La démarche vise à protester contre les «violences et agressions sauvages» perpétrées par la police contre les militants et les observateurs internationaux venus participer au congrès de la LTDH, prévu initialement le 27 mai dernier, mais interdit par le pouvoir en place. «L'Union européenne doit faire, en toute urgence, une déclaration publique pour condamner le comportement violent, agressif et dictatorial de l'Etat tunisien», avait suggéré Hélène Flautre lors d'une conférence de presse organisée hier au siège de la FIDH à Paris. La députée européenne, affiliée aux Verts, a estimé que dans le cadre de l'accord d'association, «l'Europe doit exercer de vraies pressions sur le régime de Ben Ali afin de le contraindre à respecter davantage les libertés démocratiques et le peuple tunisien». «Toutefois, remarque Kamal Jendoubi, président du réseau euro-méditerranée pour les droits de l'homme (REMDH), c'est la France, premier partenaire commercial de la Tunisie, l'Italie et l'Espagne qui bloquent toutes les initiatives au niveau du conseil de l'Europe.» Un an après la tenue du Congrès mondial sur les sociétés de l'information à Tunis, la situation ne semble guère évoluer dans le bon sens sur le terrain. Pis, dans un pays où, dit-on, la moitié du peuple surveille l'autre moitié, une «véritable dictature continue de sévir d'une façon méthodique contre l'ensemble de la société». Tortures, agressions physiques, harcèlements, mutations forcées, locaux saccagés, insultes et arrestations poursuites judiciaires… sont le lot quotidien des défenseurs des droits de l'homme, des avocats et des magistrats, ayant choisi de garder leur indépendance vis-à-vis du pouvoir politique. D'autres pans de la société, tels que les étudiants, les journalistes et les intellectuels… n'échappent pas à ce genre de pratiques. «On assiste à un tournant radical des droits de l'homme en Tunisie, souligne Driss Al Yazami, SG de la FIDH. Et même l'idée qui voulait nous faire croire que le développement économique allait être accompagné d'une ouverture démocratique est aujourd'hui dépassée. Et c'est à croire que les Tunisiens ne sont que des ventres et ne peuvent pas jouir de leurs libertés et de leurs droits fondamentaux, à l'instar des autres peuples du monde.» Alors que les magazines touristiques occidentaux continuent de présenter la Tunisie comme une «terre de sérénité», le régime en place s'efforce, lui, de mener à bout sa politique d'asphyxie des libertés publiques. Il cherche à briser toutes les résistances citoyennes qui se dressent sur son chemin, «et ce en liquidant tous les militants de la liberté et en cloisonnant le pays afin de le soustraire du regard international». Un regard qui semble complètement absent, selon Michel Tubiana, vice-président de la FIDH, qui a qualifié «de scandaleux le silence des pays européens et de lâche et puérile l'attitude des autorités françaises face au drame que vit le peuple tunisien». Hier, un rassemblement de protestation a eu lieu sur le parvis des droits de l'homme à Paris. Les militants tunisiens espèrent constituer, dans les jours qui viennent, une large alliance composée d'ONG internationales et d'élus politiques de tous bords afin de mobiliser l'Europe sur la question des droits de l'homme dans le pays de Ben Ali.