Dans son discours de candidature, prononcé à la coupole du 5 Juillet, le président Bouteflika annonçait que 150 milliards de dollars seront investis lors de son prochain mandat. La cagnotte est si alléchante qu'elle fait saliver une certaine cour avide d'affairisme, une palette aussi diverse d'opportunistes et un microcosme politique bien veillant sur ses intérêts, bien gardés d'ailleurs par la grâce d'un troisième mandat. Mais d'où sort-il tous ces milliards ?, pouvaient s'interroger certains. N'avait-il pas lancé à partir de Ghardaïa que « le temps des vaches grasses est terminé, c'est le temps des vaches maigres, et qu'il faut désormais retrousser les manches » ? On savait que Bouteflika est un magicien et qu'il gardait plus d'un tour dans sa « poche ». L'argent est devenu subitement disponible ! Par quel miracle ? Il n'y a que lui qui détient la clé de l'énigme. C'est certain et même flagrant que l'administration, dans tous ses segments, travaille pour lui. Mais de là à s'impliquer en tant que président dans une campagne électorale qui n'est pas encore lancée officiellement, c'est un pas difficile à franchir pour quelqu'un qui voudrait laisser encore à l'acte politique quelque vertu. Tant qu'on y est… la réalité est que le candidat Bouteflika ne lésine sur aucun moyen pour faire sa propre promotion. Nous avons vu avec quelle générosité il a décidé de passer l'éponge sur les dettes des agriculteurs, d'augmenter la bourse des étudiants et de revoir à la hausse le smig lors de la prochaine tripartite. Celle qui aura lieu après l'élection du 9 avril. Les paroles du Président ne sont pas des promesses du genre « si je suis élu je ferai ceci, je ferai cela », mais des décisions annoncées du haut de la fonction présidentielle. Ses dernières visites à Oran, à Biskra et à Sidi Bel Abbès, ayant bénéficié d'une large couverture médiatique, ne font, en fait, qu'ouvrir le bal d'un large forcing non pour gagner une élection jouée d'avance, mais pour convaincre un électorat qui semble avoir fait, la preuve en est les dernière élections législatives, son deuil sur la possibilité d'un scrutin libre dans le pays en désertant massivement l'urne. L'on comprend bien donc le souci du président candidat lorsqu'il a martelé à la coupole du 5 Juillet qu' « un président qui n'aura pas la majorité écrasante n'en sera pas un ». Il veut vraiment faire le plein. Comment ? Bouteflika tente de brasser large en ciblant de larges pans de la société : les travailleurs par une augmentation du smig, les étudiants par la revalorisation de la bourse et les agriculteurs par l'effacement des dettes. Tant pis pour ceux qui ont accepté de l'accompagner dans sa réélection pour un troisième mandat à la présidence de la République et font mine de le critiquer aujourd'hui sur sa façon de conduire sa propre campagne en faisant usage des moyens de l'Etat. La hantise du président Bouteflika, qui se succédera, à coup sûr, à lui-même le 9 avril prochain, est moins le reproche qui lui sera fait sur une campagne déloyale, que le taux de participation qu'il doit à tout prix faire augmenter en captant l'électorat par le moyen de l'argent du Trésor public. Son dangereux rival est bien évidemment l'abstention. Et tous les coups sont permis pour le combattre. Le candidat « indépendant » ne veut pas être un président mal élu.