions que ce soit au niveau des moyens audiovisuels nationaux ou étrangers, je me permets de faire un arrêt sur image sur quelques-unes d'entre elles afin que nous puissions engager une analyse critique de certains dommages collatéraux conséquents à la non-observation des principes généralement admis comme étant les normes constitutives de la cohésion de la cellule familiale, et partant de la société dans son ensemble par devoir de protection de l'acteur autour duquel l'idée même de la société sage et créative est appelée à se construire. Inventer ou retrouver les rites familiaux (1), c'est mieux ensemble (2). Tout est possible «Wa koullou chaiin moumkin»(3), etc. sont autant de repères interpellatifs du danger que courent les sociétés par familles interposées, si le noyau faible de la chaîne n'est pas fortement protégé par des lois préventives de l'éclosion de la famille, du développement de la culture de l'intolérance et de l'exclusion négationniste. Allant dans la même logique préventive et accusatrice, la défenseuse des enfants en France, Mme Claire Brisset, en remettant le 20 novembre dernier au président français, Jacques Chirac, son rapport annuel souligne avec insistance «l'absence de contrôle de l'Etat, l'inégalité entre départements, le cloisonnement des services et l'inadaptation de la formation des professionnels» (4). Ce rapport publié à l'occasion de la Journée mondiale des enfants est révélateur des dysfonctionnements et autres entraves au meilleur épanouissement social, culturel dans un environnement sain de l'enfant qui est théoriquement l'acteur et le destinataire premier de la quasi-totalité des textes et des normes du droit international des droits de l'homme. L'idée d'intégrer les principes de la Déclaration des droits de l'enfant dans un texte contraignant (pour les Etats signataires) dans le domaine des droits de l'homme donne naissance à un projet de convention des Nations unies sur les droits de l'enfant. La commission des droits de l'homme de l'ONU met en place un groupe ad hoc pour préparer la convention. Plusieurs organisations non gouvernementales se regroupent alors pour contribuer aux travaux du groupe de travail des Nations unies. La Convention internationale des droits de l'enfant est adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies le 20 novembre 1989 (5). Cette convention oblige les Etats qui la ratifient à en respecter les 54 articles qui traitent du droit de l'enfant à l'éducation, à une famille, à une instruction religieuse, à la santé, à des loisirs, à la sécurité sociale et à la protection contre l'exploitation économique et sexuelle; des droits accordés aux délinquants juvéniles ainsi que la protection contre la peine capitale et contre l'enrôlement en dessous de 15 ans dans les forces armées, Le 2 septembre 1990, la convention entre en vigueur. Elle a force de loi dans les pays signataires (6). Qu'en est-il au jour d'aujourd'hui du degré d'adaptation de notre législation nationale aux obligations découlant de la ratification de ce traité contraignant ? Au sens de la convention, un enfant s'entend tout être humain âgé de moins de 18 ans. Conformément à l'article 49-2 de la convention, elle est opposable à notre pays depuis son entrée en vigueur le 16 mai 1993 (7). Au regard de l'approche académique retenue pour aborder cette problématique, je voudrais signaler de prime abord que notre contribution sera axée essentiellement, en priorité, sur les domaines d'actualité internationale, à savoir le droit à l'éducation, le droit à une famille, le droit à la santé, le droit à la sécurité sociale, le droit à la protection contre l'exploitation économique et sexuelle, l'actualité du droit des enfants illégitimes, et ce après avoir revisité les obligations constitutionnelles de faire et/ou de s'abstenir de faire de notre pays. Considérant que, conformément aux principes proclamés dans la charte des Nations unies, la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine ainsi que l'égalité et le caractère inaliénable de leurs droits sont le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde (8).Ayant à l'esprit le fait que les peuples des Nations unies ont, dans la charte, proclamé à nouveau leur foi dans les droits fondamentaux de l'homme et dans la dignité et la valeur de la personne humaine, et qu'ils ont résolu de favoriser le progrès social et d'instaurer de meilleures conditions de vie dans une liberté plus grande (9). Reconnaissant que les Nations unies, dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et dans les pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme, ont proclamé et ont convenu que chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés qui y sont énoncés, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou de tout autre opinion, d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation (10). Rappelant que, dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, les Nations unies ont proclamé que l'enfance a droit à une aide et à une assistance spéciales (11). Convaincus que la famille, unité fondamentale de la société et milieu naturel pour la croissance et le bien-être de tous ses membres, en particulier les enfants, doit recevoir la protection et l'assistance dont elle a besoin pour pouvoir jouer pleinement son rôle dans la communauté (12). Reconnaissant que l'enfant, pour l'épanouissement harmonieux de sa personnalité, doit grandir dans le milieu familial, dans un climat de bonheur, d'amour et de compréhension (13). Considérant qu'il importe de préparer pleinement l'enfant à avoir une vie individuelle dans la société et de l'élever dans l'esprit des idéaux proclamés dans la Charte des Nations unies, en particulier dans un esprit de paix, de dignité, de tolérance, de liberté, d'égalité et de solidarité. Les Etats parties à la convention internationale relative aux droits de l'enfant, dont le nôtre, se sont engagés à prendre toutes les mesures législatives, administratives et autres qui sont nécessaires pour mettre en œuvre les droits reconnus dans la convention (14). Pour l'observation et l'exécution des engagements internationaux souscrits, notre pays a introduit des déclarations interprétatives à la Convention objet de notre communication. Pour l'Algérie, les articles l 3, l 6 et 17 seront appliqués en tenant compte de l'intérêt de l'enfant et de la nécessité de la sauvegarde de son intégrité physique et morale. A ce titre, le gouvernement algérien interprétera les dispositions de ces articles en fonction : – Des dispositions du code pénal, notamment des sanctions relatives aux contraventions à l'ordre public, aux bonnes mœurs, à l'incitation des mineurs à la débauche et à la prostitution.Des dispositions de la loi n°90-07 du 3 avril 1990 relative à l'information, notamment son article 24 qui prévoit que «le directeur d'une publication destinée à l'enfance doit être assisté par une structure éducative consultative», et son article 26 qui dispose que «les publications périodiques et spécialisées nationales ou étrangères quelles que soient leur nature et leur destination, ne doivent comporter ni illustration, ni récit, ni information ou insertion contraires à la morale islamique, aux valeurs nationales, aux droits de l'homme ou faire l'apologie du racisme, du fanatisme et de la trahison. Ces publications ne doivent, en outre, comporter aucune publicité ou annonce susceptible de favoriser la violence et la délinquance». Quant aux dispositions des alinéas l et 2 de l'article 14 de la convention, elles seront interprétées par le gouvernement algérien compte tenu des fondements essentiels du système juridique algérien en particulier : de la constitution qui stipule en son article 2 que l'Islam est la religion de l'Etat, en son article 35 que la liberté de conscience et la liberté d'opinion sont inviolables ; – de la loi nÞ 84-11 du 9 juin 1984 portant code de la famille, qui stipule que l'éducation de l'enfant se fait dans la religion de son père. Interpellons ses deux réserves à la lumière de l'objet de la convention relative aux droits de l'enfant, notamment des dispositions opposables à l'Algérie (15). Si nous affirmons de prime abord la théorie de la sécurité juridique de la convention et de son intégrité, il est à noter qu'«aucune réserve incompatible avec l'objet et le but de la présente convention n'est autorisée». S'agissant de la contrariété de fond du contenu des déclarations avec l'objet, il est généralement admis que l'objet de la convention n'est autre que celui souligné avec insistance au préambule de ladite convention qui, s'inspirant et se ressourçant des principes proclamés dans la Charte des Nations unies : «La reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine ainsi que l'égalité et le caractère inaliénable de leurs droits qui sont le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde.» Quant au but attendu des Etats qui ratifient et/ou adhèrent aux engagements déclarés le «législateur international», c'est de rehausser au niveau indiqué et mérité la place que l'enfant doit occuper, à savoir l'importance d'avoir un projet clairvoyant qui prendra en charge la pleine préparation de l'enfant à avoir une vie individuelle dans la société et de l'élever dans l'esprit des idéaux proclamés dans la Charte des Nations unies, en particulier dans un esprit de paix, de dignité, de tolérance, de liberté, d'égalité et de solidarité. Cet objet et ce but nous sont constamment et fortement intimés depuis notamment la «décennie noire» que personne ne veut ni ne souhaite garder dans la mémoire collective de la nation algérienne. La communauté de destin de tous, en particulier de la génération future, dans le cadre d'un développement harmonieusement durable et bénéfique pour la communauté dans son ensemble est plus que jamais exprimée par l'acte civique de la collectivité nationale éprise de tolérance et de respect de l'autre. Le respect de notre prochain. Pour une approche plus académique de la diatribe impliquée dans la rédaction du premier paragraphe de la première déclaration interprétative de l'Algérie, le professeur Ahmed Mahiou a engagé une réflexion soigneusement appliquée sur la notion de fondement de la société algérienne (16). L'Algérie en adhérant et ratifiant, avec déclarations interprétatives, la convention de l'enfant le 19 décembre 1992, est comptable donc, a contrario, de toutes les convention qui lui sont opposables conformément au droit des traités. Cette ratification engage l'Algérie à aborder un processus d'adaptation de sa législation et sa pratique en matière des droits de l'enfant(17). La ratification est le mécanisme de réception et d'introduction de la norme internationale dans l'ordre juridique national. Notes 1)- Domaine d'intéressement développé dans l'émission diff usé par la chaîne publique France 5. «Les Maternelles» le vendredi 3 décembre 20074 à 9h30. 2) – Emission consacrée hebdomadairement à la reconstitution de la famille, animée par Nadjat Maouche, sur France 5, tous les dimanches matin. 3)- Emission reproduite irrégulièrement par la chaîne 1 de la télévision algérienne consacrée à la recherche de la «rahma» dans le cœur des êtres ayant été à l'origine et/ou la conséquence de l'errance de I'enfance abandonnée en particulier émission adaptée aux exigences locales algériennes. 4)- In journal télétexte France 2 du 20 novembre 2004, p. 102. 5)- AG res. 44/25, annex, 44 U.NI GAOR Supp. n°. 49, à 167. U.N. Doc. A /44/49, 1989. 6)- 191 pays ont ratifié jusqu'en 2003 la Convention. Reste la Somalie ineffective en tant qu Etat depuis I intervention sauvage des Etats-Unis au nom de la coutume sauvage émergente du droit d'ingérence vers la fin des années 1980 et les USA 7)- Pour chacun des Etats qui ratifieront la présente Convention ou y adhéreront après le dépôt du vingtième instrument de ratification ou d'adhésion, la Convention entrera en vigueur le trentième jour qui suivra le dépôt par cet Etat de son instrument de ratification ou d'adhésion». Voir, pour le quinzième anniversaire de la Convention, Pr, Mostépha Khiati, « la convention internationale des droits de l'enfant souffle sa 15e bougie», in le quotidien El Watan, nÞ4252, du 16 novembre 2004. 2e partie, p. 15. 8) -Préambule de la Charte des Nations unies ensemble articles 1-& 2; 2§2; 55, repris par le préambule de la Déclaration universelle des droits de l'homme, adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies. A/RES/2 17 A(III) le 10 décembre 1948. 9)- Préambule de la Charte des Nations unies. 10)- Article 2-1 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et article 2 commun aux deux pactes internationaux de 1966 ratifiés par l'Algérie avec réserve, par décret présidentiel n…) 11)- Article 25-2 de la Déclaration qui stipule : «La maternité et l'enfance ont droit à une aide et à une assistance spéciales. Tous les enfants, qu'ils soient nés dans le mariage ou hors mariage, jouissent de la même protection sociale.» 12)- Article 16-3 de la Déclaration universelle des DH «la famille est l'élément naturel et fondamental de la société et a droit à la protection de la société et de l'Etat» , principe de droit codifié et exécutoire par opposition aux Etats parties aux deux pactes internationaux relatifs aux droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels de 1966, conformément aux engagements internationaux souscrits découlant de l'observation et de l'effectivité de l article 23 du pacte relatif aux droits civils et politiques. 13)- «Tout enfant – sans discrimination aucune fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, l'origine nationale ou sociale, la fortune ou la naissance – a droit, de la part de sa famille, de la société et de l'Etat aux mesures de protection qu'exige sa condition de mineur» article 24-1 du Pacte relatif aux droit civils et politiques. 14)- Article 5 de la convention. 15)- Ces déclarations sont publiées au Journal officiel de la République algérienne nÞ 91 du 23 décembre 1992, en même temps que la publication du décret présidentiel nÞ92-461 du 19/2/1992 portant ratification avec déclarations interprétatives de la Convention relative aux droits de l'enfant. 16)- In Annuaire de l'Afrique du Nord 17)- Article 4 de la Convention sur les droits de l'enfant. (A suivre)