Locarno (Suisse) De notre envoyé spécial Mais le festival s'est terminé dans une atmosphère assez triste. La veille de la clôture, le très brillant directeur artistique Frédéric Maire s'est écroulé sur la scène de la Piazza Grande, victime d'un malaise dû au surmenage. Le jour même, le président du festival, Marco Solari, était emmené très souffrant dans une ambulance à l'hôpital. Fort heureusement, rien de grave. Les deux personnalités sont en bonne santé. Mais l'alerte a été chaude. Comme si cela ne suffisait pas, il y a eu quelques remue-ménages au jury. L'actrice française Emmanuelle Devos n'est pas venue à Locarno. Sans doute encore sous le choc de la disparition de son père, le génial Raymond Devos. Une productrice suisse-allemande s'est retirée du jury, elle était l'auteure du scénario d'un film en compétition… C'est ce même film qui a obtenu le Pardo d'or (90 000 francs suisses). Il s'agit d'une production sans audace, très terne : Das Fraülen de Andréa Staka (Suisse/Allemagne). Un film très décevant sur des réfugiés de l'ex-Yougoslavie à Zurich. Le plus embarrassant dans ce palmarès, c'est que le jury a décidé d'ignorer totalement les meilleurs films, particulièrement le très beau travail du cinéaste catalan Marc Rocha dans Jours d'août. Une œuvre très poétique, cheminement passionnant de deux frères à travers le sud de l'Espagne dans des décors photogéniques par excellence. Un film important aussi : Le dernier des fous de Laurent Achard (France) aurait mérité le grand prix. Le jury a préféré le «consoler» avec le prix de la mise en scène en oubliant la richesse et la force de son sujet. D'autres œuvres en compétition particulièrement réussies sont aussi passées à la trappe. Comme le film russe Ellipsis de Andrei Eshpai, brillamment adapté d'une nouvelle de Viktor Nekrassov; Kira Geogievai, une des œuvres qui a dominé la sélection. Comme aussi le film français de Viviane Candas : Suzanne. Une œuvre taillée sur mesure pour de grands acteurs Patrick Bauchau, Edith Soob, Jean-Pierre Kalfou… Une histoire qui est un peu le reflet de l'histoire de la guerre d'Algérie. Il s'agit d'un couple d'intellectuels, professeur de grec-latin et professeur de musique, qui ont enseigné dans les années 1950 à Mascara et la malchance a fait que, de passage un jour à Alger, leur fils meurt dans l'attentat du café Le Coq Hardi (à l'emplacement duquel il y a aujourd'hui Luftansa). Ce drame leur a permis de regarder avec lucidité les événements qui se sont déroulés sous leurs yeux et de prendre conscience de la justesse de la cause algérienne.